Interview faite par mail par Sam

Salut les mecs, alors avant de rentrer dans le vif du sujet on va se faire une petite présentation du groupe en règle. Qui est qui, d'où venez-vous, etc...
Mathieu est au chant, Julien et Florian aux guitares, Nico à la basse, Sylvian à la batterie et nous venons tous de Bordeaux. Le groupe a démarré en 2006.

Bon, votre dernière galette n'est pas sortie depuis très longtemps, assez violente si l'on peut dire, elle marque les esprits, comment s'est déroulé le processus de composition de ce CD ?
Julien (guitare) : Le processus de composition de "Rigor Mortis" est assez particulier si on peut dire… Après notre premier EP en 2008 nous avions 2 nouvelles compositions ("Nothingness" et "Post Mortem") d’un registre nettement plus violent qui nous donnaient un réel plaisir à jouer live, puis en 2010 j’ai décidé de partir une année en Australie accompagné de mes guitares, le contexte psychologique de l’époque n’étant pas des plus joyeux j’ai composé les morceaux "Intro", "Rigor Mortis", "Ray Of Light", et "Pacific Murder". Puis à mon retour nous avons décidé d’enregistrer les morceaux pour réaliser une pré-production pour un deuxième EP. Mais nous avions encore des idées à développer… alors au final nous avons passé l’année à peaufiner les morceaux existants et à en composer de nouveaux ("Deathly Vision", "RIP", "Time To Go") afin de proposer davantage de son que sur un EP classique. Cet album est là aujourd’hui aussi grâce à l’aide de Nico du groupe Simplixity qui nous a enregistrés et qui a contribué aussi en deuxième guitare.
Mathieu (chant) : Julien a commencé la composition des morceaux alors qu'il était en Australie, et ce qu'il nous proposait à chaque fois par mail nous plaisait vraiment beaucoup mais c’était assez étrange de se projeter dans un futur album sachant que nous n’étions pas réunis. Pour m’a part j’ai trouvé le temps très long et j’avais l’impression que ça ne se ferait jamais. Enfin nous n'avions qu'une hâte, c'est qu'il rentre pour continuer à bosser tous ensembles. Le reste s'est fait en studio une fois le groupe au complet lors de séances d'enregistrement qui ont déviées en séance de compositions. Le fait d'avoir enregistré chez un ami (Nico de Simplixity) nous a permis de prendre le temps de faire ce que nous voulions vraiment et d'apporter pas mal de changements au fur et à mesure du temps. Chose que l'on peut rarement faire lorsque l'on passe par un studio professionnel avec un forfait à la journée ou à la semaine. On le remercie d'ailleurs encore pour son travail et sa patience.

Vous évoluez dans une frange très noire du metal si l'on peut dire, d'où vous viennent vos influences ?
Mathieu : On écoute bien évidemment tous du metal et cela forcément nous influence, mais on s'inspire aussi pas mal des films, de l'art en général, des faits divers etc. On aime aussi beaucoup l'humour noir. Et il faut avouer qu’on a des personnalités ou des propos qui parfois peuvent porter à confusion, voir à certains conflits. Mais on le vit bien et surtout on s’en fout, c’est l’essentiel.
Julien : Mathieu a dit l’essentiel, pour le côté influences musicales on retrouve Metallica, The Haunted, Parkway Drive, As I Lay Dying, Hatesphere, August Burns Red et Gojira et bien d’autres dont on n’est pas encore au courant.

Votre musique reste et s'avère très technique, est ce un découragement pour les musiciens qui vous rejoignent en chemin ? Avez-vous eu de nombreux changements de line-up d'ailleurs ?
Julien / Mathieu : Nous restons modeste sur la technicité en question… On ne pense pas que nos morceaux soit très techniques, où alors c’est peut-être une impression après les avoir joués des centaines de fois mais il y a d’autres groupes bien plus techniques qui en repousseraient plus d’un. Notre objectif est davantage de faire bouger les têtes, pour ça un mieux vaut un bon gros riff qu’une équation de notes. Nous avons eu deux changements de bassistes, pas pour des raisons techniques mais plutôt pour des raisons professionnelles et personnelles. Le bassiste définitif arrivé en 2009 ayant composé pour "Rigor Mortis", n’a eu aucun découragement de sa part bien au contraire. C’est un excellent bassiste. Récemment nous avons rajouté une guitare au groupe (Florian), lui par contre a dû apprendre tout l’album ! Venant du groupe Demented, que nous considérons techniquement très violent, il n’a pas eu tant de mal, et son arrivée fait énormément de bien au groupe. Tout récemment nous sommes à la recherche d’un batteur, Sylvian ayant décidé de se consacrer à peaufiner sa technique.

