"Opvs Contra Natvram"
Note : 19/20
L’année 2022 marque la sortie du douzième album de Behemoth. Depuis 1991 (sous le
nom de Baphomet, rapidement changé), le groupe mené par Nergal (chant / guitare, Me And
That Man), accompagné par Inferno (batterie, Azarath, Witchmaster) et Orion (basse,
Black River, Vesania), ainsi que par Seth (guitare, Nomad) sur scène, répand sa musique
impie et blasphématoire. Soyez prêts pour "Opvs Contra Natvram", qui sort chez Nuclear
Blast Records, mais également Mystic Production et Victor.
L’album débute avec "Post-God Nirvana", un titre très perturbant au début qui nous propose
des bases orientées pagan sur lesquelles la voix reconnaissable du frontman apporte des
tonalités mystiques plus pesantes avant que le groupe ne revienne à la violence pure sur
"Malaria Vvlgata". Bien que la basse ne propose des éléments légèrement plus mélodieux, les
riffs sont massifs et agressifs, revenant aux influences les plus brutes du groupe avant que
"The Deathless Sun" ne renoue avec ces sonorités majestueuses qui constituent leur nouvelle
identité. On retrouvera également des parties leads torturées et une batterie énergique par
moments pour accompagner les hurlements ravageurs, puis "Ov My Herculean Exile" nous
enveloppe dans une dissonance mystérieuse et oppressante avant d’amener peu à peu des
éléments plus agressifs et lancinants. Les douces mélodies créent un contraste avec les
explosions plus lourdes tout comme sur "Neo-Spartacvs", une composition plus rapide qui
donne une place importante au duo rythmique ainsi qu’au chant, laissant les guitares
proposer des harmoniques qui rendent le mélange épique.
Ce titre représente le parfait
mélange entre violence et atmosphère sombre avant de laisser place à "Disinheritance" et ses
sonorités aériennes qui comptent sur un blast effréné pour devenir plus rapides et plus
puissantes. Les leads torturés se joignent à la batterie pour permettre au chant d’alimenter
cet univers chaotique qui prendra fin avec "Off To War!", l’un des nouveaux hymnes
fédérateurs du groupe, qui a déjà prouvé son efficacité en live cet été. Le titre nous
proposera également un passage plus calme avant de faire renaître les sonorités les plus
accrocheuses, puis "Once Upon A Pale Horse" dévoile une atmosphère plus pesante malgré
des mélodies planantes et une rythmique saccadée. Le titre se montre assez accessible, à
l’inverse de "Thy Becoming Eternal" et de son agressivité massive renforcée par des choeurs
hurlés aussi pesants et lourds que les riffs. Rapidité et rage se mêlent avant ce final plus
majestueux et incroyablement efficace, puis l’album se referme avec la sombre "Versvs
Christvs". Si la première partie de ce titre est très mélancolique et douce, attendez de voir
comment le groupe progresse vers cette fureur viscérale tout en conservant le côté
accrocheur jusqu’au dernier moment.
Si les fans de la première heure y trouveront toujours à redire, Behemoth maîtrise son
univers à la perfection. La violence côtoie des tonalités majestueuses, pesantes, mystiques
et même mélancoliques, faisant d’"Opvs Contra Natvram" un album rythmé et surprenant.
"I Loved You At Your Darkest"
Note : 18/20
L’un des groupes dont la sortie d’album a été la plus attendue de cette année, c’est sans
conteste Behemoth. Comment les décrire… Allant de blasphème en blasphème depuis
1991 (et ayant porté quelques mois le doux nom de Baphomet), Nergal (guitare / chant, Me
And That man) mène toujours la barque malgré les épreuves. Le line-up est complété
depuis des années par Inferno (batterie, Azarath, Terrestrial Hospice, Witchmaster) et
Orion (basse / chant, Vesania, Black River), ainsi que par Seth (guitare / chant, Nomad) pour
les lives, et la formation sort cette année son onzième album, "I Loved You At Your Darkest".
Du black metal de ses débuts au black / death impitoyable distillé par les Polonais par la
suite, le style de Behemoth a changé et ne cesse d’évoluer. Les paroles étaient écrites par
Krzysztof Azarewicz (The Fourth Is Eligor), un écrivain polonais ami du chanteur.
