Interview faite par mail par Gloomy

Hello ! Avant toute chose, puisque c’est ici la première interview que vous livrez à French Metal, pourriez-vous présenter Bad Tripes aux lecteurs qui ne vous connaitraient pas encore ?
Hikiko Mori (chant) : Salutations. BAD TRIPES est donc un groupe de metal originaire de Marseille, formé en 2006. Voici la recette pour préparer du BAD TRIPES : prenez du metal, faites fondre dans une marmite d'electro, rajoutez des morceaux d'accordéonistes, de pianistes sourds et de deux prostituées Japonaises spécialisées dans les perversions médicales, assaisonnez de textes tragicomiques et mélodramatiques, portez à ébullition, versez dans vos oreilles et dégustez.

"Phase Terminale" est votre premier album : comment s’est passé son enregistrement ? Était-ce la première expérience studio des membres du groupe ?
Hikiko Mori : C'était pour ainsi dire un dépucelage quasi collectif de l'expérience studio. Nous nous sommes retirés à la campagne, à l'abri de la civilisation, à enregistrer pendant des dizaines d'heures d'affilée la nuit, à dormir le jour, à trouver sans cesse de nouvelles idées... C'était assez étrange et très stimulant.
Seth (guitare) : Pour ma part, disons que je n'en suis pas à mon premier groupe, j'ai pas mal de vestiges audio qui traînent, et ça va de l'enregistrement bien pourri jusqu'au studio de dingue (rires). Pour ce qui est de l'enregistrement de "Phase Terminale", j'en garde un souvenir bien rock 'n' roll. On a décidé de réaliser le projet par nous-mêmes plutôt que de l'enregistrer dans un studio quelconque, pour se retrouver avec un son "déjà entendu". Je pense qu'on doit les ambiances malsaines de BAD TRIPES à notre ingé-son qui a parfaitement cerné l'univers glauque et salace du groupe.
Hikiko Mori : Notre ingé-son, un garçon charmant au demeurant, étant lui-même glauque et salace, ça nous a bien aidés.

Quel est le morceau duquel vous êtes les plus fiers ? Le morceau que vous feriez écouter en priorité à quelqu’un qui n’aurait pas encore jeté une oreille sur "Phase Terminale" ?
Seth : "Alice Über Alles" sans hésiter.
Hikiko Mori : J'ai un faible pour "Na Zdorovie" qui me permet de laisser sortir mon côté Edith Piaf refoulé, mais "Alice Über Alles" est effectivement la plus représentative de l'esprit du groupe.

Bon, et maintenant, pour mettre les points sur les ‘i’ définitivement : comment décririez-vous votre propre musique ?
Hikiko Mori : Il va y avoir beaucoup de points sur ton "i". Je ne suis pas douée pour l'étiquetage... Disons... du shock-rock-metal de cabaret electro hystérique porno-poétique. Voilà, ça c'est bien.

On sent aisément que vous ne cherchez pas à appartenir à un style bien défini. En général, trouvez-vous que les groupes de metal ont tendance à ne pas oser trop prendre de risque afin d’entrer plus facilement dans un "moule" ?
Seth : Je sais pas si on peut parler de « prise de risque » mais il est vrai qu'il est beaucoup plus aisé de gentiment s'enfermer dans un style musical qui prospère depuis des années plutôt que de tenter d'apporter un minimum sa touche perso à la musique. A mon sens c'est exactement ce qui se passe pour le metal Scandinave depuis In Flames. A mon avis, être un bon musicien en 2010 ne suffit plus, le groupe doit véhiculer quelque chose de très fort à travers sa musique, ses textes et surtout... son univers !
Hikiko Mori : Le souci de beaucoup de groupes de metal est, du moins il me semble, l'absence de curiosité. Dans BAD TRIPES nous avons des goûts assez variés et ne nous préoccupons pas de savoir quel style de musique nous faisons. Nous ne faisons que nous faire plaisir. Nous sommes tous férus de metal, donc ça en devient tout naturellement le ciment de notre musique, puis chacun amène une pierre à l'édifice en fonction de ses influences propres, musicales, cinématographiques, des idées d'ambiance... Si untel est allé aux putes Allemandes la veille, une ambiance de cabaret d'après-guerre peut en dériver, etc...

Hikiko, si je ne m’abuse, c’est toi qui écris l’entièreté des textes. Quelles sont tes sources d’inspiration pour des écrits aussi malsains ?
Hikiko Mori : Je suis ma source d'inspiration, comme toute connasse d'artiste foncièrement égocentrée. Je me base sur ma vie, mes fantasmes, amusants ou sanguinaires, mes désespoirs, mes emmerdes, ou juste de petites choses qui me troublent ou m'intriguent, comme ce que peuvent ressentir les hommes battus, essayer de comprendre ça tout en étant une gonzesse, se projeter dans la détresse des vieillards qui crèvent dans les hospices, chose à la fois lointaine et épouvantable, ou imaginer la candeur crasse et romantique d'Eva Braun dans un contexte de guerre mondiale. Bref, je dégueule du "malsain" comme tu dis pour m'assainir.

