Interview faite par Cassie au Noumacore Festival à Mulhouse.

Hello les Dagoba, on ne vous présente plus maintenant. Quel 1er bilan tirez-vous depuis la sortie de votre EP "Release The Fury" ?
Werther (basse) : Il nous est arrivé quand même plein de choses. On a construit au fur et à mesure toute l'épopée musicale et discographique du groupe avec beaucoup de concerts et beaucoup de gens qu'on a rencontrés à travers la France, à travers les pays, donc oui beaucoup de choses et de belles rencontres. Mais beaucoup de plaisir, au final. Enfin pour moi en tout cas c'est surtout du plaisir.
Franky (batterie) : Exactement pareil. Je crois qu'on peut dire que ça a été depuis le début de la discographie du groupe, vraiment que des moments géniaux avec des fois des cerises sur des gâteaux exceptionnels comme la 1ère partie de Metallica, des rencontres avec Stone Sour ou Corey Taylor, In Flames, Sepultura... C'est vraiment des rêves d'enfants qui se sont concrétisés grâce à DAGOBA. La fierté aussi d'avoir créé pas une petite entreprise mais presque, qui se ballade depuis 10 ans sur la route avec maintenant les techniciens et le conducteur, ce qui fait une belle activité autour du groupe et maintenant 4 albums qui ont bien circulé dans le milieu metal Européen et un petit peu aux Etats-Unis aussi. Je pense que l'on peut être fier de ce que nous avions créé et de ce qu'on a réussi à faire éditer en 10 ans. Maintenant j'espère que le bilan ne va pas s'arrêter là et qu'on va encore écrire quelques pages de cette histoire Dagobienne. Mais honnêtement, je pense qu'on peut être très content, fier et heureux de ce qu'on a réalisé jusque-là.

Mais d'ailleurs, qu'est ce qui vous a amené à faire de la musique et plus particulièrement du metal ?
Werther : Pour ma part, ce qui m'a amené à en faire c'est que je suis vraiment un fan inconditionnel de musique. Et ce qui m'a amené au metal c'est comme pratiquement tous les gamins de 13-14 ans à mon âge qui écoutaient Metallica, Skid Row... Des trucs qui faisaient vraiment que tes potes ils écoutent ça et qu'il y ait un rejet de la musique qu'on pouvait entendre à la télé comme les Dance Machine et compagnie. Moi ce n'était pas vraiment le style que je voulais écouter. Mes potes voulaient jouer dans un groupe et plutôt que d'aller à la piscine ou faire du judo, moi je préférais m'enfermer dans un local ou dans une cave parce que quand tu commences, tu joues avec tes potes et tu t'éclates ! Il n'y a pas trop de projections dans l'avenir quand tu as 13-1 4ans et que tu commences à faire de la musique, c'est juste que tu veux en faire... Tu prends une raquette de tennis et tu fais le fou en faisant du headbanging (rires)
Franky : Moi c'était la découverte des groupes de hard rock mythiques comme Guns N' Roses, Mötley Crüe, Scorpions, Skid Row qui m'ont vraiment fait tomber amoureux de ce style de musique, du look, de l'état d'esprit, de l'attitude de tout le mouvement hardrock américain et anglo-saxon. Ca a donc été un gros déclic je pense vers mes 10-11 ans, ce qui m'a forgé une personnalité vraiment spéciale qui est de moins en moins commune en France, donc il y a un côté marginal qui me plaît dans un sens. Puis l'envie d'apprendre un instrument, l'envie de partager ça avec des copains de classe et de se créer un groupe. Des rêves qui se créent au fur et à mesure avec l'envie d'être sur scène et d'enregistrer des disques... Au final ça se réalise, on achète sa première batterie, des premières répètes, on intègre des groupes, on fait des petits concerts et finalement on arrive à réaliser nos rêves progressivement. Donc oui pour moi c'était par des groupes de hard rock et par des clips. Au départ j'avais vu Tommy Lee à la batterie et je me suis dit que c'était vraiment exceptionnel, je me suis pris une claque et ça m'a un peu déboussolé. Ce fut un coup de foudre pour ce style de musique. Depuis ça n'a toujours pas changé, je suis très refermé à d'autres styles musicaux donc ça reste hard rock, metal, rock mais dans un style très varié.