Concernant les orchestrations de ce nouvel album, elles ont été écrites et enregistrées par
Michal Lapaj (Riverside) et la cérémonie commence.
On débute par "Solve", une sorte d’introduction malsaine avec une chorale d’enfants qui
répètent les mêmes phrases. Le groupe arrive alors, plaçant quelques notes par dessus ce
spectacle auditif blasphématoire avant d’enchaîner sur "Wolves Of Siberia". Les chanceux qui
ont pu voir le groupe en live depuis le printemps la connaissent déjà, mais cette composition
me renvoie dix ans en arrière, lorsque j’ai découvert le groupe. Les ambiances éthérées
rencontrent des riffs puissants sous des hurlements démoniaques. Malheureusement, elle
se finit bien rapidement après un passage instrumental assez planant. L’ambiance sombre
reprend pour "God = Dog", un autre titre que l’on connaît depuis cet été. Cette fois, ce sont
des choeurs en chant clair que l’on entend pour accompagner la voix du chanteur, sur une
rythmique parfois atmosphérique. L’évolution de Behemoth n’a donc pas de fin ? La chorale
d’enfants revient sur la fin du titre, alors que le groupe part déjà sur "Ecclesia Diabolica
Catholica". Alors que vocalement on se rapproche de titres plus vieux, l’instrumentale est la
suite directe de l’album précédent, avec toujours ces tonalités violentes et forgées dans les
ténèbres.
Sortie quelques jours avant l’album, "Bartzabel" est un titre à l’introduction sans distorsion,
mais également très planante. Les hurlements laissent parfois la place à un chant clair, puis
c’est à nouveau une rythmique martiale et impie qui s’abat sur nous. Etrange, mais pas tant
que ça éloigné de l’univers du groupe. On enchaîne sur "If Crucifixion Was Not Enough" avec
une batterie plus sage que d’habitude, qui flirte presque avec le rock ou le punk. Même si
l’on sent le vice à plein nez, ce titre est… vraiment calme. Il est temps de se rattraper avec
"Angelvs XIII", dont la structure est certes plus simple que d’habitude, mais qui joue à fond la
carte de la violence sans aucune limite. Blast beat, riffs rapides et chant déchaîné, les fans
vont être ravis. Il n’y a que le solo, beaucoup trop sage et qui laisse place à une partie lead
hypnotisante, qui contraste avec ce déferlement de haine. On reprend avec "Sabbath Mater",
qui confirme définitivement le “nouveau” style de Behemoth, avec des influences
gothiques, rock, mais toujours sur cette base black / death et quelques orchestrations pour
sublimer le tout.
"Havohej Pantocrator" démarre lentement, mais semble être le titre le plus ancré dans le
blasphème omniprésent qui court sur tout l’album. Même lorsque les riffs envahissent
l’espace, ils restent calmes, avec une mélodie aérienne et les hurlements de Nergal. La
rythmique devient de plus en plus oppressante, et de plus en plus violente, jusqu’à cette
explosion finale qui semble annoncer la fin de la chanson, mais qui vous surprendra
probablement. Le groupe enchaîne avec "Rom 5:8", et on sent à nouveau que quelque chose
de malsain est en train d’arriver. En arrière-plan, des hurlements de rage mêlée à de la
douleur, alors que ce riff hypnotique s’étale devant nous, avant de s’embraser alors que "We
Are The Next 1000 Years" démarre fort dès la première seconde sans jamais faire
redescendre l’intensité. Même lors de la phase finale du morceau, la pression est palpable.
Le dernier titre, "Coagvla", est très exactement de la même durée que l’introduction. Cette
sorte de conclusion à l’album est très orchestrale, mais alterne aussi entre violence et
beauté, tout en conjuguant les deux en permanence. Il est d’ailleurs intéressant de jouer
l’introduction puis le dernier morceau.
Behemoth a changé. Behemoth a évolué. Si les fans de la première heure regrettent le
black metal impitoyable que le groupe jouait, voire la période black / death sadique et
sanglante, et que certains critiquent le nouveau visuel des Polonais… il faut avouer qu’"I Loved You At Your Darkest" est tout de même plutôt bon.
