Le groupe
Biographie :

Porta Nigra est un groupe de black metal allemand formé en 2010 et actuellement composé de : O. (batterie, chant / Chaos Invocation, Membaris, Obscure Infinity, Apocryphal), Gilles de Rais (guitare, basse / ex-Membaris), Tongue (chant / Ave Maria, Chaos Invocation, Crescent) et Jöschu Käser (batterie / Aara, Forgotten Tomb, Ghörnt, Grusig, Macabre Idolatry, Malphas, Taubrą, Temple, Thron, ex-Chimæra, ex-Asgard, ex-Chotzä, ex-Nornír, ex-The True Incest). Porta Nigra sort son premier album, "Fin De Siècle", en Novembre 2012 chez Debemur Morti Productions. Le deuxième album du groupe, "Kaiserschnitt", sort en Mars 2015, toujours chez Debemur Morti Productions. "Schöpfungswut" sort en Janvier 2020 chez Soulseller Records. "Weltende" sort en Juillet 2023, toujours chez Soulseller Records.

Discographie :

2012 : "Megalomaniac" (EP)
2012 : "Fin De Siècle"
2015 : "Kaiserschnitt"
2020 : "Schöpfungswut"
2023 : "Weltende"


Les chroniques


"Weltende"
Note : 16/20

En 2020, Porta Nigra avait encore surpris son monde avec "Schöpfungswut" qui revenait à un black metal plus direct et plus brutal, une voie que suit le nouvel album "Weltende" qui évoque la guerre dans tous ses détails les plus sombres et sales. Attendez-vous donc à vous faire agresser les sens une fois de plus car ce nouvel album, s'il se montre toujours varié et riche, ne va montrer aucune pitié pour autant.

"Es Ist Krieg" ouvre l'album avec un titre qui ne souffre d'aucune ambiguïté et même si le début du morceau est glauque et tout en discrets accords dissonants, la guerre en question ne tarde pas à nous exploser en plein visage. Les blasts débarquent et nous pilonnent sans la moindre pitié et le black metal de Porta Nigra se fait intense et brutal. La noirceur est évidemment de la partie et les riffs sont glauques à souhait, parfois dissonants mais toujours sales. Quelques tapis de double grosse caisse viennent nous briser la nuque entre deux rafales de blasts et ce premier morceau fait honneur à son titre, c'est vraiment la guerre et on en prend déjà plein la gueule ! En plus de tout ça, les mélodies qui se font entendre en fin de morceau posent une ambiance désespérée du plus bel effet qui colle parfaitement avec le thème abordé. "Götterblut" se fait presque groovy malgré là encore de multiples explosions de violence, les passages mid-tempo poussent au headbanging et la double grosse caisse trouve ici aussi de quoi se faire entendre. Pareil pour "Völkerbrand" qui se fait lui aussi plus groovy et fait même entendre une urgence venue tout droit du punk, de quoi trancher avec le black metal pur et dur et confirmer que Porta Nigra a plus d'une façon d'exprimer la violence. Quelques claviers viennent poser une ambiance plus noire et plus sombre sur un break plus mid-tempo, de quoi ajouter une couche de désespoir et de noirceur à un album qui n'en manquait pourtant pas ! "Verlorene Paradiese" ajoute encore des surprises avec des structures plus tortueuses et pas mal de cassures rythmiques, pour le reste des leads très froids typiques du black metal se chargent de faire descendre la température en dessous de zéro.

Si Porta Nigra continue sur la voie d'un black metal plus brutal et direct, il n'oublie pas pour autant ses velléités expérimentales et se permet des incursions dans d'autres styles extrêmes, place des passages plus groovy, joue avec les ruptures de ton et pose des ambiances bien marquées. "Weltende" ne part jamais aussi loin dans l'expérimental que "Kaiserschnitt" ou "Fin De Siècle" par exemple mais garde tout de même cette patte imprévisible bien connue chez Porta Nigra. Ce groupe a toujours réussi à être atypique tout en gardant ses racines black metal, le tout grâce à une ouverture vers d'autres formes d'expression extrêmes et une envie de ne pas faire le moindre compromis. Le morceau-titre cristallise bien tout ça avec ses sept minutes et ses multiples changements de ton et le nombre d'influences qui s'y font entendre, du black le plus brutal à des sons étranges sortis de claviers possédés sur fond de mid-tempo glauque. "Hora Mortis" qui ferme l'album mérite aussi d'être mentionné pour ses ambiances plus dramatiques et épiques à la fois, là encore étirées sur près de sept minutes et posées sur un mid-tempo qui sent la mort et le désespoir une fois de plus. Comment mieux terminer un album centré sur les horreurs de la guerre qu'avec un morceau pesant, noir et suintant la tristesse et évoquant la fin de tout ? Contrairement aux habitudes des groupes de black pur et dur, le son est aussi gros et puissant et Porta Nigra évite le cliché des guitares tranchantes enregistrées sur le magnétophone transmis de génération en génération, en même temps il n'y est jamais tombé et il aurait été surprenant que "Weltende" souffre d'une production approximative.