Avec le recul, parmis tous vos albums sortis à ce jour, lequel préférez-vous et pourquoi ?
Werther : "What Hell Is About" car c'est on va dire l'album qui a reconnu DAGOBA et qui a posé le groupe à un autre niveau. Que ça soit au niveau de la reconnaissance biblique ou pour les compos / concerts. Mais également où les choses ont vraiment pris une autre ampleur.
Franky : Si Werther n'avait pas dit "What Hell Is About", j'aurais sûrement dit ça mais alors je vais dire le premier album pour changer. Parce qu'il me rappelle un paquet de souvenirs où on avait 10 ans de moins. Une ambiance de répétition très adolescente dans le sens où on peut partir sur un riff, s'envoyer une vanne, finir une chanson qui a été majeure comme "Maniak" entre 14h et 17h. Dans ce premier album, il y avait un côté transpirant avec 4 jeunes qui voulaient vraiment se faire connaître en France. Des compos qui étaient certes minimalistes radicales avec une vraie envie d'en découdre avec le frenchcore et néo metal pré Parisien. On jouait de nos instruments comme on savait avec l'énergie de la jeunesse. Il en est sorti un premier album très agressif avec des titres que le public écoute encore et un côté un peu animal et direct qui m'a toujours plu. Je pense que ça a créé une certaine signature de DAGOBA.

Et suite à votre collaboration avec Vortex sur l'album "What Hell Is About", quel souvenir en gardez-vous ? Êtes-vous restés en contact et est-ce qu'une nouvelle collaboration serait possible ?
Werther : Pas plus que ça. C'est vrai qu'on l'a revu quand il a fait une tournée avec Arcturus, mais pas plus que ça car lui habite en Norvège et nous à Marseille donc c'est un peu difficile géographiquement. Pour ce qui est d'une nouvelle collaboration, je ne pense pas que ça serait vraiment intelligent de notre part car ce serait un peu comme une revie. On est pas très fan des trucs réchauffés qui feraient resservir quelque chose que l'on a déjà fait.
Franky : Oui je suis d'accord. Sinon ça a été très bref, il est arrivé avec sa copine en avion de Norvège au Danemark, a enregistré dans la nuit, on l'a emmené à l'hôtel et c'était fini. Ca a duré 4h, il a enregistré de façon très professionnelle. C'était hallucinant la qualité qu'il a : "Salut, j'écoute le titre, euh okay, je connais le refrain, 1-2-3-4 j'enregistre, on le refait une fois pour être sûr, allez bon on va boire un whisky !".
Werther : On a discuté pendant 2-3h en buvant un verre. C'était une belle rencontre.
Franky : Je pense que ça restera vraiment la cerise sur le gâteau pour l'album "What Hell Is About". Il a rajouté avec sa voix un côté épique qui rajoute un côté grandiose sur "It's All About Time" notamment et sur "White Guy" version 2. Grâce à lui, il y a un côté magique sur ces titres. Tu t'y attends pas, il y a un côté féerique un peu heavy-metal que j'adore. Sa voix, elle est unique. A cette époque-là, on était très dans l'album "Puritanical Euphoric Misanthropia" de Dimmu Borgir donc c'était un rêve qu'on touchait de près. Niveau qualitatif, il a sorti le grand jeu.
Werther : Ca s'est fait de manière : "Oh on aimerait bien... bon bah tiens je l'appelle". Et puis le patron du label nous a dit "Ok je vais l'appeler pour voir si ça lui branche ou pas et je lui envoie les titres".
Franky : Je ne pense pas que ça se refera parce que ça enlèverait le côté magique.
Werther : Même si on a l'idée ou le refrain du siècle, ça serait trop répétitif. Mais avec quelqu'un d'autre, pourquoi pas, si on trouve des idées.
Franky : Il faut vraiment que sur le refrain d'un titre, qu'on se dise : "C'est la voix de ce mec qu'il faudrait". Il faudrait que ça soit de manière évidente et que ça en vale le coup.



