Le début des années 90's est un âge d'or pour la plupart d'entre nous. Nos yeux étaient alors tournés vers la Floride, à l’affût des productions de Tom Morris, Scott Burns et nous nous gavions d'un genre incroyablement riche, sauvage et d'une esthétique redoutable : le death metal, aussi virulent que la peste allait contaminer la planète entière ! Difficile de résister... et pourtant dans ce même État d'Amérique, en 92, le groupe Floor pointait discrètement le bout de son nez en pratiquant un espèce de doom baveux, aux relents punk / hardcore inspiré des Melvins ou encore Eyehategod. Mauvais endroit au mauvais moment, il aura fallu bien du courage et de la ténacité à son fondateur Steve Brooks pour s'imposer... entre temps il aura formé Torche qui eu bien plus de reconnaissance. Floor ne surfe donc pas sur la vague stoner / sludge du moment, et après une flopée de splits, une séparation en 2003 et 2 albums, "Oblation" risque de sortir enfin le groupe d'une certaine confidentialité soutenu par le label Season Of Mist.
Les codes du sludge / doom sont respectés, à savoir un son hyper gras, baveux, lourd, en un mot "drone" sur des tempos majoritairement lents. Floor se démarque toutefois grâce au chant de son leader, aérien et planant à la manière de Mars Red Sky (en plus monocorde). Moins "brit-pop" que les Bordelais, Floor semble plus imprégné par les mélodies de la scène grunge et indie du début des 90's. Le premier titre éponyme de l'album annonce la couleur assez rapidement et déboule tel un troupeau de mammouths filmé au ralenti. La voix de Steve Brooks ne craint pas de se greffer sur cette masse gesticulante, malfamée et transcende le tout en une symphonie cro-magnesque éthérée. Floor s'amuse à placer de-ci de-là quelques breaks punk / core en prenant toujours soin de maintenir l'aspect mélodique rappelant le spectre pop / post-rock monolithique de Torche. Certains titres sortent du lot comme ce "Sister Sophia" à la mélodie entêtante et le très beau "Sign Of Aeth" qui sauvent parfois un ensemble répétitif. Car il ne s'agit pas simplement d'avoir trouvé une formule, un "truc" mais de faire de bonnes chansons, et on peut se demander si celles-ci ne sont pas engluées, prises en otage par ce son "drone" qui parfois les dessert.
Le trio américain, à la manière de Mars Red Sky, tire son épingle du jeu dans la grande famille du sludge / stoner en intégrant une certaine mélancolie propre à la pop la plus désenchantée. "Oblation" avec ses 15 titres respectant un format de 3 mn, est donc une curiosité à recommander pour les plus aventureux, les plus ouverts d'esprit. En tout cas, un pari réussi pour son leader Steve Brooks !
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