La review

HAUNTING THE CHAPEL
Asphyx + Benighted + Absurdity + Retrace My Fragments
Les Trinitaires - Metz (57)
30/01/2015


Review rédigée par Man Of Shadows


Ce soir à Metz se tient la troisième édition du festival Haunting The Chapel, manifestation hivernal se tenant comme son nom l'indique dans la chapelle des Trinitaires, un ancien couvent de nonnes reconverti en salle de spectacles (plus rentable sans doute...), haut lieu culturel messin situé au cœur de la ville. Cette première soirée, comme la précédente, est axée death et metal extrême, tandis que le second soir est plutôt orienté metalcore et metal moderne. Après Belphegor et No Return en 2014, les têtes d'affiches de cette première nuit sont les terribles BENIGHTED et les cultes ASPHYX. D'abord inquiets vis-à-vis de la météo (de grandes chutes de neige ont eu lieu dans le Nord et l'Est de la France, ce qui a, comme l'a dit Julien Truchan de BENIGHTED, retardé la venue de son groupe sur les lieux), c'est sans difficulté que nous rallions le superbe complexe des Trinitaires.



Ce sont les Luxembourgeois de RETRACE MY FRAGMENTS qui ouvrent la messe. Avec seulement 30 petites minutes de jeu, le groupe joue quasiment sans temps mort et enquille assez vite les morceaux. Auteur de deux démos et d'un premier album, c'est ce dernier qu'ils défendent ardemment. Musicalement, la bande à le cul entre trois chaises, leur style est un hybride de death mélodique, de metalcore et de deathcore, avec des incursions jazz. Un peu déroutant de prime abord, car le mélange des styles ne se fait pas de façon naturelle, on se laisse prendre au jeu. D'un niveau technique très impressionnant, les musiciens enchainent riffs death / thrash, passages bien lourds hérités du metalcore, furies deathcore. Les guitaristes et le bassiste (se fendant même d'une intervention en solo lors d'un morceau) développent une technicité forte, et les solos sont précis et mélodiques. De nombreux changements de rythme surviennent (mentionnons la très grande maîtrise du batteur, excellent) au cours de compositions complexes et quelque peu fourre-tout auxquelles il est difficile d'accrocher du début à la fin. il faut dire que style du groupe est éminemment complexe et particulier: Une entame death / thrash mélodique se mue vite en tabassage deathcore. Vient un intermède jazzy d'environ 30-40 secondes auquel un breakdown heavy succèdent. Et tout cela en un seul titre. On ne sais vraiment où veut en venir le groupe et le public, encore peu fourni, suit le concert passivement, accueillant poliment la prestation. Intéressant musicalement avec son death moderne, le groupe proposera donc un set maîtrisé, mais un peu mollasson, les membres du groupe restant statiques et le chanteur, au growl très profond et menaçant mais se révélant être une calamité dans les autres registres (chant clair, chant core, voix criarde - même Dani Filth est supportable comparé à ça), est dans son monde.



Les Strasbourgeois d'ABSURDITY prennent la relève et la soirée commence réellement. Le public est bien plus nombreux, resserré et réceptif au deathcore brutal des Alsaciens, donne de la voix et pogote à tout va, le style pratiqué par ABSURDITY étant plus à même de plaire à la frange la plus jeune du public métallique présent ce soir. La prestation est énorme, tout comme le son, ultra-puissant et gavé de basses. Les gratteux headbanguent, sautillent, bougent, haranguent le public, bref, font le show. Le chanteur, petit mais taillé, chauffe énergiquement la foule et se donne à fond, son regard de taré et sa mimique et gestuelle de psychopathe sous stéroïde rend sa prestation crédible avec le propos musical. Mais le moment fort du set, moment que tous les connaisseurs d'ABSURDITY et les fans de Julien Truchan se tâtaient de voir, est le featuring, en début de set, de ces deux-là sur le morceau "Rebellion" (Julien apparaît déjà en guest sur ce titre figurant sur le dernier album d'ABSURDITY, "Undestructible"). Un moment intense et brutal à souhait au cours duquel la voix de Truch ressort bien mieux des enceintes, au détriment de celle de Zno. Assurément le meilleur moment de ce concert sympathique mais relativement court (30 min), qui, même si cela n'est habituellement pas notre came, s'avère être très bon, percutant et professionnel.



