MONOLITHE + ABYSSIC + LUX INCERTA
Le Backstage By The Mill - Paris
12/04/2019
Review rédigée par Matthieu
C’est après avoir réalisé une interview délirante avec Abbath que je me rue au Backstage,
dont les portes sont déjà ouvertes. Pourtant, la fosse est vide, et le show prend du retard. Le
temps d’observer qu’il y a énormément d’enfants dans la salle, accompagnés de leurs
parents, pour la venue de MONOLITHE, ABYSSIC et LUX INCERTA.
Les lumières faiblissent, puis deviennent aveuglantes lorsqu’Arkham et Nasrollah
"Bersërker" Hitmi (guitares) entament le riff du premier morceau. Un riff lourd, menaçant,
martial mais également mélancolique. Derrière les fûts, Pheel Ti (batterie) rythme cet
ensemble, aidé du son grave de David Blusseau (basse). Et c’est uniquement
lorsqu’Agone (chant) paraît, et que sa voix enchante littéralement le Backstage que le
concert ne prend toute son ampleur. Le son est propre, les larsens maîtrisés, et le chanteur
alterne parfois son sublime chant clair pour des hurlements prenants qui collent à merveille
au son du groupe. "Merci les amis... on est Lux Incerta et vous allez nous accompagner sur
"Winternity"..." annonce le frontman avant que la deuxième composition ne débute. Et à
nouveau, c’est la claque : le son est nous emporte littéralement, et si les lumières sont
difficiles pour les photographes, elles collent parfaitement à cette atmosphère oppressante
que les Franciliens instaurent à chaque note. Totalement impliqués dans leur performance,
les musiciens headbanguent en jouant, et Agone n’hésite pas à se mettre à genoux sous les
flashs de la salle pour chanter. Les harmoniques des guitares se mêlent à la basse pour le
troisième titre, et quelques choeurs viennent compléter le mélange. "On va vous jouer une
chanson qui n'est pas de notre répertoire" déclare le chanteur. "Elle est du groupe
Cathedral pour ceux qui connaissent... elle s'appelle "Serpent Eve" !". Et la formation
française a parfaitement rendu hommage aux légendes du doom avec cette reprise,
maîtrisant à la perfection les riffs lourds et le chant si particulier d’un Lee Dorian au sommet
de sa forme. "On passerait bien plus de temps avec vous mais on a un timing... alors voici
"The Dirge" !" lâche Agone avant que leur dernière composition ne nous frappe de plein fouet,
provoquant les acclamations du public, qui n’a pas perdu une miette du spectacle.
Setlist : "Shelter", "Winternity", "Profundis", "Serpent Eve" (Cathedral cover), "The Dirge".
L’ambiance change lorsque les membres d’ABYSSIC installent encens, bougies et
chandeliers sur la scène. Memnoch (chant / contrebasse) installe son imposant instrument
au milieu de la scène, et c’est encapuchonné qu’il reviendra s’en saisir. A ses côtés, Elvorn
(guitare) et Makhashanah (basse) jouent une rythmique lente, pesante et sombre, aidés par
les frappes de Tjoldav (batterie) et quelques samples, au vu de l’absence du claviériste. Et
à leur tour, le groupe nous emporte littéralement dans leur univers grâce à un son imposant,
au chant hurlé qui laisse place à la contrebasse, et aux musiciens charismatiques. Je
remarque surtout le jeu au doigt précis de la bassiste, maquillée comme pour affirmer les
accents black metal de la formation, mais ses camarades ne sont pas en reste, et ils
donnent littéralement vie au doom / death massif des Norvégiens. "Salute, cheers !" lâche
finalement le frontman en buvant dans son verre de vin, avant de reprendre sur le morceau
suivant. La noirceur des riffs du groupe prend de plus en plus d’ampleur, aidé du décors de
scène qui transforme le show en véritable messe noire, à laquelle nous assistons sans
bouger. Les lumières rouges accentuent cet effet, et bien qu’elles rendent le spectacle un
peu flou, elles participent à ce sentiment d’oppression véritable qui sévit. "Salut my friends,
je parle français !" déclare le chanteur. "I’m sorry my french is very bad, but we love french
wine !". Et c’est le troisième morceau qui part après qu’un spectateur ait tenté de faire un trait
d’humour. Le morceau est tout aussi lourd, puissant et prenant que les précédents, et rien
ne semble pouvoir arrêter le groupe lorsqu’ils jouent. Soudain, les musiciens s’arrêtent et le
batteur joue seul sur un sample avant que les autres instruments ne redonnent de la voix.
