Le groupe
Biographie :

Angmar est un groupe de black metal Français, originaire de Caen et composé de Heimreich, Welkin et Fog. Le nom du groupe provient de celui d'un personnage de J.R.R. Tolkien dans Le Seigneur des Anneaux : le Roi-Sorcier d'Angmar est le plus puissant et le chef des neuf Nazgûl, servants de l'Anneau. Un groupe de black metal Finlandais porte également ce nom. Après une démo autoproduite en 2004, Angmar a bénéficié d'une signature sur le label Northern Silence Productions qui a permis la sortie de son premier album longue durée "Metamorphosis" en 2006. Un split avec Alcest a ensuite vu le jour, toujours sur Northern Silence, sorti sur support vinyle en 2007, suivi du format CD en Février 2008. En Septembre 2009 parait le deuxième album "Zurück In Die Unterwelt" sur le label Allemand Ketzer Records.

Discographie :

2004 : "Aux Funérailles Du Monde" (Démo)
2006 : "Metamorphosis"
2007 : "Angmar / Alcest" (Split)
2008 : "Alcest / Angmar " (Split)
2009 : "Zurück In Die Unterwelt"


La chronique


Rares sont les occasions de chroniquer un petit chef d’œuvre… et c’est pourtant le cas ! Je commençais à croire que la capacité de créer des atmosphères aussi froides et majestueuses, aussi évocatrices n’était que l’apanage des formations Scandinaves ou Autrichiennes mais c’était sans compter sur Angmar… Plus qu’un simple album aux plages séparées je conseille l’écoute de cette œuvre dans son intégralité si l’on veut complètement s’imprégner de son atmosphère envoûtante. Cet album sera une confirmation pour certains, une révélation pour d’autres qui comme moi découvriront Angmar avec cette offrande, et pourtant les intéressés s’étaient déjà fait bien remarquer dans l’underground avec leurs précédents travaux et notamment un split avec Alcest, excusez du peu ! Le trio normand se joue avec talent des usages ou des clichés inhérents au black metal, là où certains sous une avalanche de codes se défendent d’être plus "true" que "true" (à en devenir ridicules).

Angmar, sans jamais toutefois dénaturer une certaine tradition, nous livre des titres qui avoisinent les 10 voire les 20 minutes sur la piste 3, avouez qu’il s’agit là d’un format plus répandu dans le doom que dans le black metal ! Mais la durée c’est la durée, encore faut-il ne pas ennuyer l’auditeur, que cela reste plaisant à écouter, et bien rassurez vous, c’est bien le cas ici ! Grâce à un sens de la composition évident, le groupe nous transporte littéralement et nous en fait oublier la notion du temps. D’emblée la premiére piste au titre éponyme met la barre très haute. Elle s’ouvre sur une guitare acoustique égrenant de jolis arpéges nostalgiques, bientôt rejointe par une voix claire et lointaine pour évoluer et tisser un paysage "dramatique" quand enfin à 3’30 un cri fend l’air et lance le début des hostilités pour permettre à un mur de guitare et une batterie très rapide de s’installer, transformant, emportant ce morceau loin, très loin dans les méandres d’un black metal triste et habité, sans toutefois se défaire d’une dimension épique et majestueuse tout au long de ses 12 minutes. Une sensation de nostalgie, de désolation non feinte émane de cette galette… C’est froid et puissant, c’est à la fois si beau et si désespéré… C’est la vie quoi… dans ce qu’elle a de plus tragique à nous offrir.

Les changements de tempos sont nombreux et aérant formidablement bien d’ambitieuses et longues compos sans que toutefois l’auditeur ne s’essouffle. La production est très bonne, sans sonner trop propre, bref elle sied à merveille au style pratiqué, limpide sur les arpéges et suffisamment massive pour le côté mur de gratte. Le chant est à la fois douloureux et rageur. Tous les instruments y compris la basse sont donc rendus perceptibles à leur juste valeur, chose plutôt rare il faut l’admettre. Angmar maîtrise l’art d’écrire de bien belles compos qui font voyager l’auditeur et l’implique totalement lors d’une écoute attentive. Ils ont aussi bien assimilé le fait d’inclure des parties acoustiques renforçant le côté mélancolique de leur black metal plutôt sauvage de nature.

La piste 3 "Perdition" est à ce titre un véritable exercice de style ou les Normands nous démontrent comment instaurer une subtile mélodie de guitare dans la tête de l’auditeur et maîtriser l’art quasi frustrant parfois du faux départ. Au travers de ce titre Angmar marche impunément sur la ligne invisible qui sépare sa musