Interview faite par mail par Braindead

Pour ceux qui n’ont pas eu la même chance que moi d’accéder à votre dossier de presse, pourriez-vous vous présenter  : où et quand est né le groupe ? Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Olivier (batterie) : A la base, LIVHZUENA résulte de la rencontre en Septembre 2011, via les petites annonces musicales, de deux expatriés de leurs régions d’origine pour raisons professionnelles : Nico, guitariste (ex-Sumeria), et Olivier, batteur (ex-314, The Dying Seed). Franck (ex-Beer’N’Paradise) se joint rapidement à nous au chant, puis c’est là que tous se complique pour compléter la formation. La joie des auditions mémorables et la valse des musiciens démarrent. Après avoir rencontré des guitaristes venant sans guitare, des bassistes "oui mais moi à la base, chuis guitariste mais j’trouve pas de groupe, alors bon...", nous trouvons enfin notre bassiste à nous en Août 2012 : Seb (ex-Silent Dawn, Beyond The Silence, Dawn Of Might), Nous avons sorti un EP 2 titres en 2013, enregistré chez Gwen Kerjan du studio Slab Sound, ce qui nous a permis de faire quelques dates sympathiques comme le Vauban à Brest en Février 2014, avec notre second guitariste, Laurent (ex-Cebren Khal) arrivé peu de temps auparavant. En Juillet / Août 2014, nous avons enregistré notre album "Dark Mirror Neurons", de nouveau chez Gwen Kerjan, sorte de croisement entre Tue Madsen, Peter Tägtgren et Bob Rock !! En clair, cet homme sait tout faire et nous a poussés au-delà de nous-mêmes !

Comment pourrait-on définir votre genre ? Le limiter à une appellation "modern death metal" me semble réducteur tant les influences progressives sont en même temps riches et difficilement reconnaissables…
Olivier : Le postulat de départ avec LIVHZUENA était de composer une musique puissante et mélodique, avec des passages qui nous demandent de la réflexion et de la mise en place afin de pouvoir s’exprimer en tant que musiciens. Mais l’objectif reste de proposer des morceaux intéressants à l’écoute tout en étant un exutoire pour ses exécutants ! Nous faisons du death mais sans aucune restriction ou barrières, quoiqu’il nous faille parfois réfréner les envies gangsta rap de Franck ou de hair metal de Laurent !
Seb (basse) : Pour moi coller une étiquette musicale en particulier me semble réducteur. On aime la musique ou on ne l'aime pas. Beaucoup de personnes ratent de belles occasions de se faire botter les fesses par des groupes à cause de jugement hâtifs. Nos influences sont diverses, elles ont évolué depuis que nous avons commencé à faire de la musique et évolueront encore dans le futur car nous sommes des gens ouverts d'esprits. Nous souhaitons apporter le meilleur pour nos compositions. Si des groupes comme Trepalium, Hacride, Gorod ou Pitulls In The Nursery par exemple s'étaient limités à un style particulier de "metal" on se serait bien fait chier.

A ce sujet vous citez Gojira comme influence majeure (surtout dans les vocaux et les contretemps) et Meshuggah pour la rythmique lourde technique et carrée. Pourquoi ces groupes en particulier ?
Olivier : Tous, dans le groupe, admirons ces deux groupes pour leur démarche, leur carrière et bien sûr leur musique. Gojira, c’est l’exemple suprême au niveau compositions et évolution artistique et professionnelle. Meshuggah, c’est un truc de malade, à se demander comment sont connectés leurs neurones pour parvenir à sortir des albums aussi fous. Mais nous avons pleinement conscience que ces influences sont assez évidentes à l’écoute de notre premier album et qu’il va nous falloir s’en détacher et repousser nos limites pour le deuxième !
Seb : Ce sont des groupes que nous apprécions à titre individuel. Gojira et Meshuggah ont eu un impact très fort sur la scène métal. Ils sont de très bons exemples à suivre. Là encore, ils ne se sont pas bloqués sur un style de musique particulier et le mélange est très très bon.