Le premier gros morceau de la soirée arrive en la personne de BENIGHTED. Le public est chaud bouillant quand déboule les Stéphanois au son de "X2Y", enchainé à "Noise", morceaux d'ouverture de "Carnivore Sublime", son dernier rejeton. Le pit se transforme en champs de bataille et votre serviteur, alors au deuxième rang, est vite relégué au milieu de la salle. Les mots "Let The Blood Spill Between My Broken Teeth", désormais un grand classique, sont repris à gorge déployées par l'ensemble des fans et c'est l'apocalypse dans la fosse. Le son est monstrueux et les musiciens et le public sont à fond !
En plus d'être un chanteur exceptionnel de puissance et de maîtrise, à la palette vocale impressionnante, passant aisément du growl au chant criard, du grunt au pig squeal (ses prestations énormes nous conduisent à le classer au rang de meilleur vocaliste extrême français, et l'un des meilleurs tout court, tant la concurrence semble bien loin derrière lui), Julien Truchan arpentant frénétiquement et pieds nus la scène exigüe de la chapelle, est un frontman hors-pair, super affable et d'une grande gentillesse. Le public est tout acquis à sa cause. Olivier Gabriel est visiblement heureux d'être là, ne tenant lui non plus pas en place, émettant de larges sourires, bougeant dans tous les sens (son jeu de guitare s'en ressent parfois, certaines rythmiques sont approximatives et le solo de "Let The Blood" est partiellement foiré au passage mais c'est du live bordel ! Une énergie pareille fait vraiment plaisir à voir). "Collapse", tiré du référentiel "Identisick", est un vrai carnage, un titre death / grind à la puissance de malade. Le pit ne ressemble plus à rien désormais, entre pogos, stage-diving et slammeurs, surtout des gamins (on peut encore être gamins à 20 piges...) inexpérimentés, qui font n'importe quoi et agissent comme s'il s'agissait d'un règlement de compte à la récré, cofondant imbécilement pogos et moshpits, ne ramassant pas les pogoteurs tombés ou ne rattrapant pas les stage-diveurs. A la fin de "Collapse", Truch invitera le public à se montrer plus solidaire pour vivre un bon moment ensemble en rattrapant les copains. Bel esprit.
"Experience Your Flesh", morceau bien connu aidé en cela par son clip-vidéo, est un énorme succès, la foule reprenant en masse les nombreux passages où le titre est scandé. Premier show de BENIGHTED avec les nouvelles recrues Emmanuel Dalle et Pierre Arnoux auquel nous assistons, nous constatons qu'ils sont parfaitement au point techniquement et scéniquement : Pierre, regard de fou furieux, remuant comme un damné, assurant les backing vocaux autrefois tenus par Adrien Guérin, et Emmanuel, plus discret, caché derrière sa longue chevelure blonde, concentré mais bien dans le show malgré tout. "Grind Wit" (fabuleux) et "Prey", deux nouvelles odes à la nature et aux petits oiseaux, sont dégainés de mains de maitre. Lors de l'introduction samplée de "Fritzl", Julien fait signe au public de se diviser en deux, créant ainsi le premier wall of death de la soirée. Petit succès, mais fun malgré tout. Deux nouveaux extraits de "Carnivore Sublime" sont interprétés, "Slaughter / Suicide" et "Collection Of Dead Portraits", deux nouvelles armes de destruction massive où la mitrailleuse Kevin Foley fait d'innombrables dégâts dans les rangs ennemis. Ce type, plutôt réservé, est une véritable machine, hyper précis, rapide et carré, ne cessant même de s'améliorer d'année en année. De nouvelle tranches de lards sont grossièrement découpées par les bouchers fous avec des "Foetus" et "Slut" phénoménaux, intenses et destructeur. Le groupe ne faiblit aucunement malgré les minutes qui s'écoulent.
Le groupe nous quitte au son du traditionnel "Asylum Cave", joué en guise de rappel mais "paradoxalement idéal pour se réveiller le matin" dixit Julien, dernier signal sonore avant l'abattoir final. Les Messins demanderont le groupe avec une telle ferveur à l'issue du show que BENIGHTED, sincèrement touché par l'accueil de ses supporters lorrains, jouera un dernier morceau initialement non prévu sur la setlist et dont le titre, growlé par Julien, nous échappe. Ne parvenant pas à le reconnaître à l'oreille, nous nous dévissons une dernière fois le cou (en guise de punition pour ne pas avoir fait son boulot journalistique correctement), au son de ce dernier morceau, véritable boucherie auditive hyper violente au-delà de toute mesure (après avoir gamberger un peu, nous avons finalement retrouvé le titre du morceau malgré l'alcool et le headbanging, c'est le dénommé "Jekyll", quel filou celui-là !). Une heure de show aussi jouissive que mortelle.

