Le groupe
Biographie :

Psygnosis est un groupe de metal extrême atmophérique et instrumental formé en 2009 et actuellement composé de : Rémi Vanhove (guitare, chant, samples, programmation / Absolu, ex-Euphorya, ex-Ghost, Ischeamia), Raphaël Verguin (violoncelle / In Cauda Venenum, Rïcïnn), Thomas Crémier (batterie / ex-Laniakea, Avalanche, ex-Hurakan) et Elise Masliah (guitare). Psygnosis sort son premier album, "Anti-Sublime", en autoproduction en Janvier 2012, suivi de "Human Be[ing]" en Mars 2014, de "Neptune" en Mai 2017, et de "Mercury" en Septembre 2023 chez Season Of Mist.

Discographie :

2009 : "Phrases" (EP)
2012 : "Anti-Sublime"
2013 : "Sublimation" (EP)
2014 : "Human Be[ing]"
2015 : "AAliens" (EP)
2017 : "Neptune"
2023 : "Mercury"


Les chroniques


"Mercury"
Note : 17/20

Si vous avez eu un Amiga dans votre jeunesse, le nom de Psygnosis vous rappellera systématiquement une boîte de développement de jeux vidéo, mais ce n'est pas d'elle dont nous allons parler aujourd'hui. C'est plutôt au groupe français du même nom qui nous allons nous intéresser puisque ce dernier sort son sixième album "Mercury". Et c'est toujours aussi difficile à classer et toujours aussi exigeant, ce qui tombe bien puisqu'on aime bien ça par ici !

Si la musique du groupe était déjà très forte en ambiances et a toujours été influencée en partie par les bandes originales de films, cela s'est encore accentué avec la sortie de "Neptune" en 2017 qui voyait le groupe abandonner le chant et partir en instrumental complet. C'est donc toujours le cas sur "Mercury" et rien qu'en voyant la durée des morceaux, on sait qu'on va avoir droit à un sacré voyage puisqu'on se situe entre neuf minutes pour les morceaux les plus courts et quinze minutes pour le plus long ! Pour ceux qui seraient passés à côté du groupe jusqu'à maintenant, disons que vous allez y trouver du metal progressif, des sonorités modernes proches du djent, des orchestrations épiques et dignes de bandes-son de films et pas mal d'autres choses qui viennent se greffer suivant les besoins. Inutile de dire que les ambiances sont reines chez Psygnosis même si le groupe sait aussi durcir le ton et balancer de bons gros riffs bien gras ou du blast. D'ailleurs, en parlant de riffs et de batterie, "Mercury" est le premier album qui permet d'entendre Elise Masliah aux guitares et Thomas Crémier à la batterie, même si aucun des deux ne peut être qualifié de nouvel arrivant pour autant puisque présents depuis 2018. Et des blasts on en prend très vite dans les dents avec "Öpik Oort" qui ouvre l'album avec déjà douze bonnes minutes et des ambiances spatiales en guise de comité d'accueil. Le violoncelle de Raphaël Verguin amène une petite touche plus chaleureuse et enrichit une fois de plus des ambiances déjà bien affirmées, ce qui confirme d'ailleurs que remplacer le chant par le violoncelle était une bonne idée. En tout cas, cela va bien à Psygnosis qui arrive à créer une musique très évocatrice au point que des images nous viennent spontanément en tête à l'écoute de "Mercury".