Même si votre premier full-length est très réussi, ne craignez-vous pas la redondance sur les futurs albums ou travaillez-vous à créer une identité musicale vierge et propre à Livhzuena ?
Olivier : Cela complète ma réponse à la question précédente, mais nous écoutons de nombreux autres groupes pour enrichir notre vocabulaire musical. Evidemment, nous avons encore une réelle personnalité à démontrer et ce travail a déjà commencé, car la phase de composition est enrichissante et passionnante.
Seb : Nous sommes très attentifs pendant la phase de composition. Nous nous efforçons donc de proposer quelque chose de nouveau à chaque fois pour ne pas nous répéter et ainsi tomber dans le piège de la facilité.



Vous bénéficiez du soutien de Klonosphere, un label que je respecte par-dessus tout pour ses choix artistiques exigeants et chiadés, vous être distribués par Season Of Mist, un autre mastodonte du marché français, comment se sont faites ces collaborations et surtout que vous ont-elles apporté en termes de professionnalisation ?
Nico (guitare) : La rencontre avec Guillaume Bernard (Klonosphere) s’est faite assez classiquement si je puis dire. Nous l’avons contacté en 2013 déjà pour lui faire écouter notre premier EP. Même si aucune collaboration ne s’est faite consécutivement à cette première prise de contact, nous sommes tout de même restés "connectés". Nous avons régulièrement donné des nouvelles à Guillaume, qui souhaitait continuer à être informé de l’évolution du groupe. Dès l’enregistrement de notre album, nous lui avons envoyé les morceaux et le résultat lui a plu ! Notre collaboration s’est faite naturellement par la suite. Concernant Season Of Mist, la distribution via ce réseau faisait partie du "package" proposé par Klonosphere. Nous n’avons pas eu la chance de les rencontrer même si ce n’est pas l’envie qui manque !
La collaboration avec Klonosphere nous a énormément apporté, notamment en termes de promotion ! Jusqu’à présent nous étions autonomes sur la promotion du groupe et notre manque cruel d’expérience a induit une véritable inertie dans notre évolution. Notre signature avec la Klonosphere nous a permis d’avoir accès au réseau du label et de profiter aussi de son savoir-faire pertinent qui n’est aujourd’hui plus à démontrer. La nature de musicien de Guillaume fait également de lui une personne d’excellents conseils sur la façon d’aborder les choses dans notre évolution. Nous sommes vraiment très heureux de pouvoir travailler avec lui.

Le côté progressif voire expérimental est présent, vos compos sont longuement élaborées, scénarisées pour ne pas dire cinématographiques, mariant différentes atmosphères, quelles sont les thématiques de vos textes ? Varient-elles suivant les périodes, les humeurs, des références cinématographiques ou peut-être littéraires ?
Franck : Plutôt qu’une explication alambiquée et fastidieuse, autant expliquer le concept de chaque titre :

MARS
Durant le premier vol spatial habité vers Mars, un professeur spécialiste de la vie embryonnaire des mathématiques regardait fixement notre planète Terre à travers un hublot. Et brusquement la perdait de vue…
Réf = Mars 500 (programme expérimental) / Olivier Keller (Aux origines de la géométrie : le paléolithique "Le monde des chasseurs-cueilleurs")

NÄLLÏ
Avant l’affrontement contre le navire des marchands de science à l’horizon du trou noir, NÄLLÏ second capitaine pirate de l’équipage du Gorgon transmet à son fils SÄLÄE les secrets du Samadhi. Et l’homme devient pure information…
Réf = Samadhi (concentration et établissement dans l’éveil) / Stephen Hawking ("Trous noirs et bébés univers")

WAVE THE BANNER
Le capitaine pirate de l’équipage du Gorgon, exlaté par l’affront, s’adesse à ses hommes "tourmentés" par la vue d’un navire ennemi, naviguant à l’horizon du trou noir. Gardiens de la cinquième dimension (la dimension du temps imaginaire) et maitrisant la gravité et le temps, ils entendent se faire respecter et sont prêts au combat…
Réf = One Piece (manga) / Cygnus X-1 (premier candidat trou noir) / Stephen Hawking ("une brève histoire du temps")

SHADOWS AND MATTER
Naviguant sous forme de pure information en jouant sur la fluctuation des changements de signature de la métrique de l’univers, l’équipage du Gorgon attaque…
Réf = One Piece (manga) / Bogdanov ("Avant le Big Bang") / Samadhi (concentration et établissement dans l’éveil)

QUANTIC QUAKE MONSTERS
Faisant partie des brigades spéciales de protection défendant la vallée de la stabilité. Le binome 24-88 "transcendé" par leurs armures quantiques œuvre à défendre leur monde des fissions spontanées, de la radioactivité et des cascades de désintégrations béta et alpha…
Réf = L’attaque des titans (manga) / Irfu-CEA (film d’animation "La vallée de la stabilité")

VOID
Sur un astéroide transformé en prison de haute sécurité pour les hommes bannient de la planète Terre, un prisonnier contemple une étoile se faire dévorer par un trou noir…
Ré f= Kip Thorne ("Trou noir et distortion du temps)

DARK MIRROR NEURONS
Sur terraforma 1, la seule forme de divertissement autorisée pour la centaine d’ouvriers était le grand tournois de Mixed Martial Arts (MMA). Après une grande et longue carrière Jorina refusa de mourir dans l’octogone…
Ré f= Jorina Baars (MMA fighter) / Dragon ball Z (manga) / les neurones mirroirs

Je suis toujours intrigué par la manière dont composent les artistes, pourrais-tu nous expliquer qui intervient et à quel moment, si le groupe procède à un brainstorming post-création, si chacun de vous a son lieu de prédilection pour composer... en un mot, la pré-prod.
Olivier : Les fondations de nos morceaux ont souvent été posées en répète par Nico et moi-même car nous sommes là depuis le début et habitons à quelques minutes l’un de l’autre. Franck, Seb et Laurent viennent ensuite agrémenter tout ça de leurs talents respectifs, puis Nico passe à une phase de travail plus solitaire où il dissèque la structure, essaye des arrangements puis nous soumet le résultat proche du final. Et à partir de ce moment, nous répétons encore et encore jusqu’à maitriser le mieux possible le morceau.

Certains groupes composent la musique en premier lieu puis couchent les textes dessus, d’autres en revanche se basent sur les textes pour construire leurs riffs. Vous appartenez à quelle catégorie ?
Olivier : La musique vient en premier puis rapidement (enfin… tout est relatif !!), les neurones de Franck se connectent pour nous élaborer son concept comme décrit précédemment.

Il y a dix ans, la com via les réseaux sociaux semblait être le Saint Graal pour tous ces groupes qui n’avaient pas de présence dans la presse spécialisée. Ces derniers temps, on frôle surtout l’asphyxie : trop d’info tue l’info et nombre de formations prometteuses se retrouvent noyées dans la masse. Quelles sont pour vous les solutions à appliquer afin de se différencier et ne pas devenir seulement un bon groupe parmi tant d’autres ?
Seb : C'est vrai qu'Internet nous offre trop de choix. Il suffit de se balader sur YouTube par exemple pour s'en rendre compte. A titre personnel, je découvre des groupes chaque jour. Je prends des beignes souvent parce que je ne juge par l'artiste. Je lui laisse sa chance et je me fais surprendre. Parfois non, mais je fonctionne toujours au coup de cœur. Certains musiciens ont des projets solo ou annexes et c'est très difficile de tout suivre tellement il y a de sorties d'albums. Il n'y a pas de solution miracle quand à la question de pérenniser en tant que groupe tellement il y a de combinaisons possibles. Je pense que c'est un travail sur le long terme. Actuellement les groupes qui commencent à se faire réellement un nom sont ceux qui tournent depuis une bonne dizaine d'années.



Quels regards jetez-vous sur l’industrie musicale actuelle, les évolutions majeurs (positives et négatives), les crises traversées et selon vous, quel est l’avenir du metal au sein de cette industrie ?
Seb : L'industrie reste et restera une industrie. Toujours plus gros, toujours plus vite etc... L'industrie a évolué à tel point qu'elle est devenue un monstre hors de contrôle. Personne ne lui résiste. Il n'y a que l'argent qui la domine... Tout le monde veut sa part du gâteau. Il y a beaucoup de groupes qui rêvent de devenir les futurs Metallica mais beaucoup sont étonnés et déçu face à la réalité du monde musical. Nous sommes très réalistes face à tout cela et nous pensons que pour préserver la scène metal et son futur, il faut être sur le terrain, rencontrer les gens, continuer de soutenir les groupes locaux.

Justement que penser de la scène metal actuelle, entre ces jeunes groupes qui font du copier-coller sans réelle personnalité et certaines légendes qui reviennent nous faisant comprendre que la qualité est peut-être derrière nous ? Quels nouveaux groupes ont, selon-vous, un potentiel pour durer et se faire connaître sur la scène internationale ?
Olivier : Je parle en mon nom, mais je pense que nous sommes trop jeunes (35-40 ans) pour sombrer dans le syndrome du "C’était mieux avant !". La musique, comme toute forme d’art est inépuisable de talents et de créativité. Ce n’est pas pour flatter nos patrons, mais il suffit d’écouter les groupes de chez Klonosphere ! Hypno5e nous a mis à tous une sacrée claque, Nico est fan d’Hacride depuis longtemps et Trepalium est grand, très grand !
Seb : Hypno5e a un fort potentiel pour exploser sur la scène internationale.

Comment expliquez-vous la difficulté qu’ont les formations françaises à se faire connaître à l’étranger, à part quelques contre-exemples bien sûr ?
Seb : Je pense que la barrière de la langue explique pas mal de choses. Si tu ne possèdes pas le bon réseau et certains moyens financiers, tu ne risques pas d'aller bien loin. Déjà à notre niveau si on arrive à trouver des dates en France sans perdre d'argent ça sera une belle petite victoire. Peut-être aussi parce qu'en France la scène musicale est très nettement sous-estimée. Je pense que la culture n'a pas de valeurs aux yeux de nos dirigeants politiques. Il n'y a qu'à voir le statut précaire des intermittents du spectacle, ça peut te donner un début de réponse à ta question.

Que pensez-vous du fait que l’on cherche absolument à étiqueter chaque groupe, souvent sans leur demander leur avis, les enfermant ainsi dans une identité musicale dont certains ont du mal à se défaire et au risque de décourager un public potentiel ?
Olivier : Il faut bien orienter l’auditeur et rassurer l’acheteur potentiel, mais après, libre aux groupes de s’y coller pour attraper un marché ou de s’en éloigner pour juste exprimer sa musique et ses idées sans se soucier d’une quelconque industrie musicale ; je pense à Faith No More qui ne s’est jamais restreint à rien. Même leurs photos de presse ne sont pas classables ! Ce groupe est immense !
Seb : Les musiciens sont plus occupés à jouer de la musique, je pense.

Comment envisagez-vous l’avenir de Livhzuena ? Des envies particulières, des projets annexes…et avec quel groupe(s) fantasmez-vous de partager une affiche ?
Laurent : Je pense qu'à notre niveau l'objectif premier c'est de se faire plaisir en créant de nouvelles compos, rendre notre musique encore plus précise et ambiancée, sortir des albums, défendre notre zic sur scène. On espère faire tous de notre mieux pour promouvoir "DMN" et aménager nos emplois du temps respectif. Je pense que cet album le mérite vraiment. Pour nos envies particulières je crois que Franck souhaite monter un groupe de glam à la Steel Panther... non je déconne. (sourire) Après perso, une affiche que j'aimerais c’est Periphery + LIVHZUENA ou Meshuggah !
Olivier : Pour ma part, faire quelques dates avec Orakle, dans lequel mon petit frère Antoine est guitariste, me ferait grandement plaisir !
Tous : Mille mercis à French Metal pour cette sympathique interview.


Le site officiel : www.facebook.com/livhzuena