La review

WHILE SHE SLEEPS + ROLO TOMASSI + LANDMVRKS
La Maroquinerie - Paris
11/01/18


Review rédigée par Matthieu


Alors que nous découvrons la montée interminable qui relie la ligne 2 à la Maroquinerie, je me prépare à la soirée qui réunit les coreux anglais de WHILE SHE SLEEPS (dont la montée en popularité fut assez fulgurante ces dernières années), le groupe de mathcore expérimental anglais ROLO TOMASSI ainsi que nos petits marseillais de LANDMVRKS. Une tournée orientée gros metalcore qui tache donc, et je me souviens que si mon premier contact avec la tête d’affiche avait été plutôt bon, le dernier m’avait laissé une mauvaise impression. A voir donc ce que nous réserve la prestation du soir !



Après une bonne heure d’attente dans le froid, je suis heureux de pouvoir enfin découvrir la salle, qui ressemble plus à une arène qu’autre chose. Et après une attente qui s’éternise un peu, un technicien s’acharne depuis la scène à tenter d’alerter la régie que le premier show va commencer. Lorsque ceux-ci réagissent enfin, ce sont donc les quatre Français qui s’installent devant une fosse bien remplie et aux couleurs de cheveux tout sauf naturelles. Niko active le sample du premier morceau, puis commence à marteler ses fûts sous les riffs de Sherman et Nico (guitares), alors que le son de basse domine le tout mais… malheureusement il n’y a aucun bassiste sur scène. Qu’importe, Flo (chant) commence à haranguer la foule et à hurler toute sa rage dans son micro. Le public est réactif, bien qu’assez statique, et les nombreux breaks aussi lourds les uns que les autres déclenchent quelques headbangs colorés. Avec un jeu de scène empruntant autant au hardcore qu’au rap ou au hip-hop français, Flo arpente la scène tout en hurlant de manière très propre et contrôlée, alors que ses camarades sautillent ou se démènent sur leurs instruments. Bien que composé de riffs assez basiques, le set plaît largement au public parisien, et le petit problème technique vers la fin ne fera aucunement de l’ombre à leur prestation. Malheureusement pour eux, la fosse attendra le dernier morceau afin de montrer correctement aux Marseillais comment on sait recevoir un groupe prometteur dans la capitale, même à quatre ! Une ouverture très énergique, et malheureusement pas applaudie comme il se doit.



Changement de plateau plutôt rapide, et ce sont les Anglais de ROLO TOMASSI qui envahissent la scène, prêts à nous envoyer un mélange de technique, de violence et de bizarrerie en pleine face. Si Tom Pitts massacre sa batterie à chaque instant avec un sens du rythme impressionnant, Chris Cayford (guitare) et Nathan Fairweather (basse) sont chacun dans leur monde, qui se rejoignent par moments en s’entrechoquant sous les claviers James Spence. Arrive alors Eva Spence (chant), toute petite, toute frêle et pourtant avec une voix si puissante. Ses hurlements furieux sont de temps à autre rejoints par ceux de James, qui vient parfois sur le devant de la scène plutôt que de se cacher derrière ses synthétiseurs, mais le public semble partagé. Si certains essayent de suivre la rythmique chaotique en bougeant la tête dans tous les sens, d’autres affichent une mine déconfite qui signifie “C’est quoi ce truc ?”. Dans tous les cas, ROLO TOMASSI marque. Et les périodes qui mêlent les rythmiques jazz / prog / mathcore / ”appelez ça comme vous voulez” aux hurlements succèdent aux passages calmes où Eva danse avant de nous offrir une sublime voix claire, mais les claviers reviennent absorber le tout et un blast furieux chasse le tout alors que Nathan tente d’utiliser absolument toutes les frettes de son instrument. Les harmoniques à moitié barées du combo poussent certains spectateurs à aller se réfugier au bar, mais leur génie créatif en séduit la majorité, qui sont autant captivés par la musique que par la prestation scénique des cinq Anglais. Le dernier morceau est annoncé, et il sera exactement dans la même veine que précédemment. La folie prend alors fin sous des applaudissements mérités. Il fallait oser, et c’était sacrément bien foutu !



