Le groupe
Biographie :

Cortez, trio suisse (pas de basse !), a commencé à se produire en 2001. Après avoir joué avec des groupes tels que The Dillinger Escape Plan, Isis, Unsane… ils se sont forgés une solide réputation scénique. Absent pendant de longues années le groupe décide de faire son retour en 2012 avec un split aux côtés des sauvages de Plebeian Grandstand puis, en 2013 avec un nouvel album, "Phoebus". Cortez éructe toujours sa furie noise-hardcore incandescente et fougueuse. Samuel, guitariste des débuts, soutient désormais le groupe en tant que compositeur / producteur. Un troisième album, "No More Conqueror", voit le jour fin 2018.

Discographie :

2004 : Démo
2005 : "Initial"
2013 : "Phoebus"
2018 : "No More Conqueror"


Les chroniques


"No More Conqueror"
Note : 17,5/20

Le jour où ils ont choisi le nom du groupe, les mecs se sont plantés. C’est Phénix qu’il aurait fallu donner comme nom au groupe, les dudes sortent un putain d’album, disparaissent, se recomposent différemment et ressortent une nouvelle bombe. D’ailleurs, les couleurs rougeoyantes de l’artwork y font penser à cet oiseau légendaire. Mais non, Cortez a décidé d’appeler son nouvel opus "No More Conqueror", joli paradoxe quand on porte le nom d’un bien connu Hernan.

Enfin bref, tout ça pour dire que ça fait cinq putain d’années qu’on attend, je ne peux pas attendre plus longtemps et je pars à la conquête de l’album. Dès les premiers tours de disque, plusieurs noms résonnent dans ma tête (qui pourtant ne sévissaient pas exactement dans le même style mais bon). La musique est précipitée, étouffante, les distorsions deviennent la norme, et la batterie presse les cordes jusqu’à ce que ça saigne. Les cordes vocales, elles aussi saignent, et la violence qu’elles crachent sert aussi bien la mélancolie de "Seven Past Forever" ou "Antes Dos Dias Dos Deuses De Ontem" que le décor post-météorique d’une plaine verte deux heures plus tôt sur "Hemigraphic" et "Abodes Of Bail Season".

Sur des titres comme "In Albis", "Duende" et "Ajatashatru" (j’ai déjà cherché tous les jeux de mots j’ai rien trouvé de vraiment poilant alors démerde-toi) c’est carrément la guerre, un putain de carnage. Des riffs lourds aux rythmiques effrénées il n’y a qu’une coulée de lave, et la formation jongle comme ça entre les sensations, tantôt étouffantes, tantôt étouffantes (c’est une figure de style que je viens d’inventer, ferme-la). On atteint un sommet de violence sur "According To Claude Bernard", sûrement un des morceaux les plus marquants de cet opus avec une fin absolument assommante et c’est tant mieux que ce soit de ce titre que découle un clip.

Tous les titres s’enchaînent sans qu’à aucun moment on trouve un arrière-goût de réchauffé. Tout est fluide comme dans un Tarantino bien ficelé. Et comme à la fin d’un de ses scénar’ de génie, c’est l’apothéose. Comme si le groupe faisait un résumé biaisé de ce qui s’est passé avant, une autre interprétation, un autre angle de vue, de compréhension. Un final parfait en somme.

Imaginez demain qu’un ministre bien intentionné décide de mettre une classification de la violence sur les pochettes des albums, comme on le fait pour nos putain de lave-linge, dans la catégorie "rock" et sur une échelle de A à G j’hésite entre mettre un G et un A. d’abord un G car c’est extrêmement violent, ensuite un A parce que c’est extrêmement bon.


Kévin
Février 2019




"Phoebus"
Note : 18,5/20

Si tu t’apprêtes à lire les quelques lignes qui suivent c’est que tu te prépares psychologiquement à prendre une sévère dérouillée. La première raison c’est qu’on parle du nouvel album de Cortez. La seconde c’est qu’on parle du nouvel album de Cortez après un silence de six ou sept ans et qu’ils ont du emmagasiner une monstrueuse quantité d’énergie les cocos ! On redécouvre le groupe avec "Temps Mort", et alors attention, le groupe fait monter la pression, nous fait languir sur des cordes tranchantes, et nous agresse tout simplement, de ses riffs meurtriers, de sa voix déchirée, de cette folie incontrôlable.