On sait que l'instrumental n'est pas un exercice facile puisque le chant qui peut servir de point d'accroche n'est pas là pour rattraper la casse en cas de baisse de régime. Psygnosis arrive à le tenir sur près d'une heure et ne subit pas le moindre passage à vide, les mélodies et les ambiances qu'elles créent nous happent du début à la fin et ce nouvel album prend vite des allures de faille spatio-temporelle. Il y a un équilibre très bien géré dans la musique du groupe entre des parties brutales et dures qui riffent et blastent (il paraît que ces verbes n'existent pas et que je fais n'importe quoi avec la langue française, mais bon ça reste entre nous hein) sévère d'un côté et ces mélodies aériennes, mélancoliques et spatiales de l'autre. L'un ne prend jamais le pas sur l'autre et peu importe les sonorités utilisées, elles ont toutes leur place et servent le propos, ce qui n'est pas rien quand on sait à quel point la musique de Psygnosis peut être riche et variée ! "Eclipse" calme d'ailleurs un peu le jeu et propose un rythme plus mid et des mélodies là encore très mélancoliques même si des blasts trouvent le moyen de se faire une petite place. Cette capacité à frapper là où on ne l'attend est évidemment une des forces du groupe, amplifiée d'ailleurs par la richesse et la variété de ses influences. "Sunshine" enfonce d'ailleurs le clou avec un mélange entre cette guitare en son clair tout en finesse et ce violoncelle qui amène une fois plus une chaleur et une humanité qui rendent ce très beau morceau poignant. Il s'en dégage une sorte de tristesse confortable, on ne se sent pas heureux mais chez soi quand même, comme si l'habitude en avait fait notre foyer. Le véritable tour de montagnes russes est évidemment le dernier pavé de l'album, "Uranometria", avec son quart d'heure qui nous emmène visiter toutes les facettes de Psygnosis pour un final aux allures d'apothéose.

Alors oui, il faut un minimum d'ouverture d'esprit et s'investir dans l'écoute puisque cette musique est exigeante, mais justement ! Combien de personnes se plaignent en disant que le metal est mort, que personne n'innove, que tout le monde ressort les mêmes schémas ? Voilà un groupe qui en sort et qui crée son monde d'album en album, qui tisse sa toile tout seul dans son coin sans faire de vagues. Allez jeter une oreille attentive sur "Mercury" (et le reste de la discographie tant que vous y êtes, il y a de quoi faire !) et profitez de ces ambiances poignantes, épiques et évocatrices. Psygnosis fait partie de ces rares groupes qui ont une patte immédiatement reconnaissable et qui cherchent à faire les choses à leur façon, ce serait quand même dommage de passer à côté !


Murderworks
Octobre 2023




"Neptune"
Note : 17/20

Je vous ai déjà parlé de Psygnosis, ce groupe de metal français qui a un ordinateur pour batteur et qui a troqué son chanteur contre... un violoncelle ! Après nous avoir donné un premier aperçu de cette nouvelle formule avec l'EP "AAlien", voici que le groupe enfonce le clou avec ce copieux album intitulé "Neptune". Comme je le disais dans la chronique de "AALien", ce changement de cap m'avait laissé assez sceptique sur le moment. Le groupe saura t-il effacer mes doutes avec ce nouvel album ?

En premier lieu, je tiens à souligner, une fois encore, le superbe travail graphique effectué par Okiko qui représente le majestueux dieu des océans entouré de monstrueuses créatures marines. Tout en conservant une grande cohérence picturale, chaque pochette du groupe est une nouvelle petite claque visuelle. Chapeau l'artiste !

Mais entrons à présent dans le vif du sujet : cet album est-il une déception ou une réussite ? Clairement c’est la seconde option qui l’emporte cette fois. En effet, si l'intégration du violoncelle m’avait semblé parfois maladroite dans "AAlien", j'ai ici l'impression que la nouvelle formule du groupe est beaucoup mieux maîtrisée. En effet, dans cet album, la partition du violoncelle ne nous donne pas l'impression de chercher à combler l'absence d'un chanteur. La dimension purement instrumentale est pleinement assumée bien que la recette de base du groupe soit pourtant restée inchangée.On retrouve ce son moderne très froid à la Hypno5e ou à la Gojira avec des passages tantôt aériens, tantôt très lourds, dans une écriture post-metal qui alterne entre longues accalmies introspectives et explosions de violence déstructurées. On retrouve aussi l'utilisation de samples narratifs ; en russe dans "Phrase 7" (dont le titre marque la continuité avec les précédents albums du groupe) ou en anglais dans "Psamathée" et "Sünyatã".

