Le groupe
Biographie :

Cult Of Luna est un groupe de metal progressif suédois aux influences diverses (du sludge au metal atmosphérique), formé autour de Klas Rydberg au chant et de Johannes Persson à la guitare. Il a été créé à la suite du split du groupe Eclipse. Leur style se rapproche des groupes comme Neurosis, Isis ou Breach, bien que Cult Of Luna se demarque, adoptant un style nébuleux pouvant être apparenté à des groupes comme Envy ou même Explosions In The Sky.

Discographie :

2001 : "Cult Of Luna"
2002 : "Cult of Luna" (EP)
2003 : "The Beyond"
2004 : "Salvation"
2006 : "Somewhere Along The Highway"
2008 : "Eternal Kingdom"
2013 : "Vertikal" 2013 : "Vertikal II" (EP)
2016 : "Mariner" (avec Julie Christmas)
2019 : "A Dawn To Fear"
2021 : "The Raging River" (EP)
2022 : "The Long Road North"


Les chroniques


"The Long Road North"
Note : 18/20

L’univers de Cult Of Luna s’étend avec son huitième album. Depuis 1998, le groupe suédois composé de Johannes Persson (guitare / chant, Riwen, Khoma), Magnus Lindberg (guitare / percussions), Andreas Johansson (basse), Thomas Hedlund (batterie, ex-Khoma), Fredrik Kihlberg (guitare / chant, Khoma) et Kristian Karlsson (claviers / chant, pg.lost) nous dévoile "The Long Road North" en 2022.

L’oppressante "Cold Burn" est la première à frapper, agrémentant progressivement ce son régulier et pesant avec un groove sombre, des hurlements et une folie évidente. Le titre mêle habilement une rythmique écrasante avec cette progression constante dans la noirceur, tout en proposant des éléments plus planants et entêtants pour contraster avec les hurlements déchirants avant "The Silver Arc", la composition suivante, accompagnée de Mariam Wallentin. Le mélange sévit à nouveau tout en développant des sonorités extrêmement accrocheuses, que le groupe couple à des leads dissonants pour un long break, puis "Beyond I" nous offre un court interlude mystérieux. Il sera accompagné d’une voix féminine pour une touche de douceur supplémentaire avant que Colin Stetson ne rejoigne les Suédois avec son saxophone pour la longue "An Offering To The Wild". Un son dissonant et angoissant nous parvient, puis le groupe fait apparaître lentement et progressivement les instruments jusqu’à cette explosion de saturation. Les mélodies prennent de l’ampleur, reléguant les hurlements à de courtes interventions pour laisser le son éthéré nous envahir, puis une tornade de rage prend forme, s’apaise et nous écrase à nouveau.

"Into The Night" prend la suite avec une certaine quiétude et des sonorités inquiétantes accompagnées par une voix claire rassurante qui nous berce, mais l’intensité grandit progressivement, et elle finit par nous envahir avec cette rage libératrice, qui s’éteindra pour laisser place à "Full Moon". Pesant mais rapidement entêtant, le court titre aérien se fait accompagner de claquements de mains et de claviers pour nous guider jusqu’à "The Long Road North", le titre éponyme, qui propose de légers accents blues voire country sur son introduction. La progression jusqu’à l’explosion de saturation lancinante est très lente, et l’alliance de cette rage brûlante avec une quiétude apaisante est assez surprenante, mais le groupe la rend intense et prenante, bien qu’on soit surpris par les influences noise avant la fin. Le titre s’apaise avant de laisser "Blood Upon Stone" nous entourer de sa saturation sombre et mystérieuse. La rage brute fera rapidement son apparition, mais le groupe place également un long break assez technique et mélodieux avant de lui laisser libre cours en compagnie de Laurent Brancowitz et Christian Mazzalai aux guitares. L’album prend fin avec "Beyond II" qui voit le retour du saxophoniste pour un passage éthéré et très doux avec lequel le groupe nous laisse une image sombre en tête.

Les expérimentations musicales ne sont pas rares chez Cult Of Luna, et cet album prouve que les musiciens les maîtrisent à la perfection. Sans surprise, c’est l’intensité qui guide "The Long Road North", qu’elle naisse dans la violence, l’oppression, la noirceur ou la quiétude.


