La review

KADAVAR + MANTAR + DEATH ALLEY
Le Trabendo - Paris
18/10/17


Review rédigée par Candice


Après l’excellent concert de Mars Red Sky et Powder For Pigeons la veille à La Boule Noire, je continue mon voyage dans les années 70 en Allemagne cette fois avec les génies excentriques de KADAVAR, accompagnés de l’OVNI MANTAR et de DEATH ALLEY et leur heavy rock tapageur. Un beau plateau, qui nous promet d’avance de très belles choses.



C’est donc DEATH ALLEY qui se charge d’ouvrir la soirée, et bien que j’ai vu leur nom à plusieurs reprises sur des affiches ou dans les magazines, je n’avais encore jamais eu l’occasion de les voir en concert. Honte à moi, car ce qu’ils font est absolument dingue. "Black Magic Boogieland" de leur premier et unique album du même nom, est une véritable explosion de vieux rock un peu psyché à l’énergie heavy, où vient se superposer la voix de l’excellent Douwe Truijens, qui se révèle dès les premières secondes être un frontman hors pair. Tel un Mick Jagger revisité, il sautille et danse sans arrêt, sa présence est telle que tous les regards sont instinctivement tournés vers lui. Les compositions de DEATH ALLEY ne renversent certes pas les codes, mais elles sont d’une telle efficacité que nous ne ressentons pas le syndrome du réchauffé et de la lassitude. Il n’a donc pas fallu longtemps au groupe pour mettre tout le monde dans sa poche, moi y compris. Chaque morceau est encore plus entraînant et plaisant que le précédent, comme c’est le cas pour "Murder Your Dreams" à la rythmique soutenue, d’une lourdeur et d’une gravité s’apparentant davantage au punk / heavy metal qu’au rock traditionnel auquel DEATH ALLEY nous avait habitués jusque là. Ce morceau-là sera lui-même dépassé par le très psyché et exotique "Feeding The Lions", qui constitue un nouveau tournant dans la performance déjà excellente du groupe. On oscille entre du Led Zeppelin, Black Sabbath et Blue Öyster Cult, le résultat fait mouche. Nous terminons le set avec un petit retour aux racines rock brut de décoffrage que nous devons à "Supernatural Predator", morceau qui fonce dans le tas sans plus de cérémonie et qui de manière assez surprenante finit par se muer en morceau de plus de dix minutes, où une merveilleuse instrumentale prédomine. Un magnifique cadeau d’au revoir de la part de DEATH ALLEY, qui a su gagner le cœur de nous tous ici ce soir. Une vraie claque comme on en a plus !



Vient maintenant le tour de MANTAR, dont la raison de leur présence ce soir reste inexpliquée pour beaucoup d’entre nous. Non que je sois pour une parfaite cohérence des différents groupes d’une même affiche, je dois tout de même avouer que voir ce nom-là m’a bien surprise. En effet, le cocktail doom / punk teinté d’une touche de black metal sera peut-être un peu explosif aux oreilles d’une partie du public présent ce soir, mais pourquoi pas ? Sur la scène, désormais scindée en deux – côté guitare / chant à gauche, faisant face au côté batterie à droite -, règne une atmosphère radicalement différente, sombre et presque sinistre. Des chandeliers ont été allumés pour l’occasion et constituent le point du lumière le plus vif du plateau, c’est pour dire. Les spots aux couleurs uniformes se font discrets, plongeant ainsi la scène dans un brouillard sombre. C’est ainsi que les deux membres de MANTAR prennent chacun leur place respective et entament "Cult Witness", morceau doté d’un certain groove où l’on ne ressent pas le moins du monde l’absence de la basse ou encore d’une seconde guitare, le duo se suffit à lui-même. Hanno, on s’en rend compte bien vite, est un élément capital dans la personnalité et l’image du groupe. Ce personnage à la voix torturée et à la silhouette squelettique et longiligne telle une araignée joue de son apparence pour nous faire entrer dans son univers qui paraît tordu à souhait, un peu à la Devin Townsend. S’ensuit "Spit", tout aussi indéfinissable musicalement, mais où le groove et le sens du rythme là aussi font mouche. Si je devais absolument mettre des mots, je dirais que nous sommes quelque part entre le sludge et le doom avec une dose de violence en plus, en partie caractérisée par la voix de Hanno, même si hélas elle n’est pas très audible. Finalement le public semble plutôt réceptif à la performance de MANTAR, qui conforte les fans de la première heure dans leur opinion et convainc les non-connaisseurs grâce à leurs compositions originales et bien construites. En parlant de cela, c’est "Cross The Cross" qui, pour moi, remporte les suffrages. Le jeu de batterie couplé aux riffs simples et dynamiques donne quelque chose d’une efficacité sans pareil et constitue le tournant de leur set. Set qui d’ailleurs touche bientôt à sa fin, nous n’avons pas vu le temps passer. MANTAR est un groupe à voir sur scène, pour l’expérience et le plaisir auditif !