A propos des titres, on pourra s'étonner de voir qu'entre références mythologiques ("To Neptune", "Psamathée") ou bouddhistes ("Sünyatã", "Nirvana"), un des morceaux de l'album a été baptisé "Psygnosis Is Shit". Ce très beau morceau n'a pourtant rien à envier aux autres. Alors, pourquoi un titre aussi... merdique ? On trouvera la réponse en visionnant le clip humoristique qui lui est associé, dans lequel on assiste aux tribulations du groupe qui semble destiné à ne jamais avoir de batteur. Le but étant ici de faire un petit pied de nez à leurs détracteurs tout en faisant intervenir différents grands noms de la scène française tels que Franky Costanza, Kevin Foley, Kévin Paradis, et bien d'autres.

Musicalement, l'utilisation du violoncelle dans cet album apporte souvent une dimension mélodique et mélancolique à la musique du groupe, rappellant parfois les morceaux les plus réussis d'Apocalyptica. Cependant, celui-ci n'est pas toujours mis au premier plan et peut aussi être utilisé en nappe mélodique d'arrière-plan, en soutien rythmique ou encore dans une optique plus "bruitiste" avec, par exemple, des grincements de cordes. On relève aussi l'excellente utilisation des sons de piano et de synthé dans la partie centrale de l'album avec les très beaux "Storm", "To Neptune" et "Mûe".

Avec neuf titres d’une durée moyenne supérieure à huit minutes, "Neptune" est un album qui prend son temps pour nous proposer un voyage dépaysant et envoûtant. La dimension ambiante et progressive des morceaux y est très bien gérée. Un bémol en revanche : je trouve que plusieurs petits passages en blast beat ne collent définitivement pas avec cette nouvelle formule. Tout d'abord, si le blast perd de son intérêt en étant joué par un ordinateur, il en perd d'autant plus quand il n'est pas associé aux hurlements d'un chanteur. De ce fait, ces parties de batterie m'apparaissent souvent excessives dans cet album et ne parviennent pas à créer un véritable climax dans la musique du groupe. Mon autre réserve sur cet opus vient du dernier morceau, "Nirvana", qui n'apporte pas grand-chose de plus à l'album et propose une conclusion abrupte que je trouve décevante. Le titre précédent, "Sünyatã", aurait fait, selon moi, un final beaucoup plus satisfaisant.

Malgré ces quelques frustrations, ce "Neptune" regorge néanmoins de très bons passages et parvient, à travers plus de 75 minutes de musique, à nous proposer un ensemble de morceaux à la fois variés et cohérents. Comme je le disais, l'exercice s'avère, dans l'ensemble, bien réussi, avec un album à la fois prenant et très original. Bravo !


Zemurion
Juin 2017




"AAliens"
Note : 15,5/20

Suite au départ de leur chanteur, les Français de Psygnosis ont annoncé, il y a peu, que celui-ci serait remplacé... par un violoncelliste ! Eh oui, après plusieurs apparitions en tant que musicien invité dans les précédents albums, Raphaël Verguin devient membre à part entière et occupe dans ce nouvel EP une place prépondérante. Uniquement disponible au format numérique ou en édition vinyle limitée, "AAliens" marque une volonté de dévoiler le nouveau visage du groupe avant le prochain véritable album. On retrouve ici une démarche identique à celle qui avait motivé la parution de l'EP "Sublimation" qui avait permis de présenter un nouveau chanteur avant la sortie de l'album "Human Be[ing]".

Dès les premiers abords, les Mâconnais de Psygnosis nous montrent qu'ils ont toujours le souci du travail bien fait. En effet, le groupe nous en met tout de suite plein les orbites avec un visuel de toute beauté qui assure la continuité avec l'univers épique et futuriste développé par l'artiste Okiko dans les précédents opus. On retrouve même certains éléments graphiques présents dans "Human Be[ing]" et "Sublimation" traités ici dans un coloris bleu / vert du plus bel effet. Pour accompagner le plaisir des yeux, Psygnosis tient aussi à choyer nos oreilles avec une très bonne qualité de production, ce qui apparaît de très bonne augure pour l'album en préparation.

Mais laissons là l'emballage et penchons-nous sur le cœur de la bête. Première déception : nous n'aurons droit ici qu'à deux morceaux, dont une nouvelle version de "FIIIX". Certes, la durée totale de 21 minutes est assez normale pour un EP mais on aurait tout de même pas craché sur un ou deux titres supplémentaires. L'EP débute par une version 3.0 du morceau "FIIIX". Ce titre n'a cessé d'évoluer au fil des changements musicaux intervenus dans le groupe et ses différentes versions apparaissent comme autant de jalons posés au fur et à mesure du chemin parcourus par Psygnosis. Dans cette version, le chant à laissé la place au violoncelle. Ou plutôt, le violoncelle tente de remplacer l'absence du chant. Raphaël reprend en effet la ligne de chant pratiquement note à note, si bien qu'on pourrait avoir l'impression d'avoir à faire à une reprise par Apocalyptica. Le problème étant que la mélodie ayant été initialement pensée pour le chant, il nous manque ici l'émotion portée par les paroles. Les extraits de films - qui contribuent en grande partie à forger l'identité du groupe - sont toujours présents, mais ils n'entrent plus ici en dialogue avec le texte chanté et perdent ainsi une part de leur intérêt et de leur force dramatique. Le morceau étant excellent à la base, il n'en devient pas pour autant mauvais, mais je lui préfère de beaucoup ses versions précédentes.

Composé spécialement pour cet EP, le second morceau démarre sur les chapeaux de roues. La dimension electro / ambiant développée dans "FIIIX" laisse place à une sonorité plus résolument metal malgré un long intermède mélancolique durant lequel le violoncelle viendra s'exprimer sur des arpèges de guitare. Passé cet intermède, la batterie (virtuelle) et les guitares s'emballent, mais le violoncelle a plus de difficulté à trouver sa place. Là où le chant très polyvalent de leur ancien chanteur pouvait facilement passer du registre mélodique à un registre très extrême, l'utilisation du violoncelle ne semble ici pas permettre un tel grand écart, ce qui finira par nuire à l'efficacité du morceau.

Au final, malgré un travail qui reste de grande qualité, les deux morceaux proposés dans cet "AAliens" ont du mal à nous convaincre de la pertinence de ce virage instrumental opéré par le groupe. Espérons simplement que l'album à venir réussira à démentir cette impression.


Zemurion
Novembre 2015




"Human Be[ing]"
Note : 19,5/20

Amis mélomanes avides d’expériences transcendantales, prenez place ! Approchez-vous, vous qui dormiez au fond de la classe lors des cours de philosophie au lycée, car aujourd’hui nous parvient le dernier album en date de Psygnosis : "Human Be[ing]", sorti le 26 Mars dernier, sous la coupe promotionnelle de Dooweet !...

Voici donc que le quatuor français nous revient après la vibrante sortie de son premier album, "Anti-Sublime" (2012) ainsi que d’un EP, "Sublimation" (2013), les mains chargées de ce nouvel opus, totalisant à lui seul, près d’une heure d’écoute, habilement répartie sur 7 titres tous plus affûtés les uns que les autres... Accéder au contenu ainsi proposé par les 4 comparses passera avant tout par un important travail (signé Okiko) de réflexion, d’imagination visuelle, tant les graphismes enrobant l’opus se révèlent opaques et laissent transparaître cet univers qui nous tend alors les bras, sous les dehors d’une figure à la fois simple et torturée derrière cette clarté un rien rouillée, oscillant entre un "The Satanist" (Behemoth), un "God Is An Automaton" (Sybreed) et un "Koloss" (Meshuggah) !...

