Le groupe
Biographie :

To-Mera est le nom d'un groupe de metal progressif formé en 2005 à Guildford au Royaume-Uni. Ce groupe actuellement signé chez Illusionary Records a sorti au cours de sa carrière 3 albums studio, une démo ainsi que 2 EPs. Ce groupe compte dans ses rangs deux membres du groupe de metal progressif Haken.

Discographie :

2005 : "Transcendental"
2006 : "Blood" (EP)
2008 : "Delusions"
2009 : "Earthbound" (EP)
2012 : "Exile"


La chronique


Amateurs de musique riche et complexe, bienvenue dans l'univers de To-Mera, groupe ayant déjà deux albums à son actif et deux EPs très chargés. Rien d'étonnant à ce que leur musique soit extrêmement variée et atypique puisque le line-up qui a formé le groupe l'était déjà : Julie Kiss ancienne chanteuse de Without face et Lee Barett (qui a quitté le groupe depuis) membre d'Extreme Noise Terror ! Dans le genre grand écart stylistique on a rarement fait mieux, mais pour un groupe qui navigue dans le sphère du prog c'est cohérent. Et attention je ne parle pas de metal prog mais bien de prog tout court, celui qui mélange plein d'ingrédients et qui teste plein de formules bizarres.

Parce que oui à l'écoute de "Transcendental" et "Delusions" il y avait de quoi être désarçonné, on passait sans prévénir d'un metal prog et mélodique à des plans carrément jazz, enchaînés à des growls sur fond de blast pour finir sur des passages de toute beauté surmontés de la voix chaleureuse de Julie Kiss. Et c'est sur "Delusions" que le délire a vraiment été poussé à fond, au point que malgré la qualité de l'album il est assez difficile d'y entrer et de capter le propos du groupe, ce qui a par conséquent contribué à laisser pas mal de monde sur le pas de la porte. Il faut croire que le groupe a compris ses quelques erreurs puisque le petit nouveau nommé "Exile" n'est plus aussi insurmontable. Mais mettons quand même les choses au clair tout de suite, To-Mera ne s'est pas mis à faire du metal basique. La complexité et la richesse des influences sont toujours de mise mais disons qu'on commence à sentir la marque de l'expérience.

Ce nouvel album est en effet plus "accessible" que les deux précédents, même s'il va vous falloir une paire d'écoutes avant d'en venir à bout. Les passages jazz par exemple sont moins présents ou en tout cas moins mis en avant, ils se ressentent maintenant dans quelques structures aventureuses et dans l'esprit général. Toutes les influences ou sonorités différentes présentes dans la musique du groupe sont enfin parfaitement assimilées. "Exile" nous montre pleinement le talent que l'on pouvait deviner sur les deux premiers opus, quand le groupe décidait de lever le pied sur les expérimentations pour proposer des passages plus mélodiques et portés sur les émotions. Mais même si la mélodie s'est imposée sur cette nouvelle galette l'album reste un bon gros pavé, on reste trimballé dans tous les sens pendant une heure. C'est simplement que cette fois on a plus de prises auxquelles se raccrocher, le monde de To-Mera commence enfin à entrouvrir ses portes et arrivera peut-être à ne pas épouvanter d'entrée de jeu les plus frileux.

Par conséquent la voix de Julie Kiss s'intègre elle aussi bien mieux à l'ensemble, alors que sur les deux premiers albums on pouvait sentir un certain décalage à certains moments, ou une difficulté à placer des lignes de chant cohérentes sur des passages extrêmement tordus. Là la mélodie et les passages accrocheurs se font une place suffisante pour lui permettre d'être vraiment à l'aise et d'utiliser pleinement ses capacités. On notera d'ailleurs, pour en rester dans le domaine du chant, l'apparition aux growls de notre Stéphan Forté national sur "The Descent". Assez étonnant de l'avoir choisi pour le chant, non pas qu'il n'y est pas doué, mais je l'aurais bien vu taquiner les cordes sur certains morceaux. Mais bon il faut dire que niveau guitares ils ont ce qu'il faut, Tom MacLean étant loin d'être un manchot ! D'ailleurs je parlais plus tôt du fait que l'expérience commençait à porter ses fruits, ça se voit aussi à un autre niveau puisque pour la première fois le groupe s'est autoproduit, même si Brett Caldas-Lima s'occupe encore du mastering et du mix.

Autre détail assez important, "Exile" est un concept album, et par conséquent il est vivement conseillé de l'écouter d'une traite. Personnellement c'est comme ça que j'écoute tous les albums, mais si ce n'est pas dans vos habitudes forcez-vous pour le coup. C'est seulement là qu'on comprend vraiment où le groupe veut nous emmener, c'est comme ça que sa musique prend tout son sens. Les morceaux s'enchaînent tous et même si ils s'écoutent tous très bien séparément, je trouve préférable de se plonger totalement dans la musique. Surtout quand elle est aussi riche et belle, l'heure que dure l'album passe comme une lettre à la poste une fois qu'on s'est habitué aux réguliers changements de tons typiques du groupe.

En bref, To-Mera commence à muer et à s'affirmer de plus en plus, le groupe prend confiance et commence à maîtriser ses multiples envies et influences. Loin du bordel que pouvait être "Delusions" par moments, "Exile" montre un To-Mera qui sait canaliser ses délires pour proposer une musique toute aussi riche mais plus cohérente. Alors certains leur reprocheront peut-être d'avoir quelque peu perdu en folie, mais ils ont indéniablement gagné en musicalité et ont décidé de laisser entrer un peu plus de monde dans leur univers. Pas de quoi crier aux vendus, on retrouve le même groupe que par le passé mais en plus mûr et moins hermétique, tout y est mieux fait et plus maîtrisé. Et si je n'ai pas précisé d'étiquette précise au cours de ces lignes vous imaginez bien que vu la richesse de l'engin il est impossible de le ranger quelque part, alors posez y une oreille attentive et profitez de cette petite réussite qu'est "Exile". Et si vous êtes courageux écoutez aussi "Transcendental" et "Delusions", vous y trouverez de très bonnes choses aussi. Il vous faudra simplement faire plus d'efforts pour en saisir l'essence mais ça vaut le coup de tenter sa chance, pour une fois qu'un groupe propose quelque chose de vraiment personnel on ne va pas faire la fine bouche !


Murderworks
Décembre 2012


Conclusion
Note : 17/20

Le site officiel : www.to-mera.com