La review

HYPNO5E + MEMORIES OF A DEAD MAN + CROSSING THE RUBICON
Le Glazart - Paris
14/03/2012


Review rédigée par Braindead


Dans la catégorie OMNI (Object Musical Non Identifié) cette soirée triplette promet beaucoup. Pour faire court, en voyant la prog4 je m’attendais à un savant mélange de stoner screamo post hardcore ambiant metal experimental sludge…ouf. C’est en définitive avec une curiosité sincère que je rejoins le Glazart dont la salle restera clairsemée malgré la qualité évidente de l’affiche.



Les Parisiens de CROSSING THE RUBICON ouvrent les hostilités avec leur punk-hardcore vintage, à tendance screamo stoner qui me fait de suite penser à Omaha Bitch, groupe de rock’n’shockcore ayant eu son heure de gloire avec un clip misogyne soit disant drôle. Fort de deux albums plutôt très bien accueillis par les webzines, le combo distille ses compos aux titres évocateurs "Porn Unicorn", "Ayatollah Ayatollah" ou le bien nommé "Vagineras", balançant à tout va riffs et vocalises, à la limite de l’audible. Car à vouloir recréer un joyeux bordel, on finit par se perdre dans une mélasse sonore qui explose plus nos tympans, qu’elle ne les transcende ; le groupe reste étrangement statique ce qui rajoute à la contradiction d’un genre qui est censé exploser en live. Bien sûr, Alexandru et les siens sont très sympathiques ; le frontman balance vannes, blagues et anecdotes, mais la sauce ne prend pas et l’assistance endormie, le restera pendant la totalité du set. Il est très rare en ce qui me concerne, de rester totalement hermétique à un groupe, mais CROSSING THE RUBICON fait exception, et afin de leur rendre justice, je ne manquerai pas de me procurer leur dernier album pour les redécouvrir me faire une opinion plus construite.



Quinze minutes de sound check et MEMORIES OF A DEADMAN, projet d’ambiant metal à la limite de l’expérimental, nous emmène dans son univers peuplé d’histoires étranges, initiatrices Sépia Noir et Blanc que n’aurait pas renié un Jim Jarmush. Alternant phrasés aériens, émotionnellement palpables et déflagration massives qui foutent la chair de poule, MOADM produit des compos torturées où une basse lourde vient parfaire des riffs acérés et quasi hypnotiques. Toute l’essence d’un metal progressif minutieusement construit, assurément décomplexé, totalement assumé. On pense à Neurosis, à Envy, pour ne citer qu’eux… En résulte un set dont le climax taillé au scalpel, n’est pas sans rappeler l’effet viscéral ressenti durant la vision de certains films d’auteurs, scénarisé à coups de grattes, d’une lourdeur sonique à la densité atmosphérique compacte, hésitant entre lyrisme apocalyptique et mysticisme chamanique, mais tendant au cultissime. Une révélation ? Peut-être… une confirmation ? Sûrement… Vingt minutes de pause méritée, le temps de méditer sur ma première rencontre avec l’homme mort, que déjà l’intro de la tête d’affiche résonne…



Les Montpelliérains d’HYPNO5E prennent possession des lieux, et le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils étaient attendus. L’assistance, plus compacte et surtout plus motivée, s’amoncelle devant la scène, prête à se prendre en pleine face, l’univers d’un combo dont la galaxie musicale n’a pas encore été déterminée. Exit toute référence, codification et autre vain étiquetage marketing, HYPNO5E mute sans cesse, pour notre plus grand plaisir. La base metal est toute juste perceptible, entrecoupée de passages aussi planants qu’évanescents, où l’acoustique mélancolique de certaines compos déstructurées côtoient parfois même quelques résonnances technoïdes ou death, donnant une vraie dimension scénaristique ; des samples autrefois réservés au drum’n’bass et trip hop sont intelligemment distillés, et viennent renforcer la voix torturée d’Emmanuel, frontman tout en charisme et maîtrise. Gredin, bassiste aux pieds nus, vient également poser sa voix de temps à autre en support d’Ema, tandis que Thibault joue aux montagnes russes rythmiques, avec ses fûts. Jérémie et ses riffs quasi architecturaux, achève de créer cet univers en 3 dimensions qu’est HYPNO5E.
Une expérience live, à mi chemin entre le céleste et la fonte, des créations volontairement déstructurées pour mieux les incarner, HYPNO5E laisse un public conquis par cette invitation au voyage multi sensorielle. Seul bémol dommageable, l’absence de projection d’images dont le groupe est pourtant friand ; rendez-vous est donc pris lors de leur prochaine venue.