A la fois extrêmement massif et épuré, le design du dernier album de Kehlvin paru sur Division Records dont les sorties déçoivent rarement, annonce en revanche quelque chose de sombre, de déréglé. Quand "This Is Mere Noise" s’abat sur les écoutilles via des enceintes appropriées (oui Kehlvin avec un son de PC portable ça n’a pas le même effet), on ne peut que se dire qu’on est parti pour cinquante minutes de hardcore qui pique, sulfureux, assourdissant.
Progressivement la tension monte, les cris répondent présents, et les paysages dépeints par les grattes paraissent si profondément enfouis qu’on s’imagine découragé avant de commencer à creuser. Bon ok, je m’enflamme un peu mais Kehlvin c’est ça. Un hardcore faisant vaciller l’oscilloscope de manière lente mais intense, nous emmenant alors dans la noirceur d’un univers que personne ne veut connaître. Et les titres s’enchaînent ainsi, plus intenses les uns que les autres, parfois frôlant du bout des cordes les limites de la lourdeur ("Troy Von Balthazar", "Why I Am Not") ou celle d’un noise-hardcore avec "Grady Robinson". Les hurlements se prêtent d’ailleurs merveilleusement bien à l’exercice de par leur puissance, leur déchaînement, leurs déchirements. La langue pendante, les Suisses nous laissent pourtant le temps de nous apaiser, bien que tout soit relatif, avec des morceaux comme "The Metaphysical Trout", "Melon Fucker" où les grattes se font plus tendres, la batterie un peu moins percutante, ou un côté mélodique un peu plus prononcé, avec cependant une ambiance générale inchangée ou presque. Notons d’ailleurs que le format des titres est plutôt long (jusqu’à neuf minutes) permettant au groupe d’installer comme il faut les ambiances souhaitées. Un titre court se détache, à la dynamique davantage burlesque, c’est "Whip This", 2 minutes 35 de chaos absolu !
Kehlvin a tout de même la sagesse de nous abandonner sur le titre-album qui se passe de commentaires mais qui, pour ne dire que ça, est un choix des plus judicieux. Je ne le vous cache pas cet opus reste chaotique mais moins que précédemment dans la construction des morceaux. Cela n’en fait pas pour autant un album facilement apprivoisable dès la première écoute et le plaisir est immense de s’attarder sur les morceaux plusieurs fois avant d’en comprendre le fonctionnement. Tout devient confus, les émotions se confondent, se superposent et on ressort la tête de l’eau comme hypnotisés. Replay.
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