Que de belles choses ce soir, qui nous ont chacune à leur manière amenés vers les rois de la soirée, KADAVAR. Malgré la taille non négligeable de la scène, la batterie est installée en son centre, instaurant une certaine intimité entre le groupe et le public, comme on pourrait avoir dans les petits clubs locaux. C’est donc avec une vue imprenable que nous suivons des yeux le fou et charismatique Christoph "Tiger" Bartelt rejoindre ses fûts, c’est à se demander comment cet homme de pas loin de deux mètres de haut parvient à s’y installer convenablement ! Immergé dans son propre univers, il nous adresse des grimaces et de grands sourires pendant que ses acolytes viennent se poster de part et d’autre de lui, et jouent les premières notes de "Rough Times", de leur dernier album du même nom.
KADAVAR fait du KADAVAR, c’est-à-dire du rock rétro aux accents heavy / psyché du bon vieux temps. J’accroche cependant davantage au titre qui le suit, "Skeleton Blues", qui caractérise mieux l’univers développé par le groupe. Je suis agréablement surprise par la voix de Christoph "Lupus" Lindemann, qui est encore plus nasillarde et hypnotique en live que sur CD. J’apprécie également la diversité des morceaux interprétés ce soir, qui vont du premier album comme l’excellent "Living In Your Head" au caractère progressif ou encore le légendaire "Black Sun" au riff de basse reconnaissable entre mille, à des morceaux comme "Broken Wings" à l’influence Black Sabbath des débuts. Lui-même est suivi par "The Old Man" qui remporta un gros succès à la sortie de "Berlin" en 2015. KADAVAR a un éventail impressionnant de compositions old school à s’y méprendre mais au caractère tout de même fort et original, on ne s’ennuie pas un seul instant. Le groupe dans son entier a un pouvoir d’attraction presque magnétique, il faut le voir pour le croire. Et comme un bon morceau arrive rarement seul, celui-ci enchaîne avec "Die Baby Die" qui provoque une véritable vague d’exaltation. Ce n’est personnellement pas mon titre favori, mais je reconnais qu’il fait son petit effet. Il en va de même pour "All Our Thoughts" à la rythmique d’enfer, et que j’aime de plus en plus à chaque nouvelle écoute. En fermant les yeux, il n’est pas difficile de croire que l’on pourrait en fait se trouver en plein Woodstock, à attendre le passage de Led Zeppelin ou des Doors.
Un sans faute donc qui va se poursuivre jusqu’à la fin du concert, où la reprise de "New Rose" de The Damned va déclencher un mouvement de foule, qui jusque-là ne s’était pas montrée autant déchaînée. L’ultime morceau de ce soir "Come Back Life" est tout aussi bien accueilli, et nous transmet un sentiment de liberté et d’évasion musicale terriblement puissant. Les sympathiques membres de KADAVAR reçoivent des applaudissements à la hauteur de leur performance, qui a été sensationnelle. C’est sans aucun doute pour moi un des jeunes groupes les plus prometteurs dans le genre, qui parvient sans mal à faire revivre l’euphorie du rock du siècle précédent.