Interview faite par Pécos et Maxime Le Texier.

C’est en détruisant nos pauvres petites oreilles engourdies avec un monstrueux premier album, "Utility Of Useless Things", que Membrane s’est fait remarqué par la presse musicale nationale. Pourtant, ces musiciens chevronés arpentent depuis déjà une bonne dizaine d’années la scène noise rock hexagonale. Aujourd’hui plutôt moribonde, cette scène nous livre tout de même encore d’excellents groupes. C’est juste après leur show en compagnie d’Unsane au Chato’Do de Blois, que nous sommes allés poser quelques questions à Jérôme et Nicolas encore tout transpirants.

Vos impressions juste après ce concert ?

Nicolas (guitare / chant) : Il faisait super chaud sur scène, mais sinon c’était cool, ça s’est très bien passé.

Présenter nous un peu Membrane, sa formation, son évolution…
Nicolas : À la base avec Jérôme on jouait dans un autre groupe qui s’appelait Blindfold. Puis en 2000 on a formé MEMBRANE avec Philippe à la batterie, on est donc en trio depuis 5 ans. On a sortit notre premier album en mars, "Utility Of Useless Things", chez Basement Apes (ndlr: label de Superstatic Revolution, Time To Burn, Spinning Heads…).

Comment s’est fait le contact avec Basement Apes ?
Jérôme (basse / chant) : Par mail (rires). On était très intéressés par ce qui sortait de chez Basement et les groupes dans lesquels jouait le mec qui s’en occupe. On l’a contacté et il a été intéressé par ce qu’on faisait.

Comment vous êtes vous retrouvés à partager l’affiche avec Unsane ce soir ?
Nicolas : C’est l’asso’ Sodawater (ndlr : asso’ de Blois qui organise le concert de ce soir) qui nous a contacté pour participer à cette date. On les avait rencontré au Printemps de Bourges parce qu’un des mecs de l’asso’ joue dans Enki (ndlr : groupe 2 basses batterie de Blois), Djey. Je suis allé les voir jouer et je lui est filé un disque, et c’est comme ça que le contact entre nous et eux s’est fait.

C’est un groupe qui fait sans conteste partie de vos influences, qu’est ce que ça vous fait de jouer avec eux ?
Jérôme : Ca fait extrêmement plaisir. C’est un groupe que l’on écoute depuis une dizaine d’années, donc on ne pensait vraiment pas jouer avec eux un jour. Ce qu’on aurait aimé c’est faire plus de dates avec eux sur leur tournée Française, ce qui devait être le cas à la base, mais les organisateurs des différents concerts préféraient faire jouer des groupes locaux.

Il ne passait pas chez vous, dans l’est ?
Jérôme : Malheureusement non !

Comment se porte la musique chez vous ? Y’a-t-il des choses qu’y s’y passent ?
Jérôme : Dans notre tranche à nous ce n’est pas très florissant, mais il y a quelques petits concerts. Il y a quand même quelques endroits où tu peux jouer du rock. C’est pas énorme mais ça pourrait être bien pire.

Vous avez participé aux Eurockéennes 2004, vous avez jouez avec The Dillinger Escape Plan, ce soir Unsane. Qu’est ce qu’on retire de ce genre de dates importantes ?
Jérôme : C’est toujours des bonnes expériences. Après, chaque concert est intéressant pour nous, que ce soit des grosses scènes avec des gros groupes, ou une date dans un petit bar, tout est toujours bon à prendre. Tout nous motive en fait. Si on ne faisait pas tous ces petits bars on ne jouerait pas beaucoup. Les petites scènes alternatives sont notre pain quotidien, et en plus maintenant c’est de plus en plus dur de trouver des dates. Surtout qu’on joue une musique pas forcément évidente pour tout le monde et qu’on se démerde nous-mêmes pour se trouver des plans, donc ce n’est pas toujours facile.
Nicolas : Aujourd’hui tu as beaucoup moins d’asso’ qui programment des concerts, tu as de moins en moins de lieux pour les accueillir…ça complique beaucoup les choses. Les concerts qui restent majoritaires sont ceux qui proposent des groupes qui marchent.
Jérôme : Nous on fait partie d’une scène noise qui constitue une catégorie à risque. Un groupe comme nous, pas encore très connu, n’attire pas des masses de gens et fait peur aux non-initiés.

Parlons un peu de votre album, "Utility Of Useless Things", sortit en début d’année. Composition, réalisation… ?
Jérôme : La composition a été assez longue en fait. Ce sont des morceaux qu’on joue live depuis l’année dernière et qu’on a un peu remodelés pour l’album. Le disque à été enregistré chez Serge Moratel à Genève (Knut, Tantrum…) en Septembre et masterisé chez Allan Douches (Converge, Dillinger Escape Plan…). On en est vraiment content.

  

Eclairez-moi un peu sur son titre, "l’utilité des choses inutiles"…. !?
(regard complice entre les deux)
Nicolas : Il n’y a pas vraiment d’explication précise, je trouvais que ça sonnait bien c’est tout (rires).

