Le groupe
Biographie :

Aosoth est un groupe de black metal français créé en 2002. A l'origine, Aosoth était un projet parallèle formé par les membres du groupe Antaeus. En 2007, suite à la mise en veille d'Antaeus et au désistement de la plupart des membres du groupe, le chanteur MkM, seul rescapé du line-up originel, recrute BST, guitariste au sein de Balrog, Aborted et Genital Grinder et relance Aosoth. Le groupe sort son deuxième album, "Ashes Of Angels", en Octobre 2009 chez Agonia Records, suivi de "III : Violence & Variations" en Avril 2011, de "IV : Arrow In Heart" en Avril 2017, et de "V : The Inside Scriptures" en Novembre 2017.

Discographie :

2008 : "Aosoth"
2009 : "Ashes Of Angels"
2011 : "III : Violence & Variations"
2013 : "IV : Arrow In Heart"
2017 : "V : The Inside Scriptures"


Les chroniques


"V : The Inside Scriptures"
Note : 17/20

Retour d'Aosoth avec un cinquième album dont je ne suis pas sûr du statut, la biographie parlant de fin d'un concept et certaines interviews parlant carrément de la fin du groupe. L'avenir nous le dira, si c'est le cas on espère que les larrons impliqués nous livreront encore quelques saletés musicales un jour où l'autre.

Mais pour l'instant revenons sur cet album et voyons ce que "V : The Inside Scriptures" a dans le ventre. Par rapport à "Arrow In Heart", les morceaux redeviennent un peu plus "compacts", flirtant avec les huit ou neuf minutes là où certains pouvaient auparavant s'approcher du quart d'heure. On sent dès "A Heart To Judge" des dissonances assez proches du mouvement orthodoxe et toujours ce côté poisseux et brutal à grand renfort de blasts ravageurs, mais aussi des mélodies plus froides que véritablement malsaines laissant l'impression de quelque chose d'inexorable. "Her Feet Upon The Earth, Blooming The Fruits Of Blood" remet les pendules à l'heure avec une brutalité plus marquée et une dissonance constante avec des riffs totalement possédés et une ambiance générale forcément bien glauque. On retrouve la patte d'Aosoth mais avec un équilibre entre violence et passages pesants encore mieux maîtrisés, les deux occupent l'espace de façon équitable et n'empiètent jamais sur les plates bandes de l'autre. En résulte une ambiance plus prenante encore, toujours aussi sale, glauque et empreinte de désespoir à la limite de la folie. Malgré le relative variété de l'album celui-ci est doté d'une homogénéité qui demande de l'écouter d'une traite, comme un seul bloc de quarante six minutes. Sans aller jusqu'à dire que c'est un album concept il y a clairement un fil rouge, repérable aussi par la sublime pochette qui fait référence à "Arrow In Heart" justement.

On reconnaît aisément la personnalité du groupe mais sa musique a encore évolué, sans rien révolutionner mais creusant toujours plus loin, plus profondément. Si c'est la fin d'Aosoth, le groupe part sur une bonne impression, je ne dirais pas le sommet puisqu'on ne saura sûrement jamais si le groupe aurait pu faire encore mieux d'album en album mais en tout cas "The Inside Scriptures" monte encore d'un cran. Dommage pour nous mais au moins la démarche est honnête, quand l'envie n'y est plus il vaut mieux arrêter que de continuer et sortir des demies bouses. D'autant que j'imagine mal ces gars-là ne plus faire de musique du tout, on devrait les croiser dans d'autres projets un jour où l'autre. On se retrouve ici en face d'une sorte de synthèse de ce que le groupe a pu produire sur ces trois derniers albums, l'alliance quasi parfaite entre sa facette la plus violente et les ambiances maladives qui puent la folie et le désespoir à des kilomètres. C'est cette personnalité marquée qui fascine chez Aosoth, pas totalement old school, encore moins classique, jamais trop proche de la scène orthodoxe non plus mais en équilibre sur tout ça en même temps. Une expression sincère qui s'est toujours démarqué de la scène black en général, ne cherchant à coller à aucun dogme précis et préférant développer sa propre forme d'expression. Un groupe rare donc qui va laisser un gros trou si sa disparition est confirmée.