La fosse se remplit à nouveau, on peine à respirer et à bouger, pas de doute, c’est bien au tour de WHILE SHE SLEEPS de prendre possession de leur terrain de jeu. Alors que Sean Long et Mat Welsh (guitares) se placent chacun d’un côté de la scène, Aran McKenzie (basse) fait déjà les cent pas vers le centre et Adam “Sav” Savage se déchaîne sur ses fûts. La rythmique lourde emplit alors l’espace, mais il manque quelqu’un… Lawrence “Loz” Taylor déboule d’un coup, puis commence à hurler. Rapidement, son charisme naturel combiné aux riffs efficaces et puissants du groupe font effet, et la foule remue comme jamais.
Loz se livrera assez rapidement à son jeu favori sur scène, qui consiste à se jeter dans la foule tout en chantant, et c’est au total une petite dizaine de fois qu’il se retrouvera soutenu par ses fans. Le groupe, qui alterne entre titres connus et réclamés de tous ("Death Toll" pour ne citer que lui) et nouvelles compositions fraîchement sorties de leur dernier album, tient le public au creux de sa main, et ils n’hésiteront pas à demander walls of deaths, circle pits et autre mouvements hasardeux à grand coups de "Move, Paris !", et la foule se retrouve instantanément brassée en long, en large et en travers. Le charisme du chanteur a visiblement attiré les groupies au premier rang, qui n’ont d’ailleurs d’yeux que pour lui et ses tatouages lorsqu’il retire sa chemise, mais également quelques coreux qui ne sont là que pour (pardonnez-moi l’expression) péter des gueules ou au moins des culs. Et ça se voit à l’expression qu’ils affichent en moshant comme des abrutis à la moindre note, sans prêter attention à qui va se recevoir leur coude dans le nez. En parlant de nez, j’en ai vu un en sang, entre deux smartphones, donc si vous avez raté ce concert, vous devriez pouvoir vous le reconstituer grâce à YouTube. Lorsque Loz tend son poing au dessus de la fosse, une bonne dizaine de poings se retrouvent alors inexorablement attirés par le sien. Côté lumières, les flashs lumineux n’ont visiblement pas provoqué de crise d’épilepsie, à ma grande surprise, et côté son, j’entends très distinctement chaque instrument. Le groupe demande à la foule de se mettre “en mode festival en prenant des gens sur leurs épaules et en allumant leurs briquets” pour "Four Walls", mais le “ciel du festival” sera bientôt remplacé par un combat sans merci qui regorge de slammeurs, qui passent visiblement un peu trop de temps sur scène au goût du technicien qui n’en peut plus d’expliquer aux gens que leur place est dans la fosse et non pas aux côtés des musiciens. Lorsque Loz annonce le dernier morceau, la déception est grande, mais les mosheurs saisissent cette occasion pour y aller encore plus violemment. Le groupe quitte alors la scène sans réel au revoir, mais avec une promesse de revenir. Aran fait voler quelques setlists, mais le groupe ne reviendra pas.

Musicalement, j’ai fait une bonne découverte et je me suis réconcilié avec WHILE SHE SLEEPS. Visuellement, c’était beau, mais vraiment pas pratique (merci au spot juste en face de moi et à la foule la plus compacte au monde). Humainement, si les musiciens font leur boulot, ils ne sont malgré tout pas très proches de leur public, mais la plupart ne le méritaient pas réellement. J’ai dit il y a quelques jours que le public d’electro / goth était le pire au monde ? Eh bien j’avais oublié les coreux. Mais si, vous savez bien, ceux qui vous regardent bizarrement parce que vous n’avez pas un t-shirt du groupe de metalcore le plus connu du moment, ou qui ne peut s’empêcher de gigoter pour un rien parce que “ça va être la guerre lol” puis qui remontent du pit quelques secondes après parce qu’ils s’en sont pris une, accompagné des groupiasses qui se plaignent que ça bouge et qu’elles ne peuvent pas avoir la sueur de leur membre favori sur le visage après le concert. Lâchez dans le tas une dizaine de décérébrés pseudo-karatékas qui n’essayent même pas de suivre le rythme, et vous voyez parfaitement de qui je parle.