Matthieu
Février 2022




"The Raging River"
Note : 17/20

2020 a été une année décisive dans la direction artistique de nombreux musiciens / groupes. Pour plusieurs d'entre eux, la situation d'enfermement a eu une incidence incontestable sur l'écriture des morceaux, le processus de création devenant dès lors plus intimiste, plus introspectif. Ce temps de pause imposé, même si on aurait préféré l'éviter, a en revanche permis aux artistes de pousser la réflexion sur l'influence de l'éloignement du public, de la disparition des live - curseur vibrant et direct qui permet d'avoir un retour instantané sur son travail et de se connecter de manière inégalable à son public. En Septembre 2019, avec l’album "A Dawn To Fear", largement plébiscité par les critiques, Cult Of Luna marque une nouvelle étape musicale dans sa carrière. Plus planant que jamais, le groupe a évolué vers des compositions terriblement vibrantes, puissantes, mélodiques oserais-je dire poétiques. Avec un don incontestable pour nous embrumer le cerveau dans un voyage sombre, irréel et nébuleux. Entre temps, 2020 est passé par là et a réveillé les consciences à tous les niveaux, qu'ils soient humains, sociologiques ou culturels. Le besoin de redonner du sens à sa vie, de se recentrer sur l'essentiel et d'être en accord avec ses aspirations, est devenu vital. A ce titre, Cult Of Luna se sent épris de liberté et veut se rapprocher de son public. Le groupe crée donc son propre label Red Creek Recording, et sort l'EP "The Raging River" pour "faire le pont entre le passé et l'avenir musical" du groupe.

En seulement 5 titres, mais 38 minutes de musique, le groupe suédois relève plutôt bien le défi qu'il s'est lancé. Il réutilise une recette qui a fait ses preuves. Au fil de l'eau, "The Raging River" nous entraîne sur des flots plus ou moins tourmentés avec toujours ce talent pour créer des ambiances atmosphériques et lourdes teintées de mélancolie. On se laisse irrémédiablement embarquer par "Three Bridges" qui débute l'EP et qui reprend le flambeau de "A Dawn To Fear", en déroulant 8mns45 de lourdeur avec un long passage éthéré à 6mns qui permet juste de reprendre son souffle avant le rouleau compresseur final. "What I Leave Behind", quant à lui, sent bon le doom avec son tempo très lent et vaporeux. Les cuivres apportent une chaleur insaisissable au morceau. J'aurais presque envie d'utiliser le terme "vibrance" lié à la photographie, tellement les notes apportent un panorama de couleurs enveloppantes et réconfortantes, malgré la puissance agressive en fond. L'excellente surprise de cet EP c'est le troisième morceau "Inside A Dream" avec en guest Monsieur Mark Lanegan. Ce morceau est un délice de douceur et de mélancolie au milieu de l'EP. La superbe voix chaude et vibrante de Mark Lanegan est sublimée par la musique si éthérée et si douce de ce titre. Et inversement. A tel point que "Inside A Dream" paraît court, bien trop court ! Non seulement il marque une pause dans l'EP, mais il fait aussi le pont entre les deux premiers morceaux bien lourds, et les derniers "I Remember" et "Wave After Wave", plus calmes, plus posés.

"I Remember" est dans la continuité du début de l'EP, et bien qu'il soit un bon morceau, il manque peut-être quand même un peu de créativité et de punch. Il manque ce petit je-ne-sais-quoi qui fait d'un morceau, un GRAND morceau. On a connu mieux dans les compositions du groupe. Quant à "Wave After Wave", ce titre se pare d'agréables sons synthétiques qui créent un ensemble lumineux très progressif . Ce morceau - si l'on ne compte pas "Inside A Dream" avec Mark Lanegan - se détache un peu du reste de l'EP. C'est sûrement grâce à la lenteur du tempo - mais ici débarrassé d'une quelconque agressivité des guitares - et surtout les fameux synthés presque enjoués (j'ai bien dit "presque") qui permettent de créer cette impression de légèreté assez nouvelle chez Cult Of Luna. Ce morceau divisera peut-être les auditeurs. Pour ma part, je le trouve particulièrement "rafraîchissant" et je tombe sous le charme de cet univers post-rock très synthétique et plus lumineux voire langoureux que les autres compositions. Je termine cet EP sur un sentiment de béatitude alors qu'il avait débuté sur des aspérités plus sombres. Ce dernier titre serait-il la future direction artistique du groupe ?

