Qu'est-ce qui est le plus plaisant dans une cité de la joie comme Bordeaux, et comme toutes les autres cités de la joie ? Le plaisir de trouver une place pour se garer quand il est quasiment 21h00, un Vendredi soir !! Eh oui, il faut s'armer de patience pour se choper une place dans les ruelles entre le quartier St Michel, celui des arrières de la place de la Victoire, et les rues perpendiculaires au cours Victor Hugo, pire que l'Ile du Roi Minos et son labyrinthe. Alors il aura fallu quelques longues minutes afin de trouver un petit espace vital nécessaire à ma vieille caisse pour ne pas se faire choper par la fourrière, ne pas me la faire voler et également se trouver à proximité des "Hérétiques" car je suis une grosse feignasse qui n'aime pas trop marcher...

Alors voilà, le concert débutant à 21h00, les quinze/vingt minutes de retard dues à la recherche de la place si convoitée, étaient déjà cause d'énervement. Mais par la barbe d'Odin, quelle ne fut pas ma surprise en arrivant à la porte des enfers, les hérétiques étaient encore devant celle-ci qui venait en fait juste de s'ouvrir. Alors l'agacement s'éloignant dans les méandres de mon cerveau, c'est avec une sensation positive que je pénètre dans l'antre des concerts underground Bordelais.

Qu'avons-nous au programme ce soir ?
Un concert sous la férule d'Hypnotique Prod qui au départ annonçait dans l'ordre d'apparition AD PATRES, DEMENTED, Fallen Joy et BREAKDUST. Tous étant des groupes de la région Bordelaise, excepté Fallen Joy, jeune groupe de Paris qui finalement n'était pas au rendez-vous, les raisons de leur absence n'étant pas de mon ressort... Alors donc nous avons eu l'agréable surprise malgré tout d'avoir OBSECURE en remplacement. Finalement l'affiche est totalement dans un esprit chauvin, puisqu'à l'arrivée nous nous retrouvons avec quatre groupe locaux. Mais la particularité de cette soirée ne réside pas dans l'origine géographique des groupes, mais plutôt dans un panachage musical alterné intelligemment. En effet, AD PATRES (certainement une prochaine valeur sûre de la scène Bordelaise) fait largement dans le death brutal, avec DEMENTED que l'on connait également pour officier dans un registre différent mais également death. Tandis que OBSECURE se complait à offrir du thrash avec leur compères de BREAKDUST. Et sans parler de musique old school, tant dans le death que dans le thrash, les groupes présents ce soir, ont une couleur inspirée par la musique extrême au goût si nostalgique des années 90's, ayant la faculté de transposer cette inspiration dans l'air du temps pour le plus grand plaisir de l'auditoire.

21h30, nous y sommes début du concert.
Force est de constater, que malgré une affiche underground dont les groupes n'ont pas une discographie plus longue que la taille d'un micro pénis, le death metal d'AD PATRES, lui, attire déjà quelques bons fans du genre. En effet, si la salle de l'Heretic n'est pas le Stade de France, elle semble bien remplie en revanche par une armée de fidèles qui devraient amplement se rallier à la cause d'AD PATRES. Ce groupe composé d'ex membres de IOST, groupe de grind, d'un ex-membre de Withdrawn et je ne le dirais jamais assez : de notre Yann national... euh non... régional, batteur fou et invétéré ayant officié chez Asgard, Seth, Enthroned, E-Force, de quoi se forger un bon carnet d'adresses...

Leur promo CD 2010, de trois titres, m'ayant filé une bonne soupe de phalanges tout récemment, je me languissais de les voir sur scène, dépucelage scénique d'AD PATRES pour ma part donc. Le groupe présente un set très intense grâce à des morceaux assez compacts techniquement, mais également bien équilibrés laissant libre cours à des thèmes et des ambiances bien aérées, utiles à la compréhension de leur death metal. On sent effectivement un retour aux valeurs qui ont fait de ce courant extrême l'un des plus appréciés. Il s'agit ici d'une grosse racine de death metal aux explorations diverses, telles que de petits passages grind, et d'autres plus brutales à la manière des groupes ricains comme Brutality. Mais dans son ensemble AD PATRES propose quelque chose comme du death brutal, sans tomber dans l'excès, qui en plus de déboîter, a une accroche hyper intéressante. Les titres d'AD PATRES défilent relativement rapidement, avec un frontman jeune, en la personne d'Axel qui, bien qu'il fasse montre d'humilité si ce n'est de timidité, assure comme une bête en ce qui concerne la voix. En effet, son timbre puissant vient fièrement se coller aux rugissements de la basse et des guitares qui épuisent physiquement tellement elles redoublent d'énergie, presque à en filer la crampe. Ce que nous avons pu constater avec Canard, qui a un moment donné, a lâché quelques instants le grattage de corde, transpirant comme un Scandinave qui sort de son sauna !! Et pendant ce temps, derrière ces fûts, Yann, martyrise la double à la vitesse d'un lapin qui chevauche sa lapine (imaginez la chose:tac-tac-tac-tac-tac-tac-tac) et fait chauffer les baguettes comme un artisan boulanger fait chauffer les siennes mais ici à coup de blasts violents,. En tous les cas, le public apprécie la prestation d'AD PATRES, qui lui rend bien, consentement mutuel implicite qui ne donne lieu qu'à peu de contact verbal entre Alex et le public, ce qui devrait peut-être venir un peu plus avec le temps.

