"Savagery"
Note : 16,5/20
Trois années après son précédent album, Skinless sort "Savagery". Ce groupe américain de brutal
death à tendance grind avait eu l'audace en 2015 de sortir un album 10 ans après "Trample The
Weak, Hurdle The Dead" qui est "Only The Ruthless Remain", un album très correct mais beaucoup
moins cru que les précédentes sorties. Cette "Savagery" mêle les ambiances propres à "Only The
Ruthless Remain" mais en conservant la recette brutale des premiers albums. On ressent
d'ailleurs que cet album se veut plus moderne tout en conservant l'âme du groupe, avec ce zombie bien
détaillé mais dans un environnement très pauvre comme les premières pochettes.
Rentrons directement dans le vif du sujet avec quelques tracks propres à l'agressivité des
débuts. "Skull Session" nous torture avec un sample très malsain qui nous laisse croire
qu'on est emprisonnés dans une vieille cellule, les riffs se veulent plus grind, à la Benighted, et seront
de plus en plus lourds. Tantôt on perçoit de l'agressivité brute ou bien plus de profondeur dans la
voix de Sherwood Webber qui colle parfaitement avec cette ambiance malsaine. Plus tard, on pourra
entendre des riffs plus old school.
La rage refait surface avec une reprise de Crowbar, "High Rate
Extinction". Les gros blasts arrivent accompagnés de riffs saccadés, le growl est pesant et peu
perceptible, comme un monstre prêt à bondir sur nous à tout moment. "Siege Engine" nous laisse entrer dans une atmosphère saccadée et dynamique où les grattes
sont plus irrégulières, la batterie est beaucoup plus puissante et les effets vocaux se mélangent
parfaitement.
On ressent en plus de cette efficacité parfaite une homogénéisation grindcore / death traditionnel
dans "Medieval" et dans "Line Of Dissent". C'est un environnement similaire aux morceaux précédents
mais sans être complètement dans la violence pure. Les mélodies se font moins intéressantes je
trouve mais les sonorités restent classiques comme on les aime.
Skinless offre aussi une patte plus planante et légère. "The
Hordes" nous attaque avec de légers coups de batterie et des riffs old school assez aigus qui
montent crescendo. Même cet interlude ne coupe pas court à l'atmosphère violente et malsaine, en y
saupoudrant des riffs post-black et quelques brefs coups de cloche. Le morceau-titre "Savagery" commence
avec une voix qui ressemble à celle d'Immortal Joe dans le film Mad Max : Fury Road et est suivie
de brefs blasts et de riffs légers qui montent au fur et à mesure, le chanteur est tout aussi performant
dans ce morceau. "Exacting Revenge" est empreinte d'un growl grind et de riffs plus
énergiques que brutaux, cela finira par une basse plus old school. On se retrouve maintenant à la fin
de ce massacre avec "Cruel Blade Of The Guillotine", cette chanson reflète justement bien la
froideur de cette lame. Les riffs sont plus blackisants malgré les vocals plus bestiaux, la guitare est
très dissonante avec des notes aigues qui prennent au ventre.
Je ne suis pas du tout déçu par cette sortie malgré quelques années d'absence de la part de Skinless. La
production est bien plus propre et conserve la force du groupe. Cette nouvelle
galette plaira à tout fan de brutal death.
"Only The Ruthless Remain"
Note : 15/20
Enfin ! Après neuf années sans la moindre production et même deux années de split, Skinless revient avec un nouvel album. Si vous ne connaissez pas ce groupe, ce n'est pas parce qu'il est mauvais, ni même qu'il n'a jamais eu la chance de se produire sur de grosses scènes et avec de gros noms, mais peut-être parce qu'à la manière de Roméo et Juliette, leur amour est impossible. Skinless, c'est une vingtaine d'années de carrière, du gros death à l'américaine, des tournées avec les plus grands (Six Feet Under, Deicide, Immolation, Slayer ou encore Pantera !!!), mais malheureusement un line-up aussi foireux qu'une poire à lavement sur une chaise à bascule. Aujourd'hui, le groupe débarque avec un guitariste supplémentaire, Dave Matthews, qui a notamment servi dans Incontinence, Armor column et Held under, entre autres. Le pari était donc risqué puisque qui dit ajout d'un nouveau membre, dit risque accru de line-up qui se casse la gueule.
Pourtant, le résultat est plutôt cool. À l'inverse de beaucoup de gros noms présents sur le label Relapse Records (Agoraphobic Nosebleed, Brutal Truth, Devourment, Cephalic Carnage etc…), on sent chez Skinless un petit côté old school, quelques racines d'un vieux death caverneux qui sent bon le terroir. Le genre de musique qui n'hésite pas à se poser un peu pour bien faire les choses, qui n'est pas en mode déglingo du début à la fin, plutôt death que deathcore, parfois légèrement technique, mais pas trop brutal. Jusque là, rien de très exceptionnel en fait. Mais là où Skinless prend un gros risque (plutôt bien réussi selon moi), c'est quand il s'épanche légèrement vers le metalcore ! Rassurez-vous, ce n'est pas flagrant, et heureusement d'ailleurs, sinon j'aurais clairement trouvé qu'ils ont chié dans la colle. Pour exemple, prenons la troisième piste de l'album, intitulée "Skinless". Il s'agit pour moi de la meilleure, pourtant elle commence lentement, quasi comme une intro. Mais vient ensuite un gros death bien lourd des familles, vite rattrapé par un chant clair, qui certes reste en fond, mais s'incruste parfaitement dans le rythme de la chanson. De même, "Flamethrower", pas franchement violente, mais bien travaillée, avec un bel effort sur la gratte, ça passe crème. On peut aussi citer "The Beast Smells Blood", dont le début sonne carrément plus thrash, mais pourquoi pas après tout.
En fait, je crois que si j'aime bien cet album, c'est parce que je ne suis pas un vieux fan du groupe. On est très loin du dernier véritable album du groupe, "Trample The Weak, Hurdle The Dead". On ne va pas tortiller du cul pour chier droit : ce nouvel album est clairement en-dessous. On en prend beaucoup moins dans la gueule, malgré quelques risques, il est moins entraînant, moins trituré d'la corde à linge, moins cramé des neurones, moins "Decapitated" etc… D'ailleurs, rien qu'en comparant la pochette avec celle des anciens albums, on comprend tout : elle est moins originale, plus old school, moins recherchée, voire banale pour du death. Enfin, 7 morceaux, aussi longs soient-ils (environ 4 minutes chacun), c'est peu, surtout après 8 ans d'attente.
Mais voilà, après tant de temps, alors qu'on n'y croyait plus, Skinless revient. Pas avec l'album de l'année, pas avec ce qu'ils ont fait de mieux, mais avec un véritable album en bonne et due forme.