Le groupe
Biographie :

Formé en 2009 à Nancy, Wheelfall est un groupe de post-metal industriel actuellement composé de : Fabien W. Furter (chant), Florian Rambour (guitare), Thibaut Thieblemont (guitare), Niko Elbow Giraud (batterie) et Thibaut Marquis (basse). Leur volonté de créer de nouvelles sonorités et de détruire les frontières via des atmosphères cathartiques prend réellement vie avec leur double album et roman "Glasrew Point" en 2015, acclamé par la critique. Un univers dont ils continuent à repousser les limites avec l'album "The Atrocity Reports", sorti en 2017 chez Apathia Records. L'album suivant, "A Specter Is Haunting The World", sort en Décembre 2020 chez No Good To Anyone.

Discographie :

2010 : "From The Blazing Sky At Dusk" (EP)
2012 : "Interzone"
2015 : "Live sessions At La Forge Productions, 2013" (EP)
2015 : "Glasrew Point"
2017 : "The Atrocity Reports"
2020 : "A Specter Is Haunting The World"


Les chroniques


"A Specter Is Haunting The World"
Note : 17/20

J'espère que vous êtes vaccinés contre le tétanos parce que Wheelfall dont je vous avais parlé avec "The Atrocity Reports" nous amène un nouvel album nommé "A Specter Is Haunting The World" et je vous préviens, ça va couper ! Pour les quelques étourdis du fond, Wheelfall est un groupe français qui est parti d'un stoner bien gras à ses débuts pour arriver à un metal indus couplé à du sludge le tout froid, sale et très méchant sur ses derniers albums.

Comme si sa musique n'était pas assez exigeante, le groupe a en plus eu l'idée de faire cette fois un album concept racontant l'histoire d'un homme ordinaire arrivé à bout qui décide de tourner son désespoir vers le capitalisme global qui, d'après lui, pourrit le monde et planifie l'exécution en direct du directeur du Fonds Monétaire International. Vous aurez donc très vite compris que l'espoir ne va pas vraiment couler de source par ici et que l'ambiance générale va être tendue et sombre. Et si vous ne l'avez pas encore compris, "1 000 Ways To Kill A Man" qui ouvre l'album va vite vous le faire comprendre car le groupe ne s'embarasse pas de la moindre intro et ne prend pas non plus le temps de faire monter la tension. Wheelfall a préféré nous exploser à la tronche tout de suite et on peut dire qu'on se fait prendre à la gorge dès les premières secondes. Des riffs froids et tranchants, des arrangements indus et electro pas plus chaleureux, quelques blasts, quelques voix claires hantées au milieu de cris bien arrachés, il y a tout ce qu'il faut pour flinguer l'ambiance en un claquement de doigts ! Wheelfall n'a rien perdu de sa hargne et même son metal indus sent toujours le sang, la crasse et les lames rouillées. Sans jamais partir dans un chaos incontrôlé, le groupe nous met tout de même la pression constamment et le feeling urbain que montrait "The Atrocity Reports" trouve encore une place pour s'exprimer. On le sent d'autant plus qu'il se mélange au désespoir du personnage principal de ce concept et que le groupe arrive a retranscrire ce sentiment d'oppression d'un monde sans pitié qui écrase tout ce qui n'entre pas le moule. Ce nouvel album est en plus doté d'un son parfaitement adapté avec des guitares puissantes mais bourdonnantes, une basse qui descend très bas et une batterie sèche qui claque comme un fouet.

Une fois de plus, c'est une violence rampante, une agression sournoise qui nous met à genoux et "A Specter Is Haunting The World" prouve pendant quarante minutes qu'il n'y a pas besoin de balancer un déluge de coups pour faire mal, il suffit de frapper aux bons endroits. J'avais cité les influences inévitables en matière de metal indus à la sortie de "The Atrocity Reports", à savoir Godflesh, Ministry et autres Killing Joke en précisant que Wheelfall avait sa propre patte et développait sa personnalité. Ce nouvel album et le concept qui l'accompagne permettent au groupe de s'émanciper encore plus et développer son univers. Certes on peut encore les entendre mais cela tient plus de l'inspiration et de l'hommage qu'autre chose, en particulier sur "Sex / Oblivion / Sex" où le "Streetcleaner" de Godflesh n'est vraiment pas loin. Mais je le répète, Wheelfall fait du Wheelfall et sa musique est dotée d'une profondeur et d'une authenticité qu'il va être bien difficile de prendre en défaut. "A Specter Is Haunting The World" est aussi doté d'une superbe pochette montrant un homme cracher ou vomir une substance blanchâtre et pourrait presque suggérer l'effet d'un coup de poing à l'estomac, celui que vous allez prendre pendant l'écoute de l'album. Parce que quand Wheelfall ne fait pas dans la brutalité rampante et les riffs vicieux et lourds, ce sont les ambiances glauques et malsaines qui prennent le relais. "Perverse Technology" est d'ailleurs bien vicelard dans le genre, que ce soit les riffs ou les mélodies, tout est glauque et quand les blasts arrivent, la folie se mélange au désespoir et l'agression est totale. Ces rares accélérations sont d'autant plus brutales que le reste est souvent très lourd, le contraste donne vraiment l'impression de coups de folies spontanés qui surgissent au milieu d'une dépression larvée.