"The Satanist"
Note : 18/20
Après avoir traversé une passe plutôt compliquée liée à la leucémie contractée par le sieur Nergal, Behemoth revient aujourd'hui d'entre les morts avec un des albums les plus attendu de l'année 2014 !!! Guéri grâce à une greffe de moelle, on aurait pu s'attendre à ce que Nergal nous offre ici une sorte d'ode à la vie... Au lieu de cela, Behemoth nous livre un album à l'artwork très sombre et au titre aussi simpliste que mystérieux !!! Alors, l'attente valait-elle le coup... Réponse dans ces lignes !!!
Alors que beaucoup pensaient ne plus entendre de nouvel album de Behemoth, le groupe, tel un phénix, a fait un retour triomphal sur scène et a commencé à travailler sur un nouvel album... Ma grande crainte était alors que Behemoth tombe dans la facilité, et cette crainte s'est retrouvée confortée par l'annonce du titre : "The Satanist"... Malgré tout, l'artwork m'a interpellé car beaucoup plus sombre et torturé que ceux des précédents albums du groupe !!! Je me suis alors rappelé des concerts donnés une fois Nergal tiré d'affaire... Occulte, quasi ritualiste, Behemoth offrait alors un nouveau visage !!! C'est alors que la curiosité s'est emparée de moi et que je me suis lancé dans l'écoute de "The Satanist"...
Ce nouvel album commence par le single "Blow Your Trumpets Gabriel" dont est tiré le clip vidéo du même nom, très réussi ceci dit en passant... Même si le premier riff mid-tempo nous rappelle qu'on a bien affaire à du Behemoth, quelque chose a changé, de manière aussi certaine qu'insidieuse !!! Au niveau du son déjà, mais aussi au niveau du morceau en lui-même... Même si le début peut paraître un peu simpliste, ce n'est que pour mieux brouiller les pistes !!! Et quand on croit que le morceau va enfin vraiment commencer, le groupe calme le jeu pour mieux nous prendre par surprise !!! Et même si ce morceau n'est pas spécialement long, on y trouve un break mélodique très intéressant, présentant une magnifique ligne de basse, aussi bien que de formidables séances de blasts... Surprenant, certes, et cela a tendance à aiguiser mon appétit !!!
Mais avant de continuer avec les morceaux qui composent cet album, j'aimerais revenir sur le son si particulier de "The Satanist"... Loin des productions surpuissantes du groupe, ce nouvel album offre une production plus compacte bénéficiant d'un son étonnamment plus chaud qu'à l’accoutumée !!! Ce nouveau visage sonore fait la part belle à la basse et autant le dire, Orion se fait plaisir !!! Mais là où la magie opère vraiment c'est dans l'utilisation décalée de ce son chaud... En utilisant des samples glaciaux, sachant que les riffs ne sont pas en reste, on obtient un alliage unique qui marque la nouvelle identité sonore du groupe !!! Les samples, d'ailleurs, vont jouer un rôle prépondérant tout au long de l'album... Jouant sur les dissonances, leur écoute ne laissera pas indifférent !!! Pour moi, ils symbolisent l'oppression qui précède la possession démoniaque : pas toujours agréables, ils sont pourtant indispensables et permettent de créer une atmosphère on ne peut plus malsaine tout au long de l'album... Sur les passages blastés, "The Satanist" apparaîtra donc d'une densité incroyable et tout bonnement diabolique !!!
Le deuxième morceau se nomme « Furor Divinus » et est incroyablement efficace, avec des riffs prouvant que Behemoth n'a pas totalement mis de côté son passé black-metal !!! Malgré la vitesse des blasts et les breaks de batterie démentiels pondus par Inferno, ce morceau ne met pas que la vitesse en avant et c'est finalement la noirceur du morceau qui prédomine plus que sa puissance... Là encore, Behemoth ne tombe pas dans la facilité et c'est tant mieux !!! C'est ainsi que les Polonais nous offrent ensuite un morceau plus posé intitulé "Messe Noire" : ni rapide ni particulièrement lent, ce morceau est on ne peut plus torturé et porte son nom à merveille !!! Mais là aussi, surprise, Behemoth arrive à glisser un solo que l'on pourrait qualifier de "solaire", dans la plus pure tradition heavy-metal... Décidément, cet album nous emmène de surprises en surprises !!!