Ouch, ça pique sérieusement ! La première impression est très bonne ! Attendons maintenant de voir ce que nous réservent les neuf autres titres pour savoir si cette longue pause était légitime pour revenir plus fort encore. Quand "Transhumance" balance un riff qui rebondit comme un fou sur les murs capitonnés de sa chambre d’isolement, on ne peut être qu’aux anges de se faire malmener par un hardcore de cette qualité. Les atmosphères s’enchaînent mais ne se ressemblent pas, entre déflagrations de violence et accalmies, rythmées de transitions parfois brutales mais toujours bien menées. Pour ne rien gâcher au plaisir, on a toujours cette voix rauque, parfois pleine d’un désespoir que rien ne pourrait consoler, octroyant à la musique du trio, une facette screamo des plus prenantes ("Au-Delà Des Flots", "Un Lendemain Sans Chaine"…). N’oublions pas non plus les tendances noise qui parsèment les compositions et ainsi l’opus ("Arrogant Que Nous Sommes", Idylle), allégeant l’œuvre de quelques dissonances redoutables. Cortez n’est pas un assemblage de styles s’enchaînant avec brio mais bien une fusion donnant naissance à une musique riche et sincère. Malgré une cohérence infaillible le groupe nous surprend avec "L’Autre Estime", aussi déchaîné que triste, un titre court dans le haut du tableau de cet opus. Les démons de Cortez surgissent avec "Sulfure", un titre extrêmement sombre aux deux tiers de la galette qui nous enfonce la tête sous l’eau avec cette terrible sensation qu’elle n’en ressortira jamais. L’album se ferme sur "Borrelia" où, après presque trois minutes d’un son fouillis, ça explose à nouveau dans nos oreilles déjà saignantes. "Phoebus" commence en désordre et s’achève en chaos. Logique.

C’est maintenant que le verdict tombe. Sept ans ont passé depuis leur dernière galette et la question est la suivante : est-ce qu’on doit pardonner le trio pour cette longue, très longue attente et écouter cet album sans rancune ou est-ce qu’on doit se venger et les laisser pour mort ? Ni l’un ni l’autre, "Phoebus" est tout simplement magistral. Ecoute-le, le reste on s’en balance !


Kévin
Juin 2013




"Initial"
Note : 17/20

Recevoir un disque de Exutoire Records, ce fameux label screamo bordelais, c’est être assuré d’une écoute surprenante et d’une découverte de qualité. Après Asidefromaday, l’un des meilleurs groupes screamo du moment, il faut donc se pencher sur le cas de Cortez, groupe suisse évoluant depuis un bon moment, dont je ne connaissais que leur précédente démo. Et dans la première écoute, c’est une baffe, identique à celle prise lors de la découverte de Asidefromaday : un hardcore torturé, à la limite du noise et du screamo, sublimé par un univers graphiques des plus déroutants et un son plus que plaisant. Abordons le premier point : l’absence de bassiste, ce qui ne dénature en aucun cas l’ensemble, et tendrait même peut-être à plus de tyrannie, d’oppression sonore. Qui plus est, le jeu de guitare est suffisamment probant pour se passer d’un soutien quelconque, optant pour un mixe de riffs lourds et puissants et de riffs dissonants et entêtants. Il faut aussi compter sur le jeu de batterie, très sobre et pourtant nécessaire, spécialement taillé dans le marbre pour les compositions (du blast sur du screamo, voilà une éternité que j’attendais cela), et un chant plus que tiraillé, qui garde malgré cela une beauté et une violence qui ne manqueront pas de faire frissonner les amateurs du genre. Si certains passages évoquent des groupes tels que Envy ou The Saddest Landscape (Japon), on ne dénote cependant à aucun moment une quelconque copie, car Cortez délivre avec honnêteté et humilité une musique toute personnelle. Cerise sur le gâteau, le disque s’étale sur presque trois quarts d’heure, et il est nécessaire de se livrer à bon nombre d’écoutes afin de disséquer les moindres aspects d’une telle profusion de beauté musicale, sans pour autant cesser de ressentir chaque coup asséné par des riffs assassins et cruels. D’ailleurs, le morceau en écoute devrait sans doute convaincre les plus réticents que le screamo a encore de beaux jours devant lui, et peut sans conteste faire la part belle aux extrémités du metal !


Niaf
Novembre 2005


Conclusion
L'interview : Samuel Vaney

Le site officiel : www.cortez.ch