"The Raging River" pourrait se résumer ainsi : un objet musical qui vient parfaitement compléter "A Dawn To Fear", un peu comme s'il fallait boucler la boucle, terminer un processus artistique pour pouvoir accoucher d'un nouveau projet. Il faut avouer que Cult Of Luna avait placé la barre très haut avec "A Dawn To Fear" et le degré de perfection de cet album est tel, qu'il est un peu difficile pour "The Raging River" de le surpasser voire même de l'égaler. Evidemment les morceaux sont toujours prenants, évidemment on retrouve la qualité de composition de Cult Of Luna, évidemment il réserve d'excellentes surprises comme "Inside A Dream" et "Wave After Wave"... Néanmoins on a peut-être un peu perdu la puissance émotionnelle (question de rythmique aussi, quand "A Dawn To Fear" est truffé de "morceaux dans le morceau", "The Raging River" est, lui, un peu plus linéaire, un peu plus lent à dérouler son ambiance) ainsi que les mélodies terriblement accrocheuses et mélancoliques du précédent album.

La durée d'un EP a pu jouer un rôle sur la façon de s'exprimer musicalement, en laissant moins de place pour raconter une histoire musicale. Mais je pense plutôt que c'est un choix de Cult Of Luna qui table sur une montée plus progressive des sensations. Et on en revient à ce besoin de "se recentrer sur l'essentiel" dont je parlais en début de chronique. "The Raging River", annoncé comme un EP de transition, remplit bien sa mission. Il nous permet de patienter délicieusement jusqu'à la nouvelle et plus longue proposition des suédois. De plus, il ouvre des perspectives intrigantes et attise plus que jamais la curiosité sur la direction artistique possible du prochain album.


Miss Bungle
Février 2021




"A Dawn To Fear"
Note : 19/20

Cult Of Luna revient avec un nouvel album plusieurs années après la sortie du somptueux "Vertikal" en 2013. Si les premiers albums des Suédois figuraient dans un sludge fortement teinté post-hardcore dans la lignée d'Amenra, au fil des années le groupe a constamment évolué vers un post-metal de plus en plus raffiné et travaillé. Grâce à des mélodies plus lancinantes, des plages presque doom très planantes et à une voix moins agressive mais tout aussi envoûtante. Cult Of Luna a su créer sa patte, son identité. Des projets parallèles, comme Mariner avec Julia Christmas, ont aussi démontré que Cult Of Luna est capable d’apporter de la douceur et de la profondeur à sa musique. L'introduction de sons synthétiques dernièrement dans "Vertikal" avait conféré une nouvelle dimension aux compositions du groupe, une modernité dans l’instrumentation et une atmosphère parfaitement identifiable. Ajoutons à cela une facilité déconcertante à faire monter progressivement l’intensité des morceaux et on obtient un mélange explosif. C'est donc cette atmosphère que j'espérais vivement retrouver sur "A Dawn To Fear". Alors que se cache-t-il derrière le cercle noir et blanc, austère et froid de la pochette ?

Pas de longue introduction pour le premier titre "A Silent Man". Cet homme caché dans l'ombre d'une porte n'est pas aussi silencieux que le prétend le titre. Sans cérémonie, Cult Of Luna rentre dans le vif du sujet avec un morceau tout à fait catchy qui gagne immédiatement l'attention de l'auditeur et fait monter l'excitation instantanément. Avec ses dix bonnes minutes, le morceau monte en tension grâce à une orchestration riche et intense. Une très belle mise en bouche. Mais le meilleur reste à venir… On enchaîne avec le titre "Lay Your Head To Rest", le plus court de l’album, 6 mns 23 tout de même. Il illustre parfaitement le ton général du reste de l’opus. Un morceau délicat et chargé en émotion. De longues plages travaillées par une instrumentation savamment dosée. Tout en subtilité et sans jamais en faire trop. Mais c’est avec le morceau-titre, "A Dawn To Fear", que l’on prend une claque magistrale ! Presque chamanique pendant les trois premières minutes, ce morceau déroule ensuite un univers post rock des plus élégants, non sans rappeler des pointures comme Pink Floyd et surtout Ulver (notamment pour la voix). C’est pour moi, Le titre le plus abouti et le plus prenant de l'album !

Au fil de l’album, on oscille entre puissance sur "The Silent Man", "Nightwalker", "The Fall"… où l’on retrouve bien le style Cult Of Luna, et profonde mélancolie ("Light On The Hill", "Lay Your Head To Rest", "We Feel The End"). Pour obtenir cette mélancolie à la limite de la tristesse, les guitares se font discrètes et aériennes. Mais c’est le travail sur les percussions qui m’impressionne le plus. Les éléments de la batterie sont littéralement "caressés", dans un style smooth jazz… Un vrai travail d’orfèvre pour sublimer les mélodies. La deuxième perle de l’album, c’est sûrement "We Feel The End". Ce titre est d'une beauté absolue ! Il dégage une tristesse qui m'a presque mis la larme à l'oeil. Je retrouve également avec délice l’univers du groupe The Ocean qui manie lui aussi à la perfection cette ambiance sombre et onirique. En un mot, l’opus "A Dawn To Fear" tient en haleine depuis la première jusqu'à la dernière note.

