La review

AVATAR + THE LAST BAND
Le Ninkasi Kao - Lyon (69)
03/12/2016


Review rédigée par Zemurion


N'oubliez pas vos lunettes 3D, ce soir on va voir Avatar ! Ah non, attendez, on me dit que je confonds encore avec le remake de Pocahontas version Star Trek ! Il s'agit en fait du groupe suédois qui, après un passage remarqué au Download cet été, vient nous rendre visite à Lyon en tête d'affiche pour un concert qui annonce complet depuis plusieurs semaines. Ce sera pour moi l'occasion de découvrir cette formation dont il paraît que les prestations scéniques valent vraiment le détour.

Lorsque j'entre dans la salle déjà pleine à craquer du Ninkasi Kao, THE LAST BAND est déjà en train de s'exécuter sur scène. Tout comme AVATAR, le groupe nous vient de Göteborg, la capitale du death mélodique. Pourtant, on a plutôt affaire ici à un mélange difficilement descriptible de néo-metal et de rock mélodique. Si, dans un premier temps, le rendu paraîtra assez brouillon, le son s'améliorera au fil du set et on parviendra mieux à apprécier la performance des suédois. Le chant me fera penser à du Rage Against The Machine sur une musique pouvant alterner entre passage lourd et martelés et envolées mélodiques avec, notamment, pas mal de soli de la part des deux guitaristes. On retiendra surtout l'énergie scénique du groupe qui lui attirera la sympathie du public. Au final, THE LAST BAND nous aura fait passer un bon moment et aura assuré de façon fort correcte sa mission de première partie.

Décidément, je n'avais jamais vu la salle du Ninkasi aussi pleine. Aussi bien dans la fosse que sur le balcon, il n'est pas facile de se frayer un chemin vers une place correcte. Il apparaît évident que cette venue des Suédois dans nos contrées était, pour beaucoup, un événement à ne surtout pas manquer. Je vais rapidement comprendre pourquoi.
Alors que retentit la musique d'introduction et que les lumières baissent dans la salle, un grésillement se fait entendre, comme s'il y avait un câble défectueux sur scène. Vite, deux techniciens costumés en garçons de piste entrent sur scène et font semblant de rechercher l'origine de la panne. En voyant que même les techniciens de plateau jouent un rôle, on se dit tout de suite que c'est à un spectacle complet que nous allons assister ce soir. Et puis, d'un coup, un rideau tombe en avant-scène pour laisser apparaître la silhouette du chanteur Johannes Michael Eckerström juché sur un gros plot de cirque. Chapeau sur la tête et canne à la main, il est éclairé à contre jour par des poursuites qui sillonnent le plateau tandis que les musiciens entonnent le premier morceau. Avec son costume de cirque, son maquillage clownesque et sa gestuelle exubérante, le chanteur nous campe un personnage qu'on pourrait facilement rapprocher du Jocker dans Batman. Un personnage qu'il assume à cent pour cent, jusque dans la mégalomanie. Ainsi, entre les morceaux, il se lancera dans plusieurs soliloques seul face au public et éclairé par une lumière au sol qui accentue les ombres sur son visage - un peu comme quand on s'amusait à se faire peur avec la lampe torche quand on était gamins. Le frontman nous déclare qu'il est venu ici ce soir pour envahir Lyon et élargir les frontières du pays d'AVATAR. Aussi, nous sommes désormais chez lui, dans sa maison, et c'est lui qui choisit à quel jeu on va jouer. En nous parlant ainsi, il s'adresse aux "enfants de tous âges" qui sommeillent en nous. Cet univers de cirque nous ramène à cette époque de notre existence où nous étions plus ouverts à l'imaginaire et où nous avions encore peur des monstres et des cauchemars. Le seul moment où le clown tombera un peu le masque sera lors de l'ovation spontanée du public après le titre "Let It Burns" ; une ovation imprévue qui déstabilisera suffisamment le personnage pour laisser voir, pendant quelques seconde, l'émotion du chanteur. Il faut dire que ce soir, le public est vraiment formidable. Non seulement les spectateurs ne se font pas prier pour chanter et donner de la voix mais, en plus de ça, je n'avais jamais vu autant de personnes frapper des mains en rythme sans qu'un musicien ne les guide !
Pour ce qui est de faire le show, le chanteur peut aussi compter totalement sur les autres membres du groupe. Tous sont aussi costumés et légèrement maquillés. Le batteur John Alfredsson prendra plusieurs fois le rôle de chef d'orchestre et il quittera deux fois sa batterie pour venir haranguer le public en avant-scène tandis que les inséparables guitaristes Jonas Jarlsby et Tim Öhrström ne cesseront de faire les pitres avec une rare complicité, créant ainsi un véritable duo comique. Enfin, bien que plus réservé, le bassiste Henrik Sandelin répondra toujours présent quand il s'agira de faire tournoyer sa longue chevelure en rythme avec ses camarades de scène. Au final, les cinq garçons donneront tellement de leur personne que plusieurs passages de serpillière entre les morceaux seront nécessaires pour leur éviter de glisser dans leur propre sueur ! Plus qu'on concert, c'est un véritable show millimétré que nous offre le groupe ce soir. Cependant, la maîtrise des musiciens ne se cantonne pas uniquement à l'aspect scénique. En effet, le groupe est aussi irréprochable sur le plan théâtral que musical. Je pense notamment au chanteur qui, outre son jeu d'acteur, nous subjugue par sa maîtrise vocale à toute épreuve. Que son chant se fasse grave et mélodique ou qu'il s'aventure dans des aigus plus heavy, il se montre toujours d'une justesse sans faille tout en allant régulièrement explorer des sonorités plus extrêmes avec une aisance déconcertante. Le son de chaque instrument étant très bien équilibré, on arrive à discerner parfaitement chacun des musiciens qui ne mettent pas une seule note à côté. Même si le style ne se veut pas forcement démonstratif techniquement, les deux guitaristes se coltinent tout de même certains passages assez ardus à jouer avec plusieurs duos de guitare extrêmement bien exécutés.
Puisqu'on parle du style, le groupe nous livrera des morceaux très variés en puisant essentiellement dans ses trois derniers albums. Cependant, que ce soit à travers des passages groovy, indus, mélodiques ou heavy, il en ressort toujours cette même énergie presque festive qui donne envie de remuer. Malheureusement, on sera tellement serrés dans la salle qu'on n'aura souvent guère d'autre choix que de sauter sur place. Même les pogos ne parviendront pas à créer une zone moins compacte devant la scène. Seuls deux morceaux seront, selon moi, axés vers un registre plus mélancolique. Il s'agira des titres "Fiddler's Farewell", pour lequel le chanteur revêtira un improbable costume de Pierrot trop bouffant et tristement ridicule (la facette triste du clown rieur), et "Tower" qui clôturera le concert par une pointe d'émotion.

Il y aurait probablement encore beaucoup à dire sur la prestation hors norme que nous a livré le groupe ce soir. Un show aussi bien maîtrisé scéniquement que musicalement qui aura rencontré l’adhésion complète d'un public de qualité mais presque trop nombreux dans cette salle pleine à craquer. En tous cas, on n'aura pas boudé notre plaisir et on a déjà hâte de voir ce que ces incroyables suédois nous auront concocté pour leur prochaine tournée ! Comme il se doit, on n'oubliera pas de remercier les groupes, les techniciens et toute l'équipe de l'organisation pour cette excellente soirée !