Setlist : "X2Y", "Noise", "Let The Blood Spill Between My Broken Teeth", "Collapse", "Experience Your Flesh", "Prey", "Grind Wit", "Fritzl", "Slaughter / Suicide", "Collection Of Dead Portraits", "Foetus", "Slut".
Rappel : "Asylum Cave", "Jekyll".



Après un long soundcheck, la machine de guerre death / doom old school batave est prête à faire des ravages. C'est sur "Vermin", entame classique des concerts du groupe, que débute les hostilités à la manière d'un uppercut dans les dents, très vite suivis du plus vicieux "Food For The Ignorant". Le son est fort et puissant, gavé de basses et quelque peu dégueulasse, ce qui est correspond exactement à la musique d'ASPHYX.
Martin Van Drunen est particulièrement en voix ce soir, son chant écorché unique est tout simplement jouissif. Chacune de ses éructations est un orgasme auditif. Le géant blond, entre deux morceux, et pas éssouflé pour un sou, échange régulièrement avec le public majoritairement en anglais et s'essayant de temps en temps au français avec mérite. Il en profite d'ailleurs pour dire à quel il est heureux d'être là, faisant remarquer qu'il n'y a pas de meilleur endroit pour du death dans une chapelle, et pour remercier l'orga et le très bon accueil de ses derniers et des fans présents ce soir, qui leurs rendent bien. De bonne humeur, il plaisante et fait réagir l'assistance avec l'expérience qui est la sienne. Le géant Alwin Zuur, bassiste de son état, joue son rôle rythmique à la perfection, arpentant la scène avec son collègue Paul Baayens, qui tord sauvagement le cou à grands renforts d'headbanging. Véritablement hors contrôle, le Néerlendais n'en loupe pas pour autant un seul accord (ou, si oui, ça n'est pas vraiment grave au vu du style d'ASPHYX et de son état d'esprit).
Première fois que nous voyons ASPHYX en live depuis que le batteur et membre fondateur Bob "Barthez" Bagchus a quitté sa formation pour passer plus de temps auprès de sa famille (et pour reformer un de ses anciens groupes, Soulburn, qui n'est autre qu'une version alternative d'ASPHYX et qui a publié un album en Novembre dernier. Logique non ?). Cela fait un peu drôle de ne plus voir le groupe sans son leader (plus aucun membre d'origine n'est là, du coup) et sa frappe lourde et minimaliste manque. Son remplaçant, Stefan Hüsken, a un jeu plus technique et libre que son prédécesseur, cette tendance sert très bien les passages les plus rapides des compos. En revanche, le gaillard se plante à de nombreuses reprises lors des parties les plus lentes, perdant le rythme à trop vouloir en faire. Une fois ça passe, mais à 5 ou 6 reprises, sur des morceaux aussi bateau, c'est tout de même honteux (c'est pas comme si ça faisait près d'un an qu'il était dans le groupe...). Les assaults successifs du panzer que sont "Death... The Brutal Way", massif, et "Deathhammer" ne font aucun quartier, puis le plus nuancé "Bismarck" nous ratatine la cervelle. Puis le monstrueux "Eisenbahnmörser" écrabouille les quelques carcasses de métalleux encore debout. "Minefield", terrifiant et long titre mid-tempo, nous écrase par sa lourdeur et ses leads de guitare désespérées, même topo pour l'excellent "Forgotten War". Les courts et agressifs "Into The Timewastes" et "Wasteland Of terror" détruisent tout (surtout les nuques) sur leur passage. Classique ultime, "The Rack" et son ambiance mortuaire met tout le monde à genoux.
La fin du concert approche, et les rappels constitués de "Scorbutics" et son rythme chaloupé, sur lequel Martin fait gueuler des fans du premier rang sur le refrain, et de "Last One On Earth", où Martin, se déchire les cordes vocales de sa voix de cougar. Le public ovationne le combo comme il se doit. Un show énorme et long de près 75 minutes de true death metal, brut, honnête avec une ambiance du tonnerre. Une excellente soirée en définitive.

Setlist (ordre non définitif) : "The Quest Of Absurdity" (Intro) "Vermin" "Food For The Ignorants" "Death... The Brutal Way" "Deathhammer" "M.S. Bismarck" "Eisenbahnmörser" "Wasteland Of Terror" "Minefield" "Asphyx (Forgotten War)" "Into The Timewastes" "The Rack" "Scorbutics" "Last One On Earth".

PS : Remerciements à Petebull et Damage Done pour l'accréditation, ainsi qu'à ces derniers personnellement pour cette très belle soirée et le taf énorme accompli.

Photos tirées de : www.facebook.com/desphotosaupoil