Un cinquième qui ferme peut-être le chapitre Aosoth pour de bon, en tout cas la qualité et l'authenticité sont évidemment toujours là et le black du groupe est toujours sale, brutal et malsain. Aucune chance d'être déçu avec ce nouveau méfait qui remplit très bien son office, comme d'habitude.


Murderworks
Mai 2018




"IV : Arrow In Heart"
Note : 17/20

Planquez les femmes et les enfants, Aosoth est de retour avec un quatrième méfait répondant au doux nom de "IV : Arrow In Heart" et ils sont toujours pas contents ! Le précédent album marqué un virage légèrement moins frontal, en levant un peu le pied sur les blasts et la brutalité, le groupe nous avait balancé un pavé bien plus glauque et malsain que les deux premiers. Alors quid de ce nouvel opus, encore plus noir ou un retour vers plus de brutalité ?

Je serais tenté de dire qu'il est encore plus dégueulasse que ses prédécesseurs, le trio infernal constitué de MkM, Bst et Inrvi n'a visiblement pas décidé de se calmer. Les blasts comme sur le précédent album ne forment pas l'épine dorsale de l'album contrairement à beaucoup de groupes qui s'égarent dans une violence stérile, ils ne sont là que pour mettre un gros coup derrière la nuque quand ils en ont l'opportunité. Ce qui domine maintenant chez Aosoth, c'est cette ambiance crasseuse et véritablement démoniaque, ce groupe vous veut du mal et ça s'entend tout de suite. Plus le temps passe et plus leur musique est torturée, malsaine, glauque et noire pour notre plus grand plaisir. Aosoth fait ce que le black metal devrait toujours être, pas forcément sur la forme qui après tout n'est qu'une affaire de goût, mais bien dans le fond. Cette ambiance menaçante et malsaine je ne la retrouve plus chez beaucoup de groupes de black, il faut en général aller voir ailleurs pour la retrouver (un truc comme "In Slaughter Natives" hors metal pourrait en remontrer à beaucoup en matière d'ambiances glauques, ou même Elend qui peut se montrer proprement terrifiant).

Pour revenir sur la forme, le détail qui fait plaisir c'est la basse de Inrvi gonflée à bloc et qu'on peut entendre sans avoir besoin de tendre désespérément l'oreille, elle nous balance ses coulées de plomb directement dans les tympans. Les guitares, quant à elles, sont toujours aussi sales et collent toujours parfaitement au style pratiqué, qui est tout aussi sale. Je crois qu'Aosoth fait tout bêtement partie de ce qui se fait de mieux en matière de black metal depuis un petit moment, tout est là et je ne vois plus aucune raison d'avoir les oreilles rivées vers les scandinaves. L'esprit originel est bien là, l'ambiance est là, mais Aosoth évolue sans jamais repomper les vieilles gloires du Grand Nord et sans jamais céder au bourrinage intégral. La violence contrôlée est bien plus pernicieuse, bourrer du début à la fin ne finit qu'a nous faire chier à la longue. Antaeus faisait d'ailleurs partie des seuls à savoir vraiment être violents correctement, sans vouloir faire le lèche pompes. A ce titre remettez-vous "Blood libels" dans les oreilles et vous comprendrez mieux de quoi je parle. Il faut avouer aussi que la voix totalement explosée et décharnée de MkM y est pour beaucoup, on sent que ça vient des tripes.

Bref, pour en revenir à Aosoth, je me demande à chaque album comment ils vont bien pouvoir continuer avec une telle qualité et une telle authenticité, et je me fais avoir à chaque fois ! "IV : Arrow In Heart" pousse encore une fois le bouchon plus loin que "III - Violence An Variations" à tous les niveaux. Niveau structures, les morceaux s'allongent de plus en plus, les premiers et derniers de l'album font respectivement 10minutes 38 et 14 minutes 14. 7 morceaux au total pour près d'une heure qui passera sans que vous ne vous en rendiez compte, une fois plongé dans un album d'Aosoth on y reste jusqu'à la fin coincé dans leur cloaque poisseux et sanguinolent.

