Le black metal allemand est aussi une scène relativement présente, même si elle n'a jamais eu une reconnaissance de style comme la norvégienne a pu avoir et a encore aujourd'hui, elle est là. Et Fallen Tyrant en fait partie depuis une petite demi décennie. Le premier album a vu le jour cette année et ça reste quelque chose de bien sauvage, brutal et raw. Enregistré live pour conserver cet aspect pur et sincère, ce premier album est en toute honnêteté un bon album. L'artwork est d'une beauté à faire pâlir les plus livides (même si l'intérieur est en deçà de l'extérieur), le trio Fallen Tyrant a bossé avec René Hofmann qui est vraisemblablement l'homme à tout faire du label, boss, réalisateur de l'artwork, il a également effectué l'enregistrement de celui-ci. En tous les cas, Fallen Tyrant s'offre avec "No World To Win, A Life To Lose" un album rustre mais puissamment bon.

On ne va pas tergiverser pendant des heures, c'est effectivement du black metal dans sa forme la plus primaire que joue Fallen Tyrant, avec des titres qui sont relativement longs (puisque "To Finnmarken" va presque toucher les huit minutes), mais surtout rapide, agressif et parfois brutal. Le groupe a su éparpiller ses idées sur papier pour faire en sorte que tout ne soit pas concentré en un même point et que l'auditeur puisse s'y retrouver dans cette brume lugubre. On a l'impression avec cet enregistrement live que le son est moyen, parce que les guitares sont un peu sourdes et que la voix est parfois loin, mais ça fait partie du charme et des qualités de cet opus finalement. On a la sensation d'être en concert face au groupe, sans avoir besoin forcément d'artifices modernes où trigg à gogo et effets inutiles viennent polluer la musique pour la rendre en fin de parcours plus ou moins sans saveur. Fallen Tyrant a compris que pour donner à son black metal qui prend par moments également des airs de black'n'roll bien roots et groovy ("Exaltation" pour ne citer qu'elle), une couleur unique, directe et proche de ce que le groupe peut donner en concert, il fallait faire comme ça. Et c'est réaliste, vraiment très réaliste, d'autant que pour du black metal ça donne encore plus de renforcement à cette atmosphère sombre. Une atmosphère qui conserve malgré tout sur la plupart des titres son côté conservateur de mélodies guerrières presque viking. C'est ce que l'on peut découvrir sur le titre "Bortrykkelsen" où la voix claire vient se mêler à celle gutturale aigue dans une parfaite entente et où les batteries du passage central (certainement un truc qui doit durer en concert) s'en donnent à cœur joie avant de repartir en furie sur la fin du morceau.

On sent que Fallen Tyrant sait écrire du black metal d'une manière intelligente. Et cette intelligence est aussi au service de l'aération. Comme on le soulevait plus avant, le groupe a su placer des titres qui mettent de l'espace entre les morceaux. Car il est vrai qu'on se prend les trois premiers sans rechigner, mais ça fait tout de même environ 17 à 18 minutes non stop. C'est là qu'intervient leur interlude de une minute pour repartir sur une longueur similaire. La deuxième partie de l'album est plus posée que ne pouvait l'être la première en jouant plus sur les mid-tempos pour créer l'environnement, un environnement malsain encore une fois, mais qui ne part pas forcément dans la brutalité rapide, et qui va chercher en fait plus des passages violents alternés avec ce fil conducteur mélodique peut-être caractéristique de la scène norvégienne après tout. Moralité, les presque huit minute de "To Finnemarken"passent comme une lettre à la poste quand il n'y a pas grève, d'autant plus que le mini riff de fin de titre avec ses envies Nokturnal Mortumiennes laisse pantois. "Godhate" domine son promontoire d'infamies que sont les autres titres par sa rage et sa hargne sans fin tandis que "Approach" sert de répit pour finir sur le titre éponyme de l'album. Un morceau qui nous rappelle que Fallen Tyrant garde en lui cette bestialité Mardukéenne qu'il recrache avec personnalité en rajoutant une once de mélodie barbare. Cet album est monstrueusement bon.C'est sûr.