La review

ACID KING + BLACK COBRA + DOPETHRONE
Le Glazart - Paris
28/04/2015


Review rédigée par Intissare


On constate que beaucoup de monde a répondu présent pour cette date présentée par Dead Pig Entertainement, avant même l’entrée en scène du premier groupe, énormément de monde se presse déjà devant et à l’intérieur de la salle, aux alentours des 19h30 ce sont les Canadiens de DOPETHRONE formés en 2008 et du nom éponyme de l’album d’Electric Wizzard qui ouvrent le bal, ils nous présentent leur album "Hochelaga" avec des titres comme "Dry Hitter", "Chameleon", "cum Fuck Blues Witch" ou encore "Drink – Smoke – Die", "Riff Dealer".
Ils défendent un son sludgecore à forte prépondérance de sonorités doom baignés de thématiques et atmosphères coutumières du genre tournant notamment autour d’une violence à l’humeur acerbe et des drogues. La production pour cet album est plus travaillée que celle des précédents et sur scène les canadiens sont communicatifs, d’humeur joviale conduisant l’ambiance en gradation. Vincent Houde (chant / guitare), imprégné tant dans sa représentation que sa manière de se concentrer semble jouer du regard avec le public, le fixe les yeux presque exorbités ainsi qu’ au travers de mimiques exagérés tandis que Vyk (basse) reste tenu et plus en retrait tandis que des fumigènes par moments s’emparent de la scène. On peut retenir de cette prestation la reprise de "Ain’t No Sunshine When She’s Gone", très belle reprise qui tire sa charge et prend sa force au delà du thème de l’histoire d’amour et à son travers de la souffrance, la dérive, l’iniquité, constat amer d’un monde décadent, thèmes qu’explorent usuellement le sludge metal, comme si la chanson n’était qu’un prétexte et un tableau, décors parfait dans lequel s’implante et se dépeint cette mélancolie. Le public est présent, la salle étant déjà comble et reçoit le set agréablement mais dans un calme encore relatif.



Par la suite lorsque les Californiens de BLACK COBRA entrent sur scène, on assiste au bout de quelques titres à un déchaînement du public qui headbangue et oscille entre mouvements de foule et pogos, le duo dont leur dernier passage à Paris remonte à 2008 interprète et nous entraine sur des morceaux tels que "Avalanche", "Corrosion Fields", "Obliteration", "Abyss" issus de leur dernier album sorti en 2011 "Invernal". Aux limites entre le sludgecore, le doom et le punk, formé de l’actuel bassite d’ACID KING, Rafael Martinez ici à la batterie ainsi que d’un membre d’ex-Cavity, c‘est un groupe où la dimension scénique est extrêmement efficace, autant dans la violence du son brute, "sale", éraillé que par la puissance des sonorités doom, tous les éléments s’agencent pour emporter une foule au rythme d’un mur du son sans concession dans des déchaînements presque apocalyptiques.



Vient ensuite ACID KING qui se prépare un long moment durant, dans le calme ou l’on peut voir Lori S accorder sa Marshall avec attention et minutie. Notons que point de vue de la sonorisation, la seule petite ombre fut tous groupes confondus, la presque imperceptibilité de la voix lorsque l’on était positionné devant la scène, ce qui n’était plus le cas avec le recul lorsque l’on s’éloignait.
ACID KING n’est plus à présenter, mené par la chanteuse Lori S, le nom de son groupe fait référence aux meurtres tragiques d’inspiration satanique commis par Ricky Asso à New York en 1984 surnommé "The Acid King", événements relatés par le livre "Say You Love Satan" écrit par par David St Clair. Depuis plus de 20 ans écumant la scène doom sur les routes des Etats-Unis et d’Europe, ils se sont forgés malgré eux la réputation d’être un des groupes de référence de cette scène ayant doté le genre stoner / doom de ses notes de noblesse. Ils nous présente ce soir les titres de leur dernier album "Middle Of Nowhere, Center Of Everywhere" qui contribue à faire de cette date et de la tournée au sens large un événement des plus attendus étant donné qu’ils n’avaient pas sorti d’album depuis plus de 10 ans nous ayant laissé pour souvenir le désormais culte "III" en 2005. La setlist est composée des titres mythiques tels que, "Wheel Nation", "Laser Headlights", "Coming Down From Outer Space", "Silent Pictures", "Infinite Skies" agrémentée de ceux du dernier album. La voix languissante de Lori S nous entraîne à travers la précision et la maîtrise d’une élucubration mystique, il y a une dimension de rituel très prépondérante, pas au sens religieux, au sens conventionnel, mais on se sent et se laisse plutôt peu à peu happer, à travers un voyage, une exploration où l’on a pour repère les fluctuations de sa voix qui, fondue en retrait, ne se noie pourtant pas au sein des sons heavy et massifs de la guitare, le tout confère au show une dimension atmosphérique au sens d’hypnotique et épique. Le contraste de sa voix d’une teinte très féminine, aspirée pour venir se perdre dans le halo de la massivité du son, nous amène à penser à Homère résistant aux chants des sirènes sauf qu’ici on se fait les prisonniers volontaires d’un voyage dont on veut mettre à jour les mystères.
Les membres du trio sont chacun imprégnés à leur manière dans la maîtrise de leurs instruments et la lenteur caractéristique de la musique, lenteur à travers laquelle on se laisse saisir, pris dans des distorsions résolument psychédéliques, ils commencent et concluent le set par l’ "intro" et l’ "outro" du dernier album, album qui nous démontre bien que, tant à l'écoute que dans la sphère du live, ACID KING possède sa patte et son style au-delà des innovations de l’album. Celles-ci ne peuvent altérer le son propre, identifiable et le style désormais culte des Californiens.

Ce fut une belle soirée des Stoned Gatherings pour cette date composée de groupes résolument doom et que l’on pourra retrouver l’affiche du Desertfest, tant du point de vue de l’organisation que des performances des groupes mais également de l’accueil du public qui s’est déplacé ce soir.