Chapeau bas, voilà encore une pièce que tout amateur de black ou tout simplement de musique extrême et sombre se doit de posséder, au même titre que les trois précédents albums. Aosoth avance, change progressivement de visage mais garde le même esprit. Inutile de préciser qu'il y a très peu de risques d'être déçus si on connaît bien la musique du groupe.


Murderworks
Juillet 2013




"III : Violence & Variations"
Note : 17/20

Déjà le troisième album pour Aosoth qui ne chôme pas ces derniers temps, pas toujours bon signe puisque certains ne laissent pas le temps à l’inspiration de revenir en forme. Ce n’est pas le cas de Aosoth qui s’est même permis une grosse refonte de style pour cette troisième galette.

Je vous rassure tout de suite, ils ne se sont pas mis à taper dans le sous Cradle, c’est toujours du black bien malsain voire même plus qu’avant. Ben oui cette fois ils ont décidé de ne plus foncer dans le tas comme sur les deux premiers albums, même si les blasts se taillent encore une bonne part du gâteau on se rend compte tout de suite que leur musique est devenue plus pesante. Le résultat au final c’est que tous les morceaux sont beaucoup plus malsains, blindés de dissonances et le rythme se permet la liberté de carrément ralentir pour vous écraser les vertèbres à coups d’enclumes. Si vous n’en êtes pas encore convaincus je vais vous le confirmer, plus la peine de zieuter ce qui se fait en black scandinave puisque la relève est chez nous (entre autres) depuis un bon moment déjà.

Avec cet album Aosoth a décidé de vous traîner tout au fond, on se retrouve englué dans une matière qu’il ne vaut mieux pas identifier et pas moyen de se dépêtrer de ce truc poisseux. Je ne sais pas ce qui leur est arrivé mais autant les deux premiers étaient forcément déjà bien sombres, autant celui-ci explose tous les records depuis les débuts du groupe. C’est d’une noirceur impressionnante et on n’a pas un seul instant de répit pour essayer de reprendre un peu d’oxygène. Si vous vouliez retrouver l’esprit originel du black vous êtes plutôt bien tombé, "III" est un mélange parfait d’agression, de brutalité et les ambiances sont totalement dégénérées et crades. Si ce groupe garde cette progression d’albums en albums le prochain sera proprement terrifiant, et en ces temps de musique aseptisée, lisse et propre ça fait carrément du bien d’entendre un truc dégueulasse. 

Il y a une espèce de folie totale qui s’est emparée de la musique d’Aosoth et qui n’était pas présente avant, ou en tout cas pas dans ces proportions. La structure même de l’album est différente, là où tous les titres étaient indépendants sur les deux premières galette cet album donne l’impression d’être un énorme bloc de charbon dont tous les titres sont liés les uns aux autres. En tout cas le pari est réussi, on ne lâche pas l’écoute en plein milieu et se laisse entraîner dans les bas fonds (le début de "V" est vraiment terrible dans le genre). Et puis on a toujours les vocaux totalement décharnés de MKM pour rajouter à la noirceur ambiante, ce mec a définitivement une des meilleures voix du black pour moi.

Bref Aosoth était bon sur ses deux premiers albums, il est devenu carrément excellent sur ce nouveau méfait. Je pense que pas mal de monde sera d’accord avec moi, ce troisième album va vite devenir quasi indispensable à tout blackeux qui se respecte tant l’ambiance y est pesante et authentique. Si vous en avez marre du soleil et des gens qui se tassent à la plage près de chez vous, mettez vous ce "III" dans les oreilles ça devrait remettre pas mal de choses à leur place.