Ainsi franchie cette première porte, voici que l’auditeur sera irrésistiblement happé par le premier titre de "Human Be[ing]" : "Phrase 6", impulsion de départ pour ce qui s’apprête à devenir un poignant tour de force ambiant... Présenté à l’auditeur par ses mesures d’introduction instrumentales à la fois ambiantes et tortueuses, ce titre s’ouvrant sur un angoissant monologue, verra sa complainte sublimée par une explosion de riffs aussi lourds que détonants et dissonants, d’inspiration moderne, parfois empreinte de certaines lignes deathcore. Articulé autour un grésillant discours scientifique d’archives sur "le progrès télévisuel et ses conséquences", le morceau se verra conférer un tout nouveau relief, une profondeur qui imprégnera l’auditeur tout le long de cette exploration musicale que sera la découverte de "Human Be[ing]" ! Sortant des tréfonds du titre, les rythmiques syncopées, structurées par les très habiles riffs et dissonances continueront, à l’aide d’un incroyable blast (aux alentours de la 5e minute) de coller à la peau de quiconque s’aventurera dans cet univers aussi ténu qu’est celui des Psygnosis... ! Poussant l'expérimentation jusqu’à son plus haut degré d’immersion, le dernier tiers dudit morceau proposera de tutoyer 2 ambiances aussi extrêmes que différentes, entre pont onirique souligné par quelques ornementations électroniques et regain final de lourdeur et de groove...

Les bases ainsi posées par ce premier titre mettront donc à nu la force et le talent du carré bourguignon: une apothéose d’ambiances toutes plus intenses les unes que les autres, chevillées tout en puissance, entre-elles, comme c’est le cas entre "Phrase 6" et "Resurrection", le second titre proposé par la formation. Et c’est, là aussi, dès les premières lignes mélodiques, que ces ambiances ciselées feront ainsi germer au creux des tympans d’un auditoire maintenant captivé, l’éclatant parallèle mêlant le style nerveux et extrême concrètement empreint d’un astucieux mélange entre deathcore, black et djent de Psygnosis, à celui des maîtres en matière d’atmosphères: Gojira ("From Mars To Sirius" par exemple)... Toujours entrecoupé de pistes audio archivées, ce nouveau morceau sera ainsi l’occasion de prendre la pleine mesure des talents de Yohan Oscar (chant), à la voix ample et maîtrisée, proposant cleans, mids et growls d’une rare intensité, enchevêtrés au coeur des fracassantes lignes rythmiques de Jeremy Tissier (basse)... Un batteur manquant à l’appel, ce dernier sera rejoint par les batteries programmées de Rémi Vanhove, n’altérant en rien la lecture de cette musique à l’âme profondément vivante et vibrante.

Suivant de près son prédécesseur, voici le trosième titre, "Lost In Oblivion", ouvrant sur le monologue de Philippe Nahon dans le film Seul Contre Tous, grâce auquel l’atmosphère n’en deviendra que plus pesante et pénétrante à mesure que l’accablant constat sur la solitude résonne dans le morceau. Rebondissant sur un phrasé et des rythmes plus hachés, résolument plus extrêmes et accrocheurs, l’angoisse quasi philosophique dont cet opus est imbibé vient alors à prendre l’auditeur aux tripes, renforcé par les nouveaux coups d’éclat d’une basse claquée et martelante, mais aussi par d’aériens shreds savamment posés par Anthony Mouchet et Remi Vanhove (guitares). Vient alors le couple "Sil∃nt" (part.1 et 2) rivant une nouvelle fois le clou atmosphérique déjà bien présent, et arrachant de la façon la plus intuitive qui soit, l’auditeur à sa suffocation. Fondant sur un discours on ne peut plus cathartique, excitant les plus vifs instincts, les plus indomptables des pulsions humaines, ce titre trouvera toute sa pureté en son écho classique : "Sil∃nt (part.2)", posé avec brio par Raphael Verguin (violoncelle), apportant un éclat à la fois abyssal et aérien à ce titre qui résonnera au plus profond des entrailles de cet univers ultra-sensibilisé...

C’est finalement au tour du diptyque "Δrowning" / "Hurricane" de nous parvenir, un duo aussi rageur qu’envoûtant, à écouter les yeux fermés, pour se laisser bercer, charrier par cette fulgurante complainte proposée par le quatuor... S’adressant de façon très ciblée, à une génération aujourd’hui en pleine prise de conscience, les quelques références électroniques à "Mortal Kombat" verront leur violence se prolonger d’"Δrowning" à "Hurricane", ultime piste torpillant par ses dissonances et ses saturations, la sensibilité alors laissée à fleur de peau par les 6 morceaux précédents, expulsant, à la façon d’une brillante libération mélodique (empreinte au lexique moderne d’extrêmes dérivés de la scène black / death / deathcore), son auditoire.