Votre album "Poseidon" qui est sorti il y a un an maintenant, a rencontré un franc succès. Vous-y attendiez-vous ?
Franky : Grâce au titre "Black Smokers", sur lequel on a fait un clip et qui semblait un peu plus accessible au grand public, avec une signature sur un nouveau label qui avait des contacts un peu plus large, on a réussi à toucher un peu plus de passages télé, de radios, mais c'est encore resté très marginal. Honnêtement, moi je ne me suis pas rendu compte qu'il y a eu un gros écart avec le milieu underground. Il y a pu avoir deux interviews un peu plus médiatisées que les autres sur Internet, quelques passages radios et sur MTV Pulse un truc comme ça mais rien de fantastique par rapport au business de la musique en France. Je pense que l'album a récolté un super succès mais pas forcément grâce à Europe 1 ou ces radios-là.
Werther : C'est plus le travail du groupe en amont et la qualité des chansons ou de l'album qui font le succès d'un album mais ce ne sont pas les médias de masse et de grand public. Au niveau du metal c'est sûr qu'on parle plus de DAGOBA que de plein d'autres groupes mais on reste quand même sous-médiatisé.
Franky : C'est un album qui a eu du succès dans le milieu metal Français, ça c'est sûr. Mais si l'album ne passait ne serait-ce que 2 fois dans la semaine pendant un an sur Europe 1, là ça pourrait changer pas mal de choses dans la mentalité, la culture Française et dans nos vies à nous. Juste un passage de 4 minutes même qu'une seule fois par semaine pourrait créer un succès qui dépasserait les frontières du metal mais au jour d'aujourd'hui, aucune radio ni télé ne prend ce risque, de peur qu'il y ait trop de pogos dans les chaumières ou je ne sais quoi.

Parmi tous les groupes Français émergents avec qui vous avez déjà joué, lesquels ont tout particulièrement retenu votre attention ?
Werther : Alors il y a eu T.A.N.K de Paris, qui était pas mal.
Franky : Ouais T.A.N.K c'était bien. Il y a le groupe Noein aussi que j'aime bien, même si on a pas joué avec eux. Mais bon on va dire T.A.N.K.

Et du coup aussi, qu'avez-vous pensé de la prestation de Nelly, au Hellfest, sur votre titre "Waves Of Doom" ?
Werther : Très costaud !
Franky : Elle était stressée. On la voyait les 20 premières minutes pendant 4 ou 5 titres, elle était sur le côté, elle paniquait. Et dès qu'elle a attaqué, rythmiquement c'était parfait, l'énergie, le côté frontmal... elle bougeait la tête...
Werther :Elle n'avait pas peur du côté foule.
Franky : C'était perturbant pour quelqu'un qui n'avait jamais fait de grande scène.
Werther : Avec autant de monde, c'est quand même les 5 premières minutes qui sont un peu perturbantes. Mais je pense que c'est pour tout le monde pareil. C'est "Wouaw, ça fait un choc.
Franky : Elle a très bien géré et puis la voix je la trouve vraiment parfaite. Elle nous avait dit qu'entre la première vidéo réalisée et le Hellfest, elle avait énormément répété. Pour moi, c'était encore bien mieux que sur la vidéo et je pense qu'au final, nous avions bien fait de la faire gagner parce qu'elle méritait d'être là. Moi j'avais bien été séduit par sa voix à la Arch Enemy pour une fille, le côté bien grave alors que souvent les filles c'est plus aigu. Elle a du gros coffre, ça se voit qu'elle en a vraiment sous la pédale.
Werther : Elle nous a surpris. On l'a vu un peu stressée et puis je trouve que c'était vraiment une bonne initiative de faire participer quelqu'un de l'extérieur au groupe. Finalement, ça s'est révélé être une bonne chose pour le groupe, ça a un côté original.
Franky : Moi je me suis régalé à suivre le concours dès le début, à voir tout ce qui se postait. Par exemple, j'ai découvert un chanteur qui m'a vraiment bluffé, c'était Medhi. Son groupe je ne l'ai pas écouté plus que ça mais sa voix... je me suis pris une grosse claque dans la tête. C'était plaisant de découvrir de nouveaux chanteurs qu'on ne connaissait pas.
Werther : C'était intéressant aussi de voir des gens de groupes qui s'essayaient et qui faisaient ça à leur sauce. Enfin voilà, c'était une belle expérience. D'ailleurs on s'est bien marré car on a vu des trucs assez extraordinaires quand même. On a vraiment eu de tout, des trucs abracadabrantesques.