"Last song for us this evening, this is a song from our last album", annonce gravement
Memnoch. "This song is called "Transition Consent"". Et c’est à nouveau la lourdeur qui
s’abat sur nous alors que les membres se donnent pleinement pour nous faire vivre ce
moment très théâtral. C’est donc sous des applaudissements mérités qu’ils quittent la scène.
Setlist : "Adornation", "Sombre Dreams", "Funeral Elegy", "Transition Consent".
Et à nouveau la scène est réaménagée pour MONOLITHE. Nettement plus nombreux, les
Français s’avancent sous les applaudissements. Au centre, Rémi Brochard (guitare / chant)
s’avance en jouant et en headbanguant, alors que Benoît Blin, Sylvain Bégot (guitares) et
Olivier Defives (basse) alignent silencieusement leurs parties. Eclairé par un projecteur,
Thibault Faucher (batterie) semble possédé lorsqu’il frappe, alors que Matthieu Marchand
(claviers) sera invisible tout au long de la soirée. Les harmoniques à trois guitares sont
saisissantes, et le son part dans tous les sens tout en étant parfaitement contrôlé. Les
membres ont peu de place pour bouger, mais ils s’en accommodent. "Bonsoir Paris, nous
sommes Monolithe !" lâche le chanteur avant que le son ne reparte. Si les membres sont
concentrés et silencieux, leur musique est tout aussi grave et puissante : le doom / death
mélodique des Français captive son auditoire, et le public est respectueux de cette ambiance
si particulière. Bien qu’étranges et menées par le projecteur, les lumières collent à cet
univers dans lequel les Français nous font voyager en leur compagnie. Sortant quelque peu
de cette froideur assumée, les musiciens haranguent la fosse, malheureusement un peu
vide, qui répond présent. Le bassiste se place souvent en retrait, et le front est occupé par
les trois guitaristes, ce qui rend très bien visuellement. Le clavier permet d’adoucir la
puissance brute de la musique, mais les headbangs sont de mise. "Ce sera notre dernière
pour ce soir" lance Rémi. "Elle est archi connue, ça s’appelle "Monolithe I" !". Et c’est
évidemment cet hymne que ceux qui connaissent le groupe depuis quelque temps ont déjà
dévoré des dizaines de fois qui emplit le Backstage, avant que les musiciens ne partent de
scène.
Mais ils reviennent rapidement ! "Vous en voulez encore ? Vous êtes pas sympas, je suis
malade…" plaisante le frontman. "On va vous en jouer encore une autre, elle s’appelle
"Ecumanopolis" !". Et c’est une version quelque peu raccourcie de ce sublime morceau qui
nous est offerte en supplément par les Ffrançais, qui sont heureux de jouer chez eux.
Setlist : "Anechoic Aberration", "Delta Scuti", "Coil Shaped Volutions", "Everlasting Sentry",
"Burst In The Event Horizon", "Engineering The Rip", "Monolithe I".
Rappel : "Ecumenopolis".
Le public se disperse, et les musiciens sont presque tous au stand de merchandising. Pour
ma part, je ne m’éterniserai pas, les transports parisiens sont traîtres. Mais revenons sur la
soirée : après l’excellente découverte de LUX INCERTA, le parfait rituel d’ABYSSIC et la
déferlante de MONOLITHE, j’ai mis du temps à redescendre. Les trois formations ont toutes
délivré un show exceptionnel ce soir là, et j’ai eu la confirmation que le doom, peu importe
ses influences, est bel et bien vivant, même si le public n’est pas nombreux.