Wheelfall confirme tout le bien que l'on pensait de lui en nous livre un concept album totalement habité qui pousse encore plus loin la mue entamée avec "Glasrew Point". "A Specter Is Haunting The World" est un excellent album qui transgresse les frontières et navigue dans des eaux troubles aux teintes aussi indus que metal et sludge comme son grand frère "The Atrocity Reports". Je ne sais pas si un spectre hante le monde mais celui-ci va clairement hanter vos enceintes !


Murderworks
Mars 2021




"The Atrocity Reports"
Note : 16/20

Encore une nouvelle signature pour Apathia avec cette fois le troisième album des Français de Wheelfall, "The Atrocity Reports". Quand on pense que le groupe faisait du gros stoner qui tache sur son premier album, on se dit qu'il a fait un sacré chemin depuis ! "The Glasrew point" le voyait s'aventurer sur des terres bien plus indus et ce nouvel album lui emboîte le pas.

Dès "The Way To Every Crime Is Ours", on croirait entendre du Ministry en version surpuissante et encore plus noire avec un bon gros son qui décolle le papier peint, donc du metal indus froid et violent (une influence que l'on entend aussi sur "Impenitent"). "Nothing But Worms" profite de sa plus longue durée pour lever le pied et balancer des riffs très lourds qui ne sont pas sans rappeler Godflesh dans leurs relents les plus indus. Vous l'aurez compris, ça ne respire pas la joie de vivre chez Wheelfall et ce nouvel album est écrasant et intense. Pendant quarante minutes, "The Atrocity Reports" va installer un climat urbain, sale, glauque et va vous taillader de tous les côtés à coups de lames de rasoir rouillées. On sent aussi l'héritage de Killing Joke sur "Violence Is Seduction" avec ce côté à la fois énergique, presque dansant et en même temps d'une froideur à vous glacer le sang. Je sais que dit comme ça, vous avez l'impression que Wheelfall ne fait que réciter ses plus grandes influences mais ce n'est pas le cas, on sent les influences en question mais vu les mastodontes que sont les groupes en question, il est bien difficile de ne pas les entendre marquer votre musique quand vous tapez dans le metal indus. Wheelfaal a tout de même une patte, ne vous y trompez pas, une noirceur qui lui est propre et des sonorités metal voire sludge bien plus présentes que chez un Ministry par exemple qui a souvent tendance à plutôt tirer sur le punk. Quelques dissonances typiquement metal extrême viennent aussi se greffer discrètement sur ce metal indus glacial et violent.

"The Atrocity Reports" est un album intense, dur, sur lequel il règne constamment une certaine tension et une urgence à peine contenue. "Impenitent" donne l'impression que Ministry aurait copulé avec Celeste, un mélange indus / punk / sludge qui vous roule dessus sans ménagement et vous laisse pour mort au bord de la route. A tous les niveaux la musique du groupe effectue un numéro d'équilibriste entre la froideur de l'indus et le gras du sludge, un contraste des plus sales qui garantie une musique violente et sans pitié. Une preuve supplémentaire pour ceux qui en doutent qu'il n'est pas nécessaire de ruer dans les brancards pour faire quelque chose de brutal musicalement. Sur certains morceaux comme "Lost Cause" qui clôt l'album, on sent même quelque chose de quasiment occulte, un feeling malsain, presque démoniaque, une folie rampante qui se glisse sournoisement au milieu de la décrépitude ambiante. "The Atrocity Reports", comme son nom l'indique, ne vous veut pas du bien, même les courts interludes qui vous font croire au premier abord à une occasion de reprendre votre souffle en profitent pour faire dans le bruitiste et vous cramer encore un peu plus les tympans et les neurones. Niveau production, on a un son aussi sale que puissant avec des guitares tranchantes, une batterie froide et une basse épaisse et bourdonnante.

