Encore une découverte pour moi que ce Elderblood, groupe ukrainien à l'artwork pas forcément très avenant au premier abord... Les photos du groupe, quant à elles, nous plonge dans une black metal étonnamment très polonais. Mais quand j’apprends que ce groupe comporte des anciens membres de Nokturnal Mortum et que leur deuxième album "Messiah" est signé chez les excellents Osmose Productions et a été enregistré dans les mêmes studios que Khors, ma curiosité est piquée au vif ! J'ai particulièrement hâte de me plonger dans l'écoute des 7 titres qui composent l'album, même si je nourris avant tout une certaine appréhension. Faut-il se fier à la pochette ou plutôt aux photos ? Réponse dans ces lignes bien entendu...

On entre directement dans le vif du sujet avec "Thagirion's Sun" et son intro digne de Behemoth, ou presque ! Toujours est-il que ce début de morceau est très efficace, et particulièrement bien mis en valeur par le son lui aussi très polonais. Très vite, on s'aperçoit qu'on a plus affaire à un album de black / death metal que de black symphonique à proprement parler, ce qui, je l'avoue, m'enlève une sacrée épine du pieds ! Malgré tout, il y a ici et là quelques parties de clavier parfois dans la lignée d'un Dimmu, d'autres fois plus proches d'Emperor, mais toujours discrètes et utilisées à bon escient. En tout cas, ce titre est résolument accrocheur et on ne peut plus rentre-dedans, techniquement imparable, et en plus, il sait nous gratifier d'un sympathique refrain et de solos bien envoyés ! Bref, que demande le peuple ? Un final d'une grande richesse émotionnelle accompagné de notes de piano aussi froides que la mort ? Eh bien rassurez-vous, il est là juste pour vous ! Comme quoi, des fois, il suffit de demander...

On poursuit avec "Invocation Of Baphomet", morceau agrémenté de magnifiques saccades en guise d'intro, avant de prendre son envole avec un riff résolument black metal. L'intensité est au rendez-vous, ne serait-ce qu'avec une batterie d'un excellent niveau et plutôt bien produite ! Là, on s'éloigne un peu de Behemoth, pour aller faire un tour du côté de la Norvège, même si la musique d'Elderblood est heureusement plus intéressante et personnelle que celle de Dimmu Borgir, pour ne citer qu'eux, la production pouvant dans une certaine mesure les rapprocher. Il ne faut pas non plus négliger les influences modernes et malgré tout proches de la scène polonaise qui situerait parfois les Ukrainiens du côté de Vesania... En tout cas, même si ce titre est un peu plus symphonique, l'efficacité est toujours au rendez-vous, et comme un poisson de la Baltique, vous serez très vite ferrés par les quelques lignes mélodique distillées avec parcimonie ! "Devil In The Flesh", quant à lui, ne fait pas dans la dentelle avec un riff principal typiquement death mélodique suédois... Mais la comparaison s'arrête là, Elderblood nous offrant là un morceau de haute volée, certes mélodique, mais aussi incroyablement rapide et intense ! Et que dire du refrain au riff entêtant accompagné d'un blast ravageur ? Classieux, tout simplement, du genre que vous n'oublierez pas de si tôt ! Bref, un titre tout aussi explosif qu'un orgasme, probablement le meilleur de ce "Messiah" !

On enchaîne avec "Leviathan", morceau plus posé et résolument mid-tempo, histoire de calmer un peu le jeu et donner du relief et un peu de lourdeur à l'ensemble. Peut-être pas aussi lourd qu'un Belphegor sur ses passages les plus lents, mais quand même... Le titre va quand même prendre un peu de vitesse et se blackiser sur sa deuxième moitié, plus noire et émotionnelle ! Peut-être pas le meilleur morceau à mon goût, mais il est idéalement situé sur la playlist et s'avère peut-être un peu plus personnel et intimiste, ce qui le rend assez intéressant malgré tout... S'ensuit un "Satana" qui revient lorgner du côté de la scène polonaise, mais cette fois plutôt vers des groupes comme Devilish Impressions ou Crionics. En tout cas, le feeling est là, de même que la brutalité, appuyée par un chant black parfaitement haineux ! Et l'arrivée du lead mélodique et des claviers sur la deuxième partie du morceau lui confère une aura toute particulière, entre puissance et mélancolie, mais aussi et surtout entre lumière solaire et froid hivernal. Elderblood, ou comment marquer des points avec talent et intelligence !

Le morceau suivant s'intitule "In Burning Hands Of God" et se veut plus mystique et introspectif, surtout sa première partie mid-tempo, comme un genre de Behemoth symphonique. Mais ce titre se permet aussi le luxe de nous offrir des passages résolument black metal et même un refrain mis en exergue par un chant clair quasi gothique ! Peut-être un peu opportuniste diraient certains, mais c'est plutôt bien amené, très bien fait et le tout, c'est que cela fonctionne très bien. Alors même si l'accroche est ainsi facilitée, ne boudons pas notre plaisir, et je préférerais toujours un groupe qui ose brouiller les pistes en mélangeant les influences qu'un groupe basique qui n'ose pas sortir de son carcan, à quelques exceptions près dont la démarche et le talent n'est plus à démontrer ! Après, c'est comme tout, il faut que ce soit fait avec talent et une maturité certaine, ce qui est parfaitement le cas ici... On terminera l'écoute avec "Adamas Ater", morceau plutôt lent tout ce qu'il y a de plus parfait en guise de balade de fin ! Un titre empreint de nostalgie et au fort pouvoir évocateur... Certes pas le plus violent de l'album, mais il n'est pourtant pas en reste du point de vue de l'intensité ! Le chant clair n'est pas non plus absent, comme un au revoir, mais de ceux où on se quitte la tête haute, avec peut-être un fierté toute ukrainienne...

Ce "Messiah" aura finalement été une très bonne surprise, tout d'abord de par le son que ne renierait pas bien des groupes polonais, mais aussi de par le registre pratiqué ! Elderblood pratique ainsi un excellent black / death metal parfois brutal, parfois symphonique, mais en tout cas souvent mélodique et d'une grande richesse émotionnelle comme a pu nous le prouver la fin de l'album. Le talent des musiciens est indéniablement présent, et on sent qu'ils ont déjà de longues années d'expérience, malgré la jeunesse du groupe. Après, Elderblood est peut-être encore un peu proche des groupes qui les ont influencés et manque certainement d'un peu de personnalité... Mais avec un tel talent, un telle maîtrise technique et une maturité évidente, gageons que les Ukrainiens auront l'intelligence de gommer ces quelques défauts à l'avenir afin de nous proposer un troisième album en tout point parfait... En attendant, si votre discothèque est un peu trop poussiéreuse à votre goût, jetez-vous sur ce "Messiah" et vous aurez droit à votre lot de fraîcheur et de puissance !