Synthétisant à la perfection ambiance et violence, dire que nous avons affaire à un chef d’oeuvre en présence de "Human Be[ing]" est donc loin d’être un euphémisme tant la maturité qui le compose se doit d’être mise en avant !... Il s’agit bel et bien d’un opus qui ne laissera pas indifférent (tant les fans de Cult Of Luna que de Decline Of The I), s’adressant à toutes les strates de nos sensibilités respectives, par le biais de vibrantes ambiances, d’atmosphères toutes plus soigneusement découpées les unes que les autres. Cet album enlace l’auditeur, l’enserrant dans une introspective camisole mélodique, muselant et exacerbant ses sens à la fois, et proposant la plus vive des élévations musicale au travers de passages tantôt angoissants, tantôt libérateurs.

Rares sont les projets d’expérimentations aussi extrêmes que celui-ci, mais la réussite ne peut qu’être constatée, au point d’en oublier le détail de l’absence de batterie "physique", tant la torpeur dans laquelle ce dernier vous laisse est puissante !... Amis lecteurs ne réfléchissez plus, Psygnosis se place, avec "Human Be[ing]" en incontournable force vive de la scène émergente pour ce millésime 2014 !...


E.L.P
Avril 2014




"Anti-Sublime"
Note : 15/20

Trois ans après le EP "Phrases", favorablement reçu par la presse, Psygnosis nous revient en forme avec un premier album "Anti-Sublime". A la première écoute, le style est particulier et peut surprendre, les influences étant nombreuses. Il m’en faudra d’ailleurs plusieurs avant de m’imprégner de leur univers et de l‘apprécier à sa juste valeur. Mais quel est donc cet OMNI (Objet Musical Non Identifié) qu’est "Anti-Sublime" ?

L’album démarre avec "Phrases 2.11", comme un rappel à leur précédent EP à travers le titre, sur une intro guitare / basse teintée d’indus accompagnée d’un extrait vocal du film Pulp Fiction (en français) que l‘on entendra également plus tard sur cette piste, longue de plus de 10 minutes. On enchaîne avec un chant death, le son de basse ressort énormément sur ce titre, alternant entre un côté death metal, et des passages plus expérimentaux, la double pédale est bien présente. Le ton de l’album est donné dès le début, c’est varié, les styles se mélangent, l‘ambiance se veut tantôt teintée de death et un peu plus rapide par moments, tantôt plus expérimentale voire atmosphérique en deuxième partie de morceau avec arrivée d‘un chant plus clair. La piste suivante, "Compression", se veut plus brutale, démarre sur un chant growlé, aux influences plus death metal. Petit moment d’accalmie ensuite sur un passage plus atmosphérique avec un chant clair, ça martèle à la batterie. Le son n’y est toutefois pas excellent sur celle-ci, on ressent la présence de la boîte à rythme parfois. S’ensuit un nouveau sample de film, tiré de Fight Club cette fois, puis ça évolue à nouveau entre un metal un peu indus’ et deathcore.

Sur "FIIX", l’ambiance se veut un peu plus electro, un titre qui tranche avec le précédent. Retour au chant clair, un morceau très intéressant, qui progresse peu à peu vers un tempo plus rapide, un chant hurlé. Petite interlude cinématographique avec un nouveau sample sur une voix féminine, extrait de Pierrot Le Fou de Jean Luc Godard. Les solos et riffs de guitare sont travaillés et se multiplient pour terminer cette piste sur un chant clair, et un nouveau sample du film, sur une voix masculine ici. A noter toutefois le léger manque de justesse au niveau du chant, l’anglais étant à travailler un peu afin de corriger la francisation trop présente au niveau de l’accent. Sinon un très bon titre, l‘un des meilleurs de ce "Anti-Sublime".