Dans un de vos morceaux, nous tombons sur un discours en allemand... celui-ci, si l'on ne connaît pas l'allemand et/ou si ne prête qu'une oreille distraite, peut avoir une certaine connotation... Expliquez-nous un peu cela.
Julien : On s’attendait à cette question ! D’ailleurs nous avons pris soin d’accompagner l’envoi du CD à chroniquer d’une lettre explicative à ce sujet. Nous étions conscients que certaines personnes allaient se poser des questions. Il est vite arrivé d’être catalogué mais à notre niveau de notoriété ça nous fait surtout marrer de voir comment les gens pourrait réagir à cela. Mais concrètement nous tenons à informer les auditeurs que sur l’album un morceau intitulé "Time To Go" contient un sample tiré d’un discours d’Adolf Hitler, pour éviter toute mauvaise interprétation nous tenons vivement à préciser le contexte étant donné que les paroles ne sont pas sur le digipack et pas encore disponibles sur notre Facebook. Le morceau "Time To Go" décrit la descente psychologique d’un SDF se persuadant que sa vie est irréversiblement sans avenir et que la seule solution pour lui, serait le suicide. Le sample a été utilisé dans un premier temps pour son aspect auditif de discours vieillot historique cassant la structure du morceau pour mettre en valeur le riff final. Il est placé entre une mélodie symbolisant la perte de contrôle de son esprit (le texte "finger on the trigger" indique que le narrateur est au bord du passage à l’acte) et le final du morceau consacré à la description des sensations vécues en mourant. Le sample marque donc la transition entre la réflexion et le passage à l’acte.
On peut imaginer deux interprétations : Notre personnage entendrait ce discours-là telle une hallucination auditive le poussant à tirer sur la gâchette, ou alors qu’il effectuerait une projection psychologique sur l’exemple d’Adolf Hitler, qui tout comme le narrateur, et d’après la rumeur populaire, s’est suicidé à un moment donné où il dû réaliser que sa vie n’aurait plus d’avenir et que comme le dit le titre qu’il est "temps de partir". Cela dit nous avons bien fait attention de sélectionner un sample qui ne contient aucune allusion raciste ou antisémite. 
Mathieu : On a toujours joué la carte de la provocation et mis en avant le côté sombre de l'humain et ses déviances au maximum, Adolf Hitler faisait parfaitement l'affaire. Si nous avions trouvé un authentique discours du diable, on l'aurait utilisé sans hésitation.

Votre CD est sorti depuis quelques mois, quels sont les retours que vous avez sur celui-ci ? Autant de la part des médias de la presse que du public ?
Julien / Mathieu : Les retours sont plutôt bons dans l'ensemble au niveau du public, même si nous n'avons pas fait autant de concerts que nous le voulions. Pour ce qui est des médias et de la presse, on ne peut pas trop en juger puisque nous n'avons pas fait beaucoup de diffusion, cela dit nous avons été contacté par un webzine hongrois pour chroniquer notre album suite à une écoute sur notre MySpace et obtenu 8.1/10, VS-Webzine nous donne 14,75/20 et French Metal qui nous ont fait un grand honneur en nous décernant un 18/20 ! Nous espérons que ça va continuer sur cette lancée !

Avez vous prévu de défendre cet album sur scène ?
Julien / Mathieu : Bien sûr, nous n’avons fait que 5 concerts depuis son pressage… il va falloir accélérer là !

Quels sont donc vos projets pour 2013 ? Des festivals ? Une tournée ?
Julien / Mathieu : 2013 marque pour nous l’arrivée d’une deuxième guitare et la participation au Raging Metal Fest III. Nous n’avons pas de tournée prévue malheureusement… L’idéal serait d’être contacté par des groupes de la même façon que nous les contactons pour partager nos affiches… Nous devons continuer la promotion de "Rigor Mortis" pendant cette année, mais de nouvelles compositions sont en cours, la suite promet d’être tout aussi violente. On réfléchit également à une réédition de "Rigor Mortis".