Vient alors un morceau qui pour moi est déjà culte : "Ora Pro Nobis Lucifer" !!! Malgré une intro classique et mid-tempo, le morceau devient très vite le brise nuque de l'album, et pourtant, Inferno met plus l'accent sur la double grosse caisse que sur les blasts... Là aussi, des riffs très sombres, quasi black-metal, et un break magique au milieu du morceau qui vous fera entrer dans une trance quasi ritualiste !!! Un morceau taillé pour la scène cela va sans dire... Tout comme " Amen", son successeur, où l'on retrouve le Behemoth rapide que l'on connaît !!! Mais même si les riffs nous placent en terrain connu, le son est toujours là pour créer la surprise et offrir un visage résolument plus sombre... Et là encore, le groupe va nous offrir un break mélodique et mid-tempo plutôt inattendu créant une atmosphère quasi religieuse !!! On ne peut vraiment pas dire que "The Satanist" est un album plat et sans relief...
Et voilà justement le titre éponyme, qui pourrait être considéré comme la ballade de l'album, même si c'est là un bien grand mot : il s'agit quand même d'un album de Behemoth !!! Superbes lignes de basse, rythmique mid-tempo, accords accrocheurs, ce morceau est diablement entraînant mais aussi teinté d'une mélancolie enivrante... Mais comme à son habitude depuis le début de l'album, Behemoth joue une nouvelle fois la carte de la surprise pour terminer ce morceau en beauté entre solo radieux et blasts transcendants !!! Ainsi, jusqu'à la fin de l'album, chaque morceau devient une découverte, aussi troublante qu'exaltante, comme un "Ben Sahar" légèrement arabisant ou l'excellent "In Absence Ov Light" et son passage parlé où Nergal est accompagné d'une guitare acoustique à la chaleur réconfortante alors qu'un saxo distille quelques notes plus froides qu'un blizzard... Et pour conclure ce nouvel album, Behemoth nous offre une véritable incantation intitulée : "O Father O Satan O Sun !" !!! Lancinant, envoûtant, ce morceau symbolise pour moi le nouveau visage de Behemoth... Complexe autant qu'efficace, ce morceau va littéralement vous posséder !!! Et quelque part, on pourrait même le considérer comme la clé de ce nouvel album, le morceau qui vous aidera à mieux appréhender "The Satanist"...
Car oui, cet album demandera plusieurs écoutes pour être compris dans son intégralité !!! Et non, le choix de ce titre d'album ne reflète aucun désir de simplicité...Ces 9 morceaux sont un cheminement tortueux vers un certain état de conscience, mais ce sont aussi les 9 clés qui nous permettront de mieux comprendre l'évolution spirituelle de Nergal, comme une porte entre-ouverte qui nous donnerait un aperçu de son être véritable... Car c'est particulièrement évident quand on commence à comprendre les ficelles de "The Satanist" : certes, Nergal a donné de son sang pour la réalisation de l'artwork, mais c'est bien son âme qu'il distille tout au long des morceaux et son chant, puissant, possédé ou même écorché, y est pour beaucoup !!! Loin de son image de businessman, Nergal nous invite à une passionnante introspection qui certes, n'est pas facile d'accès, mais c'est un challenge qui mérite d'être tenté par tous les amateurs de musique extrême... Cet album va en dérouter plus d'un, c'est un fait, mais cela concerne surtout ceux qui n'auront pas pris le temps de creuser en profondeur !!! A moins d'être leucémique, on ne sait pas précisément ce que Nergal a dû traverser, mais alors que son corps s'en est remis, son âme s'en est retrouvée meurtrie... Pourtant, "The Satanist" fait la démonstration d'une grande force de caractère, et même si l'âme de Nergal s'est considérablement assombrie, elle n'en est aujourd'hui que plus forte !!! Voilà ce qui transparaît au travers de chacune des minutes de ce nouvel album, véritable chemin de croix que l'on prend plaisir à partager avec celui qui est définitivement devenu une icône du metal extrême... "The Satanist", plus qu'un mot, un état de fait !!!