On continue avec "Default Dysfunction" sur une très belle intro au piano et des sonorités indus accompagnées d’un chant clair, dont on relèvera ici encore un accent un peu trop à la française, l’articulation étant toutefois appréciable quant à la compréhension des paroles, mais peu importe, ce n’est qu’un détail qui pourra être corrigé avec le temps. On enchaîne sur des parties plus rapides, et un chant plus death, mêlé à des sonorités un peu electro et des éléments indus. La basse est ici assez présente. L’absence de batterie se fait ici encore ressentir au profit d’une boîte à rythme, ça blaste tout de même un peu, c’est efficace, mais on aurait quand même apprécié un vrai son de batterie. Chose que l’on ne leur reprochera pas, puisque étant visiblement un choix de la part du groupe, on respecte. Un autre sample vocal tiré cette fois du film Identity sert une nouvelle fois d’interlude en milieu de piste, avant d’achever ce "Default Dysfunction" par un chant clair sur fond de musique ambient. "Wake Up" est le titre le plus court de l’album (à peine 4 min 47 contre 8 minutes minimum pour les autres). Une piste beaucoup plus lente et dans sa majeure partie instrumentale, aux ambiances expérimentales et atmosphériques, au cours de laquelle apparaît un nouvel extrait vocal samplé tiré de Donnie Darko.

La piste suivante, "Liquid Nebuula", est quant à elle la plus longue de l’album, plus de 15 minutes. Tranchant avec la piste précédente, elle se veut un peu plus violente et efficace que "Wake Up", les sonorités death notamment au niveau du chant growlé et les riffs / solos de guitares sonnent plus metal. Un sentiment froid et glacial, à travers les ambiances atmosphériques et lentes, teinté tout à la fois d’agonie et de désespoir de par les hurlements et "bruitages" humains, se fait ressentir au fur et à mesure que le titre progresse. La boîte à rythme est toujours présente, des éléments indus’ et expérimentaux avec le chant clair se mélangent ici et là, parachevant sur une ambiance plus calme et reposante. Sur ce dernier morceau, enfin, des samples tirés de La Societé du Spectacle, film de Guy Debord tiré du livre du même nom, ainsi qu’un extrait de discours de Youri Gagarine, prennent également place sur cette piste. "Loozing Zeppelin" fait office de titre bonus sur la version digipack de l’album sortie en Août dernier. Le violoncelle apparaît dès l’intro sur ce titre à l’ambiance beaucoup plus calme et aérienne, autour d‘un chant clair associé à des passages au chant féminin, rendant le tout plus atmosphérique et mélodique, mêlé à une sorte d’ambiant metal au chant hurlé et dépressif. Superbe morceau dégageant une certaine intensité pour clore cet album.

Psygnosis sort des sentiers battus, et nous le prouve ici avec "Anti-Sublime". Un groupe qui nous a fait partager, voire découvrir pour ma part grâce à cette chronique, son univers aussi original qu’intéressant, nécessitant toutefois plusieurs écoutes pour bien le cerner et s’imprégner de leur musique si particulière et riches en éléments variés, puisés dans un peu tous les styles possibles et imaginables. Ainsi le metal industriel a su se mêler à un son plus ambient voire expérimental, le tout saupoudré d’un peu de death metal teinté de deathcore, allié à des ambiances atmosphériques. Les intrusions de samples vocaux cinématographiques y sont nombreuses, on pourrait se demander ce qu’ils viennent faire ici, mais ça fait aussi partie du "charme" de ce "Anti-Sublime" si je puis dire. Un mélange parfois un peu fragile et encore un peu perfectible, qui sera sans doute corrigé sans grandes difficultés avec le temps, mais plutôt réussi et cohérent. Une prise de risque quant au concept de leur musique que l’on ne peut que saluer. En définitive, un bon album que je conseille à tous les curieux désireux de nouvelles découvertes musicales, à condition d’avoir une certaine ouverture d’esprit de ce côté-là.


Alexandra
Décembre 2012


Conclusion
L'interview : Le groupe

Le site officiel : www.facebook.com/psygnosismusic