On va revenir à l'album : comment se passe le processus de composition chez vous ?
Julien : Jusqu’à présent et si on prend l’exemple de "Rigor Mortis", On démarre de la guitare, je ne sais pas écrire la musique alors je compose dans mon coin des morceaux et on les enregistre, ensuite on voit quelle batterie conviendrait à tout le monde, puis la basse se colle dessus. Concernant les textes on se partage le travail avec Mathieu et on se donne des avis sur la mise en place du chant. Apres il y’a des exceptions, des délires en répétition qui au final deviennent de vraies idées ("Deathly Vision").
Mathieu : Généralement Julien compose les parties guitare de son côté et met en place le morceau. On se voit ensuite tous les deux pour l'écouter, boire quelques coups, parfois modifier deux ou trois trucs et caller le chant dessus. Cela prend plus ou moins de temps selon qui de nous deux écrit le texte, mais dans l'ensemble ça va assez vite à mettre en place. Le reste se fait en répète tous ensemble. Avec l'arrivée de Florian à la seconde guitare et des idées plein la tête, la composition et le résultat devraient être très intéressants.



De quoi traitent vos textes de manière générale, voulez-vous faire passer un message particulier ?
Julien / Mathieu : Nos textes tournent autour de la mort et toutes sortes de déviances mentales, et plus particulièrement des actes violents que l’homme est capable de commettre sous l’emprise d’une démence causée par des facteurs sociaux, psychologiques ou sentimentaux. La violence est traitée ici comme une pulsion, un fantasme, un moyen de cure, là où la mélancolie rejoint la folie. Le processus d'écriture permet de se lâcher, d’extérioriser, et surtout de se marrer un bon coup. La plupart du temps nous écrivions pendant une ou des périodes difficiles de notre vie quotidienne. C’est un bon exécutoire, en tout cas jusqu’à maintenant ça nous a plutôt réussi. Partir d’un sentiment personnel pour en imaginer une histoire extrêmement violente équivaut à une sorte de vengeance fictive qui franchement fait du bien sur le plan émotionnel. Nous n’avons pas de message particulier à faire passer, chacun y voit ce qu'il veut comme il veut , on fait de la musique, pas de politique, ni journalisme ou autre écoulement de morale bien-pensante qui bien souvent n’intéresse pas grand monde dans le milieu metal. On n’a pas encore atteint l’égocentrisme de certains artistes pour s’auto proclamer véhiculeurs de fond de pensée subtile… Et puis en repensant à nos textes… s’il y a un message particulier à faire passer, il vaut mieux ne pas le suivre… Et pour ceux qui se reconnaissent dans les textes, nous leurs conseillons d'aller consulter le plus rapidement possible.

On parlait des influences, mais au niveau films, livres, des ambiances qui vous ressemblent, qu'en est-il ?
Julien : Côté bouquins mon étagère se constitue de livres de Stéphane Bourgoin, des éditions Camion Bblanc, Peter Sotos, je ne suis pas trop Marc Levy… Côté films c’est bien trop vaste, j’adore le cinéma mais pour en citer quelques-uns dans des styles différents : "Lost Highway", "Bronson", "21 Grammes", "Le Createur", "Midnight Express", "Calvaire", "Bellflower", "Martyrs", "Toxic Avenger", "A Serbian Film"… J’ai tendance à préférer la barbaque à la guimauve…
Mathieu : Plutôt films SF / horreur / gore . Les artistes peintres comme HR Giger, William Hand, Sibylle Ruppert ou Jeffery Scott sont de grandes sources d’inspiration, ils sont un message ou un texte à eux tout seuls. Une simple balafre sur un visage ou une paire de seins écorchés vous racontent une histoire. Niveau littérature je suis plus branché bouquins peintures et arts graphiques. Même si je dois avouer que je ne suis pas un fervent amateur de romans ou autre sauf si un sujet m’interpelle particulièrement, j’ai dévoré avec grand plaisir les œuvres du Marquis de Sade, sacrée claque. Même si évidemment j’ai mon point de vue sur les tragédies, conflits et sujets graves du monde qui m’entoure je n’en fais pas une priorité, du moins pas dans mes textes, surtout qu’au final tout le monde se cogne complétement de ce que je peux penser. En tout cas pour parler de grande littérature, "Fluide Glacial" reste et restera ma bible. Ceci étant dit l’inspiration se concrétise avec Julien, il suffit que l’on passe une soirée ensemble pour que les idées fusent dans tous les sens, le challenge suprême étant qui aura l’idée ou les propos les plus tordus au final. Je pense nous avons encore de beaux jours de création devant nous.