"Abyssus Abyssum Invocat"
Note : 03/20
Behemoth est un groupe Polonais qui, au fil des ans, a réussi à se tailler une réputation sur la scène metal internationale et cela peut s’expliquer par plusieurs facteurs. Il y a déjà le perfectionnisme de son leader, Nergal, qui l’a mené à créer une musique unique (et accompagnée d’une imagerie facilement reconaissable) et difficilement classable. Mais n’oublions pas la quantité de concerts (deux tournées ont déjà été données pour défendre "Evangelion" en Europe et une troisième y est prévue, sans oublier la Russie ou l’Amérique Latine) qu’ils ont donnés et la régularité de leur présence (un album tous les deux ans depuis "Satanica" sorti en 1999 avec 3 DVDs live, auxquels il faudra ajouter 2 CDs live et 4 EPs).
Hélas, en Août 2010, nous apprenons que Behemoth est mis en suspend par la leucémie de Nergal. Mais loin de faire oublier le monstre qu’est devenu Behemoth, une impressionnante mobilisation des fans aura lieu et Nergal trouvera le donneur compatible mais il faudra encore attendre une infection et quelques mois pour que redébarque Nergal et ses joyeux compagnons. Evidemment, à cause de l’état du leader, pas un seul CD ne se profile à l’horizon (il faudra sans doute atteindre la moitié, voir la fin de 2012 pour que le béhémoth détruise le monde).
C’est à ce moment que Peaceville Records a eu une idée de génie ! On a groupe génial dont le retour est attendu par des légions de fans qui ont surpris par leur fidélité, pourquoi ne pas leur arracher un peu de pognon ? On va faire quelques rééditions malgré le fait que Behemoth ne soit plus sur notre label et, comme par hasard, certains iront jusqu’à croire que c’est le nouvel album du groupe (véridique, j’ai assisté à de telles illusions sur les forums...). De plus, avec tous les nouveaux fans qui arrivent chaque jour, combien tomberont dans l’attrape-couillon du label juste parce que c’est la dernière sortie estampillée Behemoth ? Evidemment, pour mieux donner l’impression que c’est le dernier-truc-qui-déchire-tout, on va faire une pochette qui correspond à l’imagerie lumineuse d’un "Evangelion", plutôt qu’à l’imagerie qui correspond au véritable contenu de l’album : une imagerie noire.
Parlons-en de ce contenu ! Il s’agit en fait de deux disques contenant la version Américaine de "Conjuration" (2003) et le single "Slaves Shall Serve" (2005). Si à l’époque, ces deux galettes ont apporté pas mal de choses, à savoir des reprises ("Welcome To Hell" de Venom, "Penetration" de The Nephilim, "Wish" de NIN ou "Until You Call On The Dark" de Danzig) réussies, ou des pistes live d’un concert qui seront publiées en DVD plus tard dans la même année de 2003 et trois extraits live dans le single dont deux des morceaux ("Slaves Shall Serve" et "Demigod") sont issus de l’album "Demigod" sorti en 2004, force est de reconnaître cependant que l’intérêt de ces mini-albums est quasiment nul aujourd’hui et ce ne sont pas les ridicules et grotesques ajouts, soit un "As Above So Below" et un "LAM" tout deux live déjà entendus 150 fois (au moins) qui changeront quelque chose. Bref, rien de nouveau à l’horizon. A la limite, dans l’optique où quelques collectionneurs auraient oublié ces deux mini-albums et qu’ils tiendraient absolument à entendre les 4 reprises et les deux morceaux inédits (inédits car ils ne sont pas apparus sur "Demigod", étant moins intéressants et moins puissants que les autres...), cette réédition pourrait trouver un semblant d’intérêt.
En revanche, pour ceux qui s’imaginent que ça peut-être sympa pour ceux qui désireraient découvrir le groupe, je répondrai juste qu’en Novembre 2010 est sorti le superbe "Evangelia Heretika", double DVD contenant 2 concerts pour un total de 2h30 de show, deux documentaires totalisant presque 2h, 9 vidéo-clips, 5 making-of plus l’album live du show Polonais (1h15). Le tout pour un peu plus de 20€. N’oublions pas qu’"Evangelion" et "Demigod" sont des albums dantesques porteurs d’une identité forte et d’une puissance, d’une qualité rarement égalée. Alors, vous pouvez aussi découvrir Behemoth en passant par là.
