La review

DEPECHE MODE
Bercy - Paris
29/01/2014


Review rédigée par Intissare


La salle n’est pas encore complètement pleine lorsque l’on découvre le groupe liminaire, en première partie, THE FEATHERS, originaire de Boston, un groupe essentiellement féminin qui fait résonner les années 80 à travers un enchaînement de titres electro-pop, des rythmes machiniques et des juxtapositions de synthés, le public joue le jeu et semble apprécier la performance, elle durera une heure et sera saluée.

Le salle est pleine à craquer lorsque le concert débute environ une heure plus tard, en ouverture "Welcome To The World", titre issu du dernier album "Delta Machine", Dave Gahan emporte alors le public de la sismographie de ses gestes, des oscillations maniérées, une humeur tout à la fois grave, légère puis faite de gestes de foi, quelque part entre la gestuelle l’Iguane Iggy Pop et les stigmates du Christ.



Vient "Walking In My Shoes", une arrêtée dans le temps pour un présent qui cri, affects portés par la gestuaire du corps de Dave Gahan, il strie la scène en percées de signes de croix comme incarnation de ses douleurs mais aussi d’un corps sacrifié et sacralisé, le groupe très visuel nous immerge dans une exploration guidée des rouages de la machine-monde, exploration d’appels à une foi hétérodoxe qui ouvre les questions dans une envolée d’enchaînement d’images, loin des schémas de l’innocuité pour qui sait le voir. On découvre une mise en question du rapport au corps, sont projetés les triangles, la trinité que l’on connaît de DEPECHE MODE au sein desquels on aperçoit des corps danser, une mise en mouvement des corps dans les rouages des machines, des sons qui créent leur propre monde et deviennent leur propre Dieu avec en symbolique la figure du Christ, comme pour dénoncer et conjurer le corps sacrifié sur l’autel d’un capitalisme liberticide. On entrevoit aussi des images d’une nature, comme son avènement, nature pourtant dénaturée a travers la musique par l’emploi des machines, DEPECHE MODE c’est à la fois le deuil et l’accession à l’Eden, c’est montrer à travers l’emploi des machines que la nature a une part maudite.



La virtualité des sons est un prétexte, elle sert au plus près un spiritisme presque sulfureux, on se souvient en 1993 du Devotionnal Tour où Dave Gahan entonnait "Walking In My Shoes" devant un passage de figures hybrides, divinités faites de corps féminins à têtes d’oiseaux que l’on retrouve dans le clip de "Walking In My Shoes", effrayants et inoffensifs à la fois, vêtus de blancs, esquissant des mouvements de grâce, que l’on imagine personnification de l’esprit en quête d’un symbole d’espoir ou d’un message d’angoisse de la modernité d’un monde en déclin ou bien signe d’apaisement, mais aussi de pureté et de douceur.
Martin Gore nous délivre une performance solo avec trois titres diffractés sur le concert, "Slow", "But Not Tonight", "Shake The Disease" (version acoustique), balades qui laissent éclore sa voix, à travers laquelle on découvre dans l’intensité, le croisement de méandres de douceur et d’ondes dolorifères



On peut noter que la voix de Dave Gahan retentit dans la puissance d’une parfaite maîtrise des timbres, les titres cultes, "Policy Of Truth", "Personnal Jesus", "Just Can’t Get Enough" sont acclamés et l’écho du public qui entonne les paroles fait résonner les murs de la salle.
Le concert se referme à l’apogée avec "Never Let Me Down" qui emporte la salle dans la mouvance d’une imparfaite affinité de synchronie, Dave Gahan donne le ton et la foule le suit, les bras se lèvent bringuebalants de droite à gauche et de gauche à droite, on pense alors au clip de "Never Let Me Down" où les épis de blé esquissent des mouvements similaires poussés par les vents.

Setlist : "Welcome To My World" ("Delta Machine"), "Angel" ("Delta Machine"), "Walking In My Shoes" ("Songs Of Faith And Devotion"), "Precious" ("Play The Angel"), "Black Celebration" ("Black Celebration"), "Should Be Higher" ("Delta Machine"), "Policy Of Truth" ("Violator"), "Slow" (acoustique - "Delta Machine"), "But Not Tonight" (acoustique – "Black Celebration"), "Heaven" ("Delta Machine"), "Behind The Wheel" ("Music For The Masses"), A Pain That I'm Used To" ("Play The Angel"), "A Question Of Time" ("Black Celebration"), "Enjoy The Silence" ("Violator"), "Personal Jesus" ("Violator").
Rappel : "Shake The Disease" (acoustique - "The Singles (81-85)"), "Halo" ("Violator"), "Just Can't Get Enough" ("Speak And Spell"), "I Feel You" ("Songs O Faith And Devotion"), "Never Let Me Down Again" (Music For The Masses").