Le set se termine vers 22h15/20 sachant que je n'ai pas une montre implantée dans le cerveau.

Le temps qu'OBSECURE se prépare, la foule remonte à la surface histoire de discuter, boire une chopinette, et parler avec les membres des groupes au mini merch. C'est d'ailleurs durant ces moments qu'on a pu prendre des nouvelles Thomas (Asmodée) et Cyriex (Asmodée et également Offending) étant venus rendre visite aux groupes ce soir. Et c'est durant ces périodes que l'on apprécie la gentillesse des membres de chaque groupe, sans exception qui ne font preuve d'aucune suffisance mal placée, bien au contraire.

22h30 approximativement, début du panachage, OBSECURE commence son set. Avec une foule un peu moins présente que pour l'ouverture.
Le jeu d'OBSECURE étant nettement plus thrash que ses prédécesseurs, la hargne n'est pas la même dans le public, même si sur le devant de la scène se profile pendant de longues minutes un micro pogo à quatre déchainés dont une fille. C'était la deuxième fois que je voyais ce groupe sur scène. Machine de guerre déployée pour le guitariste Pierrick qui a sorti l'artillerie lourde au niveau des effets, même si d'un autre côté on a appris que sa tête d'ampli avait cramé.
C'est l'atmosphère qui est la préoccupation principale d'OBSECURE, car les morceaux sont tous à connotation bien évidemment thrash, dont l'ombre de deux composantes du big four me semblent survoler les intentions du groupe ; mais il ressort de chaque chanson quelque chose de très intéressant dans les magnifiques harmonies des guitares. OBSECURE cherche à procurer des émotions au travers de ces titres, où s'alternent de très bon riffs agressifs et d'autres placés sur des passages nettement plus mid-tempo. Et c'est lors de ces moments qu'on remarque cette attirance vers les atmosphères pesantes. Ces passages laissent au premier rang de la foule, le temps de headbanguer convenablement sans se déboiter la nuque.
Là aussi on sent chez Damien, Pierrick, Eric et Pap un réel plaisir de jouer, même si l'on décèle encore une fois ce soir, une distance dans la communication avec le public par rapport à l'annonce des morceaux où lorsque Damien nous déclare "on est Obsecure... au fait". La musique d'OBSECURE offre aux auditeurs de bonnes émotions, notamment le morceau à thème sur les zombies qui nous rappelle éperduement 28 Jours Plus Tard. A côté de cela, chose que j'avais déjà soulevée lors de leur concert avec Hypnosis il y a quelques temps, et auquel j'avais assisté, c'est la carence en terme de lignes vocales, laissant bien sûr la part belle aux rythmiques efficaces et aux soli, mais une carence quand même.
Malgré tout , même si Pierrick n'avait pas de micro pour les backings, OBSECURE a montré ce soir qu'il avait quelque chose à dire en matière de thrash. Un thrash teinté de bons arguments des 90's là-aussi, mais avec une vision relativement neuve. Bonne prestation tant pour la batterie que pour les guitares. C'est sans s'y attendre que le set se termine.

Deuxième temps mort, remontée au niveau supérieur pour la discutaille. Ce qui est appréciable c'est que certains vont fumer leurs cigarettes dehors, comparés à d'autres, pas en majorité heureusement, qui ne semblent pas vraiment concernés pas la santé de leur semblables groupes ou public, pendant les sets.