Que pensez vous de l'évolution de la musique et du metal en particulier ? Des groupes à suivre dans les prochaines années ?
Mathieu : Il y a de tellement de groupes aujourd'hui que ça devient très difficile de savoir qui fait quoi et en particulier dans le metal à moins de passer sa vie à faire des recherches. Et puis pour les groupes moins connus il y a je trouve un petit côté business dans le milieu qui se développe au fil des années, c'est un peu dommage, ça ferme pas mal de portes. En gros si tu veux jouer et toucher un maximum de personnes avec ta musique, il faut avoir pas mal de contacts, lécher pas mal de culs, et surtout avoir un budget de départ assez conséquent.
Julien : Tout à fait d’accord, rien à rajouter. Parmis les derniers groupes que j’écoute que je pense suivre je citerais After The Burial, Parkway Drive et Northlane mais bon, Metallica et Gojira sont toujours bons à suivre dans les prochaines années.

C'est une période assez compliqué avec la fermeture de Virgin notamment... Que vous inspire cette évolution ?
Julien : Elle ne m’inspire rien de particulier mis à part le fait qu’il faut vivre avec son temps. La musique tend à se dématérialiser mais il y aura toujours les aficionados du packaging pour les acheter. Le CD reste efficace sur les platines mais le MP3 est parfait pour l’écoute en déplacement. Le marché de la musique n’est pas mort pour autant, Virgin a été racheté par Cultura, c’est quand même mieux que d’être racheté par les moquettes ST Maclou non ?
Mathieu : Personnellement cela ne me touche pas, et je n’en pense pas grand chose. D’ailleurs pour tout t’avouer je m’en fiche complétement donc je ne m’étalerai pas sur le sujet.

Allez, le gros groupe que vous aimeriez voir en 2013 ou qui, d'après vous, va véritablement s'affirmer comme référence dans le paysage metal français, et avec qui vous aimeriez jouer peut-être ?
Julien : Cette année j’aimerais voir Hatesphere en concert ou Deicide s’ils veulent bien arrêter d’annuler leurs tournées européennes. Je souhaite que nos groupes locaux tels que Yurakane, Breakdust, Pottiin, Bursthead, Unobstrusive et Simplixity se fassent une place dans le paysage metal français ils le méritent tous. J’aimerais jouer aux cotés de Gorod qui sont ultimes en live.
Mathieu : Le dernier album d'Aborted "Global flatline" est une méga tuerie, j'aimerais beaucoup les voir en live. Alors jouer avec eux je n'en parle même pas. Et puis bien sûr il y a Yurakane, groupe palois de la mort qui tue les kiwis, et Breakdust groupe de Bordeaux qui arrive avec du très lourd en 2013. A ne manquer sous aucun prétexte.

Vous avez survécu à la fin du monde, vos premières impressions ?
Julien : Je suis heureux d’être encore en vie, histoire de pouvoir être spectateur de futurs délires sectaires, espérant qu’ils auront pour finalité des suicides collectifs.
Mathieu : Les Mayas ont décidément autant que charisme et de clairvoyance que Météo France. Je suis profondément déçu.

En vous remerciant, je vous souhaite une bonne année 2013 métallique et vous laisse le mot de la fin.
Mathieu : Que l’esprit de Cyril Hanouna et son humour inégalable à moustache soit avec vous tout au long de l’année. Gros bisous. Merci à French Metal de nous avoir donné la parole.
Julien : Merci à vous pour votre belle chronique ! On espère se produire le plus de fois possible pour faire partager notre goût de la musique en attendant on encourage le plus de monde à écouter notre album en intégralité gratuitement sur Bandcamp. Et pour finir sur un mot je dirai le mot : margarine.


Le site officiel : www.myspace.com/hanathem