"A Dawn To Fear", c’est un voyage introspectif de 79 minutes qui ne peut laisser indifférent. Il nous touche au plus profond de nos émotions. L'atmosphère est enveloppante, presque même réconfortante. Car même s’il en émane une tristesse et une mélancolie renforcées par des textes sombres, la qualité de Cult Of Luna c’est de produire aussi des morceaux lumineux ! Un album splendide, cohérent et qui ferait une excellent bande son pour des projets cinématographiques. C’est indéniable, Cult Of Luna ne cesse de se bonifier avec les années. Il a gagné en finesse et en élégance sans pour autant abandonner la lourdeur qui fait son identité. A écouter d’urgence.


Miss Bungle
Septembre 2019




"Vertikal"
Note : 14,5/20

Cult Of Luna est un de mes groupes phares, qu'on se le dise, si ce n'est mon groupe phare. Ces ambiances majestueuses, ces grosses parties lourdes (de sens) et ces couplets dénués de toute fioriture, simplistes à l'extrême, m'ont toujours procuré un nombre incalculable de sensations. Alors quand l'album fut annoncé en 2013, c'est un peu comme une pucelle en chaleur que je me suis retrouvé.

"Vertikal" est le premier album après quelques (trop longues) années silencieuses et le dernier effort de la part du groupe. Cult Of Luna change peu à peu son fusil d'épaule. Quelque chose de plus lourd sur l'ensemble beaucoup plus massif avec un chant plus présent ainsi que des ambiances et synthés plus omniprésents qu'à l'accoutumée. Là où sur "Eternal Kingdom" le groupe se voulait résolument plus "offensif", il prend plus le temps pour des ambiances, avec un développement qui se fait progressivement... Passé une introduction qui n'était pas forcément indispensable, Cult Of Luna propose des morceaux qui rentrent forcément dans sa branche d'ambiances reconaissables entre toutes, tout comme le chant de son frontman, écorché, tendu jusqu'au bout et puissant à outrance. Le morceau "The Weapon" nous plonge directement dans cette ambiance tendue avec une patte reconaissable entre toutes, les enchaînements se font sur des morceaux comme "Vicarious Redemption" d'une durée de 18 minutes, rempli beaucoup plus de ces ambiances électroniques et de ces synthétiseurs froids qui se faisaient discrets chez Cult Of Luna auparavant. Les morceaux s'enchaînent sans vraiment de sublimation comme Cult Of Luna nous y avait habitués, jusqu'à ce morceau complétement dingue et sidérant qu'est ce "Mute Departure"… long dans les ambiances, mettant, contrairement aux autres morceaux et conformément à ce que l'on connaît de Cult Of Luna, la voix comme un instrument supplémentaire mais non comme quelque chose d'indispensable mis en avant. On retrouve toute la qualité des Suédois avec ces ambiances, ces développements et ces créations. Au travers de ce dernier CD, le groupe peut à la fois ravir et décevoir. Ravir car certains morceaux sont vraiment superbes de lourdeur et d'ambiances, véritablement dans la veine du groupe, et promet de plonger, par intermittence, l'auditeur dans les méandres de Cult Of Luna. La déception vient justement du changement des compositions avec quelques particularités et variations qui ne reflètent pas ce qu'est l'ensemble de l'oeuvre et de l'identité du groupe. Ce CD, pour tout fan, sera peut être en demi-teinte si ce n'est ce "Mute Departure" hors normes.

Le son est, quant à lui, véritablement à la hauteur, puissant, sombre et violent, nous plongeant dans des ambiances et dans un ressenti profond. Grosse production, des musiciens à la hauteur, un album attendu, des ambiances fortes mais... mais... mais... il manque un petit quelque chose qui ferait de cet album une grosse révélation pour moi, peut-être en ai-je trop attendu. Les changements et l'évolution naturelle des musiciens vers d'autres compositions me satisfont-ils moins que lors de leurs débuts ? Je ne saurais le dire. Très bon album au demeurant, "Vertikal" ravira les nouveaux fans, et marquera peut-être, selon les personnes, une pointe d'amertume pour les fans de longue date. A vous de juger, dans tous les cas cet album superbement produit se doit d'être dans votre CDthèque.


Sam
Février 2013


Conclusion
Le site officiel : www.cultofluna.com