Murderworks
Juillet 2011




"Ashes Of Angels"
Note : 16/20

Vous aimez les bains de boue ? C’est très bon pour la peau. Non mais si je vous demande ça c’est parce qu’on a un nouveau dispositif à notre disposition vous voyez, ça s’appelle le Aosoth et c’est très efficace. En l’espace de 45 petites minutes vous allez littéralement rajeunir, parce que de la boue on n’en manque pas avec lui. D’ailleurs il va prendre un malin plaisir à vous y trainer vous allez voir, c’est un vrai bonheur (oh pardon). Ceux qui ce sont d’ailleurs penché sur la première version longue de ce projet de rajeunissement des cellules auront pu remarquer la puissance de ce procédé. Et bien là nous disposons d’une mise à jour encore plus riche en boue et d’autres matières visqueuses relativement inconnues. Mais bon peu importe de savoir de quoi c’est fait, tant que ça marche c’est le principal non ?

On sent clairement qu’Aosoth aime son black metal à l’ancienne, pas de fioritures Bisounoursiennes ici. On tape fort et là où ça fait mal sinon c’est pas marrant, alors oui il y a sûrement l’habituelle bande de grincheux qui va venir nous souffler dans les bronches qu’il n’y a rien de franchement original. Et je serais tenté de leur répondre qu’on s’en bat les glawis avec un tractopelle, on est venu là pour avoir quelque chose d’efficace et de vicelard. Et sur ce point, force est de constater qu’on n’a pas été déçus, hein les gras ? Une véritable collection de riffs tous plus crados les uns que les autres, supportés par quelques dissonances et autres dégueulasseries guitaristiques du plus bel effet. Vocalement parlant bah la voix de MKM fait comme d’habitude des miracles (re-pardon, qu’est ce que je peux faire comme bourdes moi aujourd’hui !), bien haineuse et torturée comme il faut. Autant dire que BST et MKM se sont bien trouvés sur ce coup là, entre les riffs dégueulasses du premier et la voix d’écorché vif du second on peut dire qu’on le tient notre duo gagnant !

Et derrière tout ça ça blast dur, mais le duo sait ménager quelques petites acalmies à certains endroits clés pour mieux repartir dans le défonçage de dents en règle. D’autant plus que lesdites acalmies sont bien pesantes et vicelardes, malgré l’apparition ici et là de quelques petites mélodies. Une fois de plus on sent l’héritage de la scène extrême des 90’s, voir même encore antérieure. Du black metal frontal, sans ornements atmosphérico-symphoniques, sans bidouillages electro ou autres vocalises féminines. Ici on est entre poilus, et les amateurs de mièvreries soit disant extrêmes vont vite se barrer en courant. Les amateurs de black metal pur et dur vont se régaler et jetteront des projectiles aux premiers en les regardant fuir. Bon on notera quand même que même si l’approche reste frontale, il y a un côté un peu plus contrôlé que sur le premier album.

Pour ce qui est du son vous vous doutez bien qu’avec BST aux commandes on ne va pas se retrouver avec de la bouillie sonore. C’est assez puissant sans tomber dans le son monstrueux (faut dire que ça ne collerait juste pas du tout à ce style de black) et les grattes disposent de cette petite touche de graisse qui les rend juste assez sales sans tomber dans le bordel inaudible. Bref du bon boulot qui colle parfaitement à l’album et au style pratiqué. D’ailleurs les blackeux suscités auront le plaisir de retrouver "Inner War" du très grand Antaeus dans une nouvelle version un poil plus speed et plus propre aussi. C’est d’ailleurs ce dernier point qui me fait préférer la version originale, plus chaotique et donc encore plus méchante. Mais que ça ne vous empêche pas d’y jeter une oreille attentive, comme on dit l’égout et les douleurs…

Donc voilà un bien bel album (bon ok je vais me coucher) de black metal pur sucre qui devrait amplement contenter tous les amateurs de la chose et qui confirme ce que je pensais d’Aosoth avec le premier opus. D’ailleurs il faudra que quelqu’un dise à BST qu’un être humain normalement constitué est sensé dormir un minimum quand même, entre les prods et les mutliples groupes dans lesquels il joue je commence à douter de son origine humaine. Mais bon à la limite tant que la qualité est là (comme c’est le cas ici) je ne vais pas m’en plaindre.


Murderworks
Décembre 2009


Conclusion
Le site officiel : www.aosoth.fr