"Abyssum Abyssus Invocat" est un coup commercial, un attrape-couillon, une insulte envers un Nergal malade et une tâche dans l’histoire d’un groupe qui a cherché à faire de son mieux et qui aurait mieux fait de ne pas laisser Peaceville sortir cette réédition pour son propre porte-feuille. Vous êtes prévénus.
Et dire qu’il faut noter cette masquarade...
"Evangelion"
Note : 19,5/20
Behemoth, c’était ce groupe de black metal Polonais au milieu des années 90 qui était doté d’un potentiel indéniable mais qui lentement, intégra à sa musique des touches death, transformant ainsi des classiques comme "Pure Evil and Hate", "From the Pagan Vastlands" ou "Sventivith Storming Near The Baltic", jusqu’à définitivement quitté le noble genre qui connu son apogée en Norvège. "Thelema 6" amorça définitivement cette transformation. Tandis que "Demigod" se montra plus brutal et que "The Apostasy" nous offrit un travail de compositions tout simplement remarquable, il semble que Behemoth ait enfin atteint le but pour lequel il avait dévié du black metal, voilà maintenant plus de dix ans. En Août 2009 sortit dans les bacs "Evangelion", la neuvième œuvre des talentueux Polonais, mais qui aurait pu savoir ce que nous autre, pauvres auditeurs, allions nous prendre. Nergal, le grand leader, n’est pas connu pour se reposer sur ses acquis et tout fan qui se respecte sait que l’homme se donnera à fond pour nous pondre le meilleur album possible, respectant ainsi sa maxime "Resting is not for the conquerors". Pourtant, "Evangelion" est différent des autres albums.
Premièrement, la nouvelle imagerie du groupe où le blanc domine, est une prise de risques non négligeable vu que nous étions habitués aux atmosphères plus noires ("Grom", "Demigod", "Thelema 6") ou sataniques ("Zos Kia Cultus", "Satannica"), pourtant, la recette fonctionne super bien et on sent que le groupe est désormais plus libre, moins soumis au règles du metal extrême et fidèle à lui-même (et pourtant, ces qualités étaient déjà bien présentes). Certains disent que Behemoth fait du death, du death black, du death brutal, du death technique etc... Mais qu’importe ! Behemoth est Behemoth, et ici, Behemoth est à son apogée. Cette phrase pourrait parfaitement résumer "Evangelion". Ce qui est frappant, c’est que cet album, tout en mettant en valeur la personnalité du groupe, semble couler de source. Il est naturel, en aucun cas forcé. C’est un peu comme si nos quatre hommes s’étaient assis dans leur studio et avaient enregistrés "Evangelion" en 41 minutes 54 puis ajouté les samplers déjà pensé sur le moment. Oui, "Evangelion" a l’odeur d’un classique du metal extrême.
Tout commence avec la sombre intro de "Daimonos" où Nergal hurle comme une légion venu des enfers, annonçant un album confectionné par le diable en personne. Combien de fois ai-je vu des critiques qui disaient qu’un album aurait put être composé par Satan tout simplement parce que l’album était sombre et violent ? Le diable est un être supérieur aux misérables êtres humains et s’élever à son rang consiste à créer une nouvelle dimension. Et c’est parfaitement ce qu’à fait Nergal, qui pourrait bien être l’antéchrist en personne. Nergal s’est élevé face à Dieu, comme créateur, le défiant au travers de son metal tutoyant la perfection. Il est semblable au Satan dans la tradition de Milton, l’ange rebelle qui a défié le grand créateur sur son propre terrain. Oui, "Daimonos" est bien de ce niveau. Aussi efficace que le reste de l’album, cette superbe entrée en matière ne cherche pas à dépeindre une imagerie "dark ’n' evil" grotesque mais bien à montrer jusqu’où le processus de création du metal extrême peut être poussé tout en restant du pur metal extrême. Car tout est dans le feeling et dans l’émotion qui en ressort.