Vous passez énormément de temps sur la route, comment occupez-vous votre temps ?
Franky : Par plein de trucs. Il y en a qui jouent aux jeux vidéo, qui dorment, qui fument, qui font un peu d'instruments, qui écoutent de la musique, qui sont sur l'ordinateur. Il y en a qui font des choses un peu sexuelles, qui pètent et qui rotent. Il y en a qui crient et qui chantent. On s'occupe comme on peut, c'est un camion vraiment petit, on a pas les gros camions avec couchettes et tout donc on est un peu les uns sur les autres, mais autrement on s'amuse. Sinon le reste du temps, quand on a fait nos balances, c'est quand même beaucoup d'ordinateur, quelques interviews, on mange et on discute souvent avec des fans qui arrivent un peu plus tôt. On occupe donc le temps, jusqu'au concert, de façon sympa.



Et justement, lorsque vous êtes sur la route, vous écoutez de la musique commune ou bien chacun écoute la sienne de son côté ?
Franky : C'est chacune de son côté. Moi dans le camion je suis souvent devant avec le conducteur donc je me la joue un peu DJ mais quand ça ne plaît pas à tout le monde, certains mettent leur casque. Ca peut varier. On n'aime pas tous les mêmes musiques donc il y a un côté "chacun pour son casque".

D'après vous, quelle pourrait être la prochaine étape pour Dagoba, son prochain palier ?
Franky : On va essayer de composer de nouveaux titres.
Werther : De composer un nouvel album, quelque chose d'encore plus fédérateur. Mais pour l'instant on a pas encore posé une seule note tous ensemble.
Franky : Il va falloir encore qu'on réfléchisse, qu'on en discute tous ensemble, de l'orientation qu'on veut prendre pour décider là où on veut aller. Pour ma part, j'aimerais qu'il y ait peut-être plus de titres simplistes et qui accrochent le public de façon massive. Pas vraiment aller dans la complexité et des chansons de 6 minutes mais vraiment faire chanter le public et bouger la tête. C'est vraiment quelque chose qui me plairait, de marcher dans une direction plus fédératrice, qui toucherait le grand public dès les premiers riffs et où il n'y aurait pas besoin d'écouter l'album 80 fois pour entendre qu'il y a un sample caché sous un riff de guitare à la 45ième secondes et qu'on ne l'entende pas bien parce que si ou parce que ça. Un truc qui claque et que tu retiennes de suite. Parce qu'au bout d'un moment, le public est tel qu'il n'est pas comme celui de Dream Theater ou ne sont pas des philosophes de la musique, c'est des gars qui veulent s'en prendre plein la gueule et chanter et bouger la tête de façon agressive. Donc je pense qu'à un moment donné, il faut se rendre compte des choses.

La dernière question serait de savoir, s'il est envisageable que Dagoba fasse un jour du grand show sur scène, c'est-à-dire un grand concert avec du spectacle digne d'un grand groupe ?
Werther : Ce qu'il faut savoir, c'est que ça demande des infrastructures assez importantes et de réunir 3000 à 4000 personnes par soir. Et en France, pour un groupe de metal, c'est assez compliqué. Donc je pense que des idées on pourrait en avoir jusqu'à la fin des temps, ce n'est pas ce qui nous manque.
Franky : C'est clair qu'avec le budget de Rammstein, on aurait un show pyrotechnique. Il est vrai que c'est un truc qu'on a toujours voulu. Si on arrive à passer certains paliers et qu'on arrive à grossir de belle façon, on investira dans le spectacle. On tente de le faire progressivement...

C'est ainsi que l'interview s'achève. Je vous remercie de votre disponibilité et vous souhaite un excellent concert.
Franky : Eh bien merci à toi !

(PS : Je tiens à préciser, et à rajouter, que ce fut un excellent concert !!!)


Le site officiel : www.dagobaonline.com