Porta Nigra revient donc avec un album certes axé sur un black metal violent et direct mais n'oublie pas ses envies d'expérimenter et se permet quelques petites surprises bien placées qui donnent une personnalité à part à "Weltende" et confirment que ce groupe n'entrera jamais dans la moindre case. Un minimum d'ouverture d'esprit sera demandé à l'accueil mais l'intensité et la noirceur de ce nouvel album le rendent relativement accessible aux amateurs de black metal plus classique.


Murderworks
Septembre 2023




"Schöpfungswut"
Note : 17/20

Je vous avais parlé des Allemands de Porta Nigra en 2015 pour la sortie de leur deuxième album, "Kaiserschnitt", qui marquait une rupture avec son feeling très rock et rentre dans le lard par rapport au dark metal très Bethlehem de "Fin De Siècle". Ce groupe versatile est donc cette fois de retour avec son troisième album, "Schöpfungswut", et comme vous devriez vous en douter, il y a encore des surprises au menu !

"Die Kosmiker" qui ouvre l'album annoncé d'entrée un retour vers un black metal plus traditionnel avec les guitares tranchantes et les blasts associés à des ambiances froides ou guerrières. Sachant que la plupart des morceaux tournent autour des huit ou neuf minutes vous comprendrez bien vite que Porta Nigra n'est pas tombé pour autant dans le bourrinage intensif et que la nuance a encore son mot à dire. Malgré ça, ce nouvel album se montre tout de même bien plus virulent que son prédécesseur et le black metal pur et dur reprend ses droits pendant ces quarante-sept minutes. On sent régulièrement un souffle épique à travers les mélodies et le caractère belliqueux de l'ensemble est incontestable vu à quel point le rythme est soutenu tout du long. "Das Rad Des Ixion" décide vous prendre aux tripes avec des mélancolies mélancoliques et froides qui frappent en plein cœur ! Si le précédent album paraissait barré et expérimental, ce nouveau méfait est clairement ancré dans la grande tradition du black metal mélodique et rageur. Je ne sais pas ce qu'ils ont mangé chez Porta Nigra mais cette fois ils ont envie d'en découdre et si les mélodies ne sont jamais malsaines ou dissonnantes, la rage se fait en revanche bien plus présente. La longueur des morceaux ne fait d'ailleurs que décupler leur intensité et ce troisième album va vous laisser sur les rotules tant il ne vous laisse pas beaucoup de place pour respirer. Le talent de composition de Porta Nigra fait toutefois son œuvre et le groupe sait lever le pied quand il faut pour apporter un peu de vie et de profondeur à ses morceaux. Si l'ensemble est plus classique, direct et proche du black metal pur, le groupe n'a rien perdu de sa personnalité et de sa capacité à frapper là où ça fait mal.

Une fois de plus, le groupe nous surprend donc et semble bien décidé à ne jamais faire deux fois le même album. Je ne sais pas si c'est le fait que j'aimais beaucoup ce groupe ou que les deux sont allemands mais certaines mélodies m'ont rappelé les excellents Lunar Aurora, à moins que ce ne soit plutôt cette mélancolie présente dans la plupart des mélodies de ce nouvel album. C'est encore plus flagrant sur le morceau-titre qui clôt l'album et qui ne fait pas de prisonniers d'ailleurs. Je pense que la première écoute va surprendre pas mal de monde tant cette rage et cette intensité sont inattendues au vu de ce que proposaient les deux premiers albums. C'est bon signe et cela prouve que Porta Nigra en a sous le pied en plus d'être à l'aise dans pas mal de registres différents. Le chant clair fait encore quelques discrètes apparitions mais les voix sont presque toujours multipliées pour en faire des choeurs qui tiennent plus du chant de guerre que de la douce mélopée. Si j'ai précisé au début de cette chronique que le groupe ne tombait pas dans le bourrinage intensif, il impose tout de même un bon pilonnage en règle et les blasts sont très présents sur ce nouvel album. C'est vraiment le sens mélodique de ces Allemands qui leur permet d'avoir cette profondeur et de nous retourner l'estomac du début à la fin. La rage côtoie une forme de désespoir ici et la mélancolie que dispense "Schöpfungswut" vous glace autant le sang qu'elle vous secoue les tripes.