Ainsi commence cette œuvre d’art diabolique, tous les morceaux qui suivent offrent un véritable intérêt. Prenons le second morceau, "Shemhamforash", une pièce entrecoupée, introduite et conclue par un sitar, qui nous plonge dans une ambiance maléfique et guerrière, portée par des samplers de lointains vocaux. Ces mêmes types de sampler permettent de relever toute la saveur du tube qui introduit chaque concert du groupe, "Ov Fire And The Void", un morceau au tempo assez lent malgré une double pédale très présente et très rapide. On pourrait presque comparer ce morceau au célèbre "At The Left Hand Ov God" par ses relents symphoniques et l’effet produit sur l’auditeur. Deux morceaux qui témoignent de l’héritage de "The Apostasy" sur la musique actuelle du groupe.
D’un autre côté, le groupe possède un versant lorgnant plus vers le death brutal, les grandioses "Transmigrating Beyond Realms Ov Amenti" et "Defiling Morality Ov Black God" en sont de parfaits exemples. On y voit ici l’impact qu’a eu "Demigod" (surtout sur le premier des deux morceaux) sur cet album de Behemoth. Rapide, technique, sombre, composé pour sonner comme du Behemoth. Dans un style relativement proche, "The Seed Ov I" semble être un résumé de l’ensemble des morceaux les plus brutaux de "The Apostasy", le côté symphonique en moins. Les cinq minutes du morceau sont entrecoupés d’un riff calme et dissonant purement black metal, preuve que Behemoth ne renie pas ses origines et sait se tourner vers son passé... quand cela sert ses intérêts.
Les pistes "He Who Breeds Pestilence" et "Alas, The Lord Is Upon Me" nous montrent un nouveau visage du groupe. Alliant des parties death a des passages calmes, dissonants, dopés en samplers, nous projetant au fin fond des forêts sauvages et sombres de Transylvanie, on y ressent des ambiance similaires a celles que l’on pouvait trouver sur leur culte MCD "And The Forests Dream Eternally". Tandis que "Alas, The Lord Is Upon Me" se concentre, malgré son ambiance décrite précédemment, sur le thème de la religion, "He Who Breeds Pestilence" rappelle un certain Amon Amarth sur certaines parties. Attention, cela reste plus proche de la musique de Behemoth que de celles des vikings Suédois, mais on y retrouve ici des passages épiques et guerriers, la batterie s’y veut parfois martiale.
Puis le final... "Lucifer", une œuvre d’art au sein d’une œuvre d’art. Le morceau est lent et basé sur 2 riffs (!) et pourtant, il est juste énorme ! Tout démarre sur une intro purement ambiante et progressivement, prépare l’auditeur à entrer dans la danse luciférienne. Ici, tout semble calculer au millimètre près pour que notre dos frissonne à chaque écoute. Au bout de cinq minutes, un certain Maciej Malenczuk vient réciter un poème. Un superbe conteur qui pourrait être le Pierre Bellemare de Behemoth. Puis, après une partie ambiante, le final du final. Le riff du refrain de "Lucifer" repris sur une rythmique groovy pour nous forcer à danser sur les ténèbres. Cette partie est déclenchée juste au bon moment, preuve du talent de compositeur de Nergal. Une outro ambiante, pour que l’auditeur puisse se remettre de ses émotions... celles qui sont provoqués par ce qui est une œuvre qui pourra entrer au panthéon des meilleurs œuvres du Metal extrême.
Le son de l’album est le meilleur que le groupe n’ait jamais sorti, moins compact que leur précédent méfait, Behemoth semble ici avoir trouvé la production parfaite, le tout accompagné d’un sens de composition qui les définit plus que jamais. Le désir de perfectionnisme de Nergal, son ambition et le talent des 4 membres du groupes (le chant d’Orion et de Nergal, la technique d’Inferno à la batterie), le désir de créer une imagerie forte et de faire une œuvre complète jusqu’au bout des ongles ont payé. "Evangelion" est un grand album de Behemoth et espérons qu’il ne soit pas le dernier.
Cependant, il y a deux raisons pour que cet album n’ait pas la note maximale malgré ce qui a été dit :
Les notes étant subjectives, pour que je sois en mesure de lui donner la note maximale, il faudrait que ce soit l’album de mes rêves, mon album ultime capable de me dissuader de composer.
Nergal est un perfectionniste et un véritable génie. Il revient toujours plus fort et on peut attendre un dixième album meilleur qu’"Evangelion".
Behemoth risque bien de détrôner Morbid Angel, puisse ce groupe continuer sur cette voie qui fera d’eux les futurs maîtres du monde.
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