Voilà donc un nouvel album indus pour Wheelfall qui nous livre une collection de morceaux froids, durs, violents et intenses. Si vous avez apprécié les groupes cités plus haut, vous pourriez vous y retrouver sur "The Atrocity Reports" et je vous encourage en tout cas à y jeter une oreille.


Murderworks
Avril 2018




"Glasrew Point"
Note : 15/20

Deuxième album pour les Lorrains de "Glasrew Point". Après avoir publié plusieurs petits formats et un premier album, "Interzone", en 2012, dans un style stoner metal, le quatuor est devenu quintette en recrutant un musicien, Thibaut Thieblemont, responsable des claviers, textures et guitares additionneles. Cela couplé a une soif d'expérimentations, Wheefall, mené par Fabien Furter, par ailleurs membre de Phazm, Chaos Echoes (ça c'est du CV !) et artiste solo, s'est radicalement transformé.

Leur nouveau son adopte des contours indéfinis et opaque. Influences industrielles, sludge, post-punk, black, death, post-hardcore, expérimental... la meilleure façon de parler de la musique du nouveau Wheelfall serait, selon nous, d'appeler cela du metal apocalyptique. Et cela est parfaitement justifié tant la musique des Lorrains se veut particulièrement glauque, froide et ultime. Bienvenue dans un univers prenant, cohérent et malsain où l'humain n'a plus sa place.

Gargantuesque, puisque composé de deux CDs pour un total de 82 minutes, "Glasrew Point" est une descente dans un enfer post-industriel inquiétant aux cieux de fer et à l'atmosphère suffocante. Une odyssée déshumanisée et cauchemardesque dont il conseillé, pour garantir sur vous un effet de terreur encore plus succulent, d'écouter les disques d'une traite. Le son est propre et compact, puissant et dynamique. Toutes les couches sonores et les détails, atmosphériques comme guitaristiques, ressortent sublimement sans que rien ne dépasse. Le son de batterie est très intéressant, à la fois sec, mécanique et rond et profonde. Le son métallique est tempéré par une réverbation organique. La frappe de Niko Elbow est millimétrique mais vivante, proposant ainsi un jeu à la croisée de la machine et de l'humain.

L'enlevé et destructeur morceau qu'est "Dead Eyes" nous montre un groupe au potentiel incroyable et à l'écriture imparable, qui distille des ambiances froides et noires avec magnificence. La dimension indus de Wheelfall gagne le premier plan sur ce titre évolutif d'une intelligence rare. Le prenant "Strangers" fait penser au Killing Joke de 1983-1985 tandis "Vanishing Point" pilonne comme une sulfateuse. Ce qui n'est rien comparé au chef d'œuvre de l'album qu'est "The Drift", longue pièce fangeuse de treize minutes, une compo monstrueuse et terrifiante aux ambiances de malade. Wheelfall est ici à son sommet.

Le deuxième CD s'avère être encore plus réussi. L'ambiance de ce second skeud est d'une noirceur abyssale et mécanique. Le groupe y atteint des profondeurs infernales où jamais le Styx ou les autres fleuves des Enfers n'ont coulé. L'intro "Shelter" terrifiante, nous invite à plonger dans "Absence Of Doubt" et le terrible "Shape Shifter". "The Skeptic And His Shadows" voit Neurosis et Godflesh copuler joyeusement (façon de parler) tandis que l'angoissant et très Killing Jokesque "Sound Of Salvation" nous terrassent. Le final "Return Trip" ne nous ramène pas à la maison mais nous achève sous le poids de ses volumes titanesques.

Le seul défaut de "Glasrew Point" est qu'il nous oblige à interrompre notre état de transe ténébreuse et qu'il nous faille changer de disque dans la platine pour continuer, ou plutôt recommencer, l'immersion dans ce cauchemar mouvant et désincarné. Si, dans leur futur désolé, les machines de Terminator étaient capables de rêver, leurs rêves auraient sûrement "Glasrew Point" comme bande-son. Un expérience très intéressante à essayer sans se poser de question.


Man Of Shadows
Novembre 2015


Conclusion
L'interview : Fabien

Le site officiel : www.wheelfall.com