Un nouvel album surprenant par sa brutalité et sa froideur mais qui frappe en plein cœur et qui confirme le talent de Porta Nigra. Il aura fallu quelques années pour que le groupe donne un successeur à "Kaiserschnitt" mais ça en valait largement la peine !


Murderworks
Février 2020




"Kaiserschnitt"
Note : 15/20

Deuxième album pour les Alemands de Porta Nigra qui ont déjà fait parler d'eux avec leur "decadent dark metal " comme ils l'appellent eux-mêmes. "Kaiserschnitt" succède donc à "Fin De Siècle" sorti en 2012 et déjà chez Debemur Morti.

D'entrée de jeu, "Die Mensur" nous montre un Porta nigra un peu plus nerveux que sur le précédent album, avec un dark metal aux relents orchestraux, toujours surmonté de quelques discours en allemand et d'un côté dissonant ou décadent donc. La suite montrera un visage bien plus martial et guerrier dans l'âme, relayant loin les forts relents de Bethlehem que l'on pouvait entendre sur "Fin De Siècle". Globalement, tout l'album est loin d'être aussi froid que son grand frère, "Kaiserschnitt" se montre bien plus direct et par conséquent moins varié. Une approche qui colle au concept de l'album mais qui risque d'en décevoir quelques uns, on ne pourra pas reprocher au groupe de ne pas prendre de risques et de répéter une formule précédemment établie. Approche plus directe qui se ressent aussi sur la longueur des morceaux qui n'ont plus tendance à taper régulièrement dans les 7 minutes, Porta Nigra a cette fois opté pour une musique plus concise. Les soli de guitare sont bien plus nombreux aussi sur ce nouvel album, là encore de quoi faire hérisser les poils de certains. Il faut avouer que même si l'album ne révolutionne rien, il se montre tout de même déstabilisant, les ambiances étant à des lieux de celles présentées sur "Fin De Siècle". Ce nouvel album arbore un visage quasiment rock'n'roll dans l'esprit à plusieurs reprises, surtout dans les soli d'ailleurs. Forcément ça tranche avec les ambiances glaciales du premier album.

En dehors de ça, ce "Kaiserschnitt" tient la route même si on peut parfois déplorer quelques répétitions qui auraient pu ne pas s'éterniser. En fait, toute la folie dépressive qui habitait "Fin De Siècle" a disparu, même le chant se fait plus conventionnel, qu'il soit typiquement black ou clair avec des chœurs qui pourraient presque rappeler le Bathory viking. La musique du groupe se fait cette fois plus simple, basique, frontale sans pour autant être spécialement violente. Le déluge de blasts et l'agressivité outrancière n'ont jamais été les propos du groupe, mais cette fois la musique de Porta Nigra n'est pas aussi fine et subtile que sur "Fin De Siècle". Le concept de l'album porte sur la première guerre mondiale et on comprendra aisément cette approche plus crue avec cette information en tête. Les rythmes sont plus martiaux, les riffs plus simples et directs, les mélodies moins dépressives et oppressantes, et le tout est moins lourd. La patte du groupe est toujours là mais l'ambiance a bien changé, ce qui prouve au moins que Porta Nigra a le souci de la cohérence. Pour ma part, je préfère le climat glacial de son prédécesseur, mais comme on dit les goûts et les couleurs hein...

Deuxième album qui risque de décevoir ceux qui aimaient le côté très froid et sombre de "Fin De Siècle", Porta Nigra ayant cette fois choisi une approche bien plus directe et crue délaissant par là même ses anciennes influences (Bethlehem en tête). Le groupe a des chances de perdre des auditeurs en cours de route, mais on peut au moins saluer la prise de risques.


Murderworks
Avril 2015


Conclusion
Le site officiel : www.facebook.com/portanigraband