23h30 Re-défouraillage, le public Bordelais, ce soir semblant être plus attiré vers la brutalité et le death metal. Effectivement DEMENTED vient prendre possession de la scène et immédiatement le public (habitué de ce groupe qui commence sérieusement à faire son petit chemin au niveau régional), se fait de nouveau plus nombreux.
DEMENTED voit en ses rangs le retour de Nessim et sa grosse voix caverneuse revenu du pays des kangourous, pour le plus grand plaisir des connaisseurs. Les morceaux de ce soir sont issus de leur premier album, sorti il y a peu, intitulé "Fields Of Suffering", et il est obligatoire de reconnaître que ça poutre sévère de ce côté aussi. Car DEMENTED c'est du gros son, du death qui tache avec des idées de caterpillar , encore une fois, tirées parfois d'influences relativement anciennes, mais également avec des riffs sortis de la jeunesse d'aujourd'hui.
Mais ce qui fait la différence, en matière de show, c'est que contrairement aux deux premiers groupes, Nessim est beaucoup plus charismatique comme frontman, il entraîne le public avec lui et l'oblige à se lâcher littéralement pour mettre le feu dans le sous-sol de L'Heretic Club. Les talentueux instrumentistes de ce groupe ne sont pas en reste, c'est un combo qui met le feu sur scène, à son niveau, tant Manu à la basse que Flo, Mika et l'intrépide John, excellent batteur en soi. D'ailleurs depuis le début nous avons assisté à une déferlante de bons batteurs, chacun dans sa propre catégorie. On sent à l'écoute des morceaux, et de l'ambiance, un certain rodage des salles obscures Bordelaises par ce groupe, et une connaissance ou reconnaissance d'un public venu aussi pour profiter d'un show de plus de DEMENTED. En soi, rien de nouveau pour les enragés, morceaux propres, grosse atmosphère de furieux et toujours un bon moment de death metal.

L'affrontement final approche, c'est la dernière bulle d'air au niveau du bar. Malheureusement on a l'impression que certains ont commencé à partir, le public étant beaucoup plus clairsemé dans les espaces de discussion. Après une petite attente, on redescend pour la dernière fois, pour un deuxième panachage.

BREAKDUST c'est un groupe que je n'ai jamais pu voir, car à chaque soit un empêchement survenait, une indisponibilité ou autre qui faisait en sorte de rater la prestation de ce groupe. Alors enfin, j'ai pu voir à l'oeuvre ce groupe de thrash. Enfin à l'oeuvre pas totalement, parce que les obligations faisant que je devais me lever tôt, il a fallu que je quitte la salle avant la fin du show de BREAKDUST. Et donc en raison de l'heure tardive je n'ai pu assister à tout leur set.
00h30, BREAKDUST débute, devant une salle frileuse où il a fallu aller chercher le reste de la légion qui était encore en haut en train de se branler les cacahouètes et qu'Alex fait appeler. Enfin le temps que tout le monde descende faire tout péter devant les thrasheurs, ces derniers commencent à chauffer l'atmosphère. Leur thrash / death est ici aussi de l'ancienne école, dans lequel j'y ai toujours trouvé des similitudes avec du Metallica, du Loudblast mais surtout du Sepultura de la meilleure école, l'unique, celle de "Beneath The Remains" et "Arise".
Les gars n'ont rien à envier aux groupes qui les ont précédé, ça envoie du bois comme il faut, on voit que les mecs savent occuper l'espace et connaissent leur taff jusqu'au bout des doigts. David nous fait une démonstration de savoir faire, mais surtout, gros big up à Rod, dont on a rarement vu le visage derrière ses positions à la Robert Trujillo, caché constamment derrière sa crinière !!!
Ici aussi, avec BREAKDUST, on sent bien que Alex est un frontman qui n'a pas peur d'aller parler au public, et de lui donner la chaleur et la proximité qu'il faut pour que le concert se fasse en osmose totale dans la salle. Avec un premier album "Mutilated Earth" les thrasheurs nous préparent un second opus pour bientôt, dont les nouveaux morceaux devraient plaire à leur public. Et c'est donc avec une certaine déception que je quitte la salle avant la fin,m'excusant de cette impolitesse aujourd'hui car le plaisir aurait été complet s'il m'avait été possible d'y assister jusqu'au bout.

En tous les cas, très bonne impression pour cette affiche. Un peu déçu de ne pas avoir eu la présence de Fallen Joy, mais satisfait de cette alternance death et thrash, comblé par la maturité d'AD PATRES, les harmonies d' OBSECURE, le retour de Nessim chez DEMENTED et l'énergie de BREAKDUST.