Quel "message" aimeriez-vous faire passer aux métalleux à travers ce disque ?
Hikiko Mori : Nous n'avons pas de message à proprement parler car pas de prétention prophétique. Je tenais seulement à écrire en Français ; souvent dans ce genre de musique c'est un exercice casse-gueule. Beaucoup de groupes donnent l'impression d'écrire en Anglais car ils n'assument pas leurs textes, parfois très couillons, ou justement parce qu'ils considèrent le texte comme un simple accessoire musical dénué de sens. Or je ne me voyais pas gueuler des conneries qui ne me touchent pas : je voulais exprimer ce que j'avais dans les tripes le plus spontanément possible, et n'avais pas envie d'altérer ce côté direct par une traduction malhabile. En plus j'ai un accent Français de merde quand je cause en Anglais.



En tant que groupe, quelles sont vos principales influences (musicales ou autres) ?
Hikiko Mori : Pour ma part à la base, il y a Les Tétines Noires (groupe alternatif Française du début des années 90, très décalé et dadaïste), des chanteuses comme Piaf ou Fréhel – d'où mon récurrent roulage des "r" - Catherine Ringer et bien entendu la superbe Nina Hagen. Mais ma principale influence est le performeur Jean-Louis Costes, à la fois outrancier et terriblement humain. C'est avec ses spectacles que j'ai eu envie de développer un aspect exubérant, animal et théâtral sur scène, et par ses chansons que j'ai pris conscience de la violence percutante de la langue Française ; les gros mots à mon goût ont davantage de saveur en Français qu'en Anglais, où ils paraissent adoucis : "motherfucker" est beaucoup trop mélodieux à côté d'un cinglant "enculé d'ta race" ! Sinon côté metal, je suis accro à Mr. Bungle et à Diapsiquir, pour leur folie créative, et côté voix j'aime beaucoup celle de Reuno de Lofofora, à la fois puissante, rageuse et, si je puis dire, sensuelle. Pour tout le groupe, nos influences communes vont de Slayer à Ennio Morricone, de Punish Yourself à Metallica.

Le livret dans son intégralité représente les différents membres du groupe comme des maniaques déments et sanguinaires. Qui a eu l’idée de cet artwork ? Et qui l’a donc réalisé ?
Seth : "Représente" ? Mais on EST des maniaques déments et sanguinaires bordel de merde ! (rires)
Hikiko Mori : Nous avons travaillé avec le photographe Alexandre do Rosario, venu galamment nous rendre visite dans notre hôpital semi-psychiatrique et qui nous a donc shootés en pleine opération gynécologiquo-chirurgicale. Seth a par la suite patiemment retravaillé les photos pour y apporter de la rouille, de la sueur, des flammes et quelques gouttes de semence vicieuse... voire une grosse giclée.

Le 1er Mai sonnera le départ de votre tournée en première partie de Six Feet Under. Comment votre nom s’est-il donc retrouvé à cette affiche ?
Seth : Le plus simplement du monde, un grand merci à notre manager et à M&O Office. Quand une occasion se présente à toi il faut savoir et surtout oser la saisir. Honnêtement, on ne s'attendait pas à embarquer pour une tournée Auropéenne si rapidement, s'attaquer au monstre Six Feet Under n'est pas une mince affaire, de plus le style musical n’est franchement pas similaire ! Mais bon, à l'échange de mail on a eu la bonne surprise de constater que l'ami Chris Barnes (leader de Six Feet) appréciait bien l'univers décalé de BAD TRIPES.

Et sinon, prêts à botter les fesses des Polonais ?
Hikiko Mori : Aha ! Que j'explique la petite anecdote : je cherchais sur le net des infos sur des dates de tournée qui nous manquait, tombe sur un petit sujet sur la tournée sur un forum metal polonais dans lequel ça cause brièvement de nous... et j'ai découvert via un site de traduction automatique qu'on nous qualifiait de "malentendu", de "putains" originaire d'un "pays de lesbiennes" ! Forcément, il y a deux filles dans le groupe, donc immédiatement, les neurones atrophiés de ce charmant garçon ont eu leur mot à dire... Depuis, nous songeons retrouver cet intrépide forumeur pour lui faire subir quelques petites choses à base de chaînes, d'eau, de fils électriques et de cockrings trop étroits.
Seth : Pologne, ton cul est à nous.

Que pourrait-on souhaiter à Bad Tripes ? Mis à part cette tournée, avez-vous d’autres projets en vue ?
Hikiko Mori : Nous sommes en pleine phase de composition et d'écriture intensives : nous ressentons le besoin permanent de nous renouveler, et sommes donc déjà en train de plancher sur le second album. Ca promet d'être encore plus rageur, expérimental et dansant. Vous pouvez aussi nous souhaiter de la créativité, du courage pour continuer le plus longtemps possible le triturage de tripes... et accessoirement d'être pétés de thunes pour pouvoir s'en foutre plein les narines, le foie et le cul.
Seth : Ce serait con de s'arrêter en si bon chemin. Au retour de la tournée Six Feet Under on envisage de tourner un ou deux clips vidéo du premier album, histoire de faire partager notre univers de manière plus percutante. A ce propos, on prépare un petit truc sympa qui devrait pas mal faire parler du groupe.. Surprise pour la rentrée... (rires)

Merci beaucoup pour cette interview ! Le mot de la fin ?
Hikiko Mori : Ravie d'avoir connu notre dépucelage interviewesque avec toi jeune fille. Merci à toi et à nos fans qui nous soutiennent avec plus de ferveur et de chaleur qu'une armée de pucelles Japonaises.
Seth: Lets' rock baby !


Le site officiel : www.myspace.com/badtripes0