Ok, c’était juste histoire d’avoir un nom qui envoyait (rires). Ce côté rouleau compresseur sonore était voulu ou ça s’est fait naturellement ? En fait plus généralement, vous réfléchissez à la réaction du futur auditeur quand vous composez ou pas du tout ?
Jérôme : On nous pose souvent la question, mais rien n’est calculé dans ce que l’on fait, ce sont des choses qui nous viennent naturellement. En général, les compos naissent d’un riff de basse ou de guitare autour desquels on brode. C’est sûr que les choses que l’on écoute à ce moment là, se ressentent forcément des les morceaux, mais je pense que c’est le cas pour beaucoup de groupes.

Je n’ai lu que d’excellentes critiques de votre album. Ca vous flatte ou ça vous met la pression pour assurer le prochain ?
Jérôme : Je n’ai lu que d’excellentes critiques de votre album. Ca vous flatte ou ça vous met la pression pour assurer le prochain ?
Nicolas : On est vraiment super content de l’accueil que l’on a eu avec cet album, c’est clair. On ne s’attendait pas à ça une seule seconde.
Jérôme : Ca ne fait que nous renforcer dans nos positions et nous motiver pour la suite.

D’ailleurs vous en êtes où d’une suite à ce premier album ?
Jérôme : C’était un peu notre optique pour cet été, composer pour de nouveaux morceaux en vue d’un prochain album. Mais on n’a encore aucunes dates d’enregistrement ou quoi que ce soit. On verra en fonction de comment ça avance.

Vous allez nous mettre plus de 6 titres cette fois sur le prochain j’espère !?
Nicolas : Le pire en fait c’est qu’on a énormément de morceaux en fait. Pour l’album on en avait beaucoup plus que ça, mais on fait une grosse sélection à l’arrivée.
Jérôme : Effectivement on a que 6 titres, mais notre album fait quand même 30 minutes. J’ai tendance à préférer les disques plutôt courts de ceux on tu as 15 morceaux, surtout dans un style comme la nôtre, assez lourd et où les morceaux sont relativement longs. (leur titre le moins long, "Dirty" fait quand même 4 min 30)

Vous évoluez dans un style très lourd et oppressant, très en vogue dans les 90’s, avec les labels Hydrahead et Amphetamine Reptile notamment, et des groupes Français comme Tantrum, Condense, Portobelle Bones. Peut-on voir ça comme une sorte d’hommage à cette vague dont la plupart des groupes ont splittés ?
Jérôme : C’est vraiment la musique qu’on aime entendre et qu’on aime jouer donc à ce niveau là c’est plus une passion qu’un hommage. Mais c’est vrai que c’est ce qu’on écoute depuis longtemps et que la plupart de ces groupes n’existent plus maintenant, donc on perpétue à notre niveau leur héritage, donc à ce niveau là ça peut être perçu comme un hommage. Cela dit, c’est quand même avant tout la musique qu’on a envie de jouer.

Quelle est votre opinion sur la scène noise restante ?
Jérôme : C’est vrai qu’il n’en reste pas grand-chose aujourd’hui. Les groupes qui en restent sont des groupes qui, je pense, n’ont pas tout misé sur la musique pour vivre et qui font d’autres choses à côté. Nous aussi dans MEMBRANE on garde des jobs à côté pour vivre et pouvoir faire de la musique. Moi par exemple, je suis chauffeur poids lourds. On a des boulots et des familles qui nous prennent vachement de temps, donc on sait quand même où sont nos priorités. Par contre musicalement on se consacre uniquement à Membrane. On n’aurait vraiment pas le temps d’avoir plusieurs groupes.

Musicalement parlant, quels ont vos derniers coups de cœur ?
Jérôme : Il y a tellement de groupes qui sortent en ce moment que c’est vraiment dur de faire le tri et de tout écouter. On a des gros groupes qui nous ramassent toujours autant, mais il y a pleins de petits groupes qui valent le détour, d’ailleurs à ce niveau là on est complètement largué. Je lis souvent des chroniques de choses que je ne connais absolument pas, et qui sont en fait super bien. Par exemple un groupe de Bordeaux que j’ai écouté récemment, Metronome Charisma (ndlr : qui devait jouer à la soirée L’Alter de 08 juillet, mais qui ont été obligé d’annuler pour raison de santé du chanteur), je trouve ça vraiment génial, les compos me scient vraiment.

Pour finir, j’ai vu que vous remerciez Dan de Kérosène sur votre album (qui est quand même, il faut le reconnaître, la bible des fanzines, mais qui prend malheureusement fin).
Jérôme : Dan c’est un ami de longue date.
Nicolas : D’ailleurs il devait venir ce soir, mais il a eu un empêchement. Ca fait super longtemps qu’on le connaît parce qu’il vient de notre région (Haute-Saône 70).
Jérôme : On l’a connu quand il a commencé Kérosène à Nancy. Il nous a pas mal aidé avec son asso’, il organisait des concerts et il nous faisait jouer. On s’est revu aux Eurockéennes à Belfort, ça faisait des lustres qu’on ne l’avait pas vu. On est déçu qu’il arrête Kérosène, c’était vraiment un bon fanzine. Le fanzinat, quand on a commencé à faire de la musique, c’était le seul truc qui avait une grosse diffusion. Et c’est clair que Kérosène nous a vraiment aidé à ce niveau là. On l’en remercie.


Le site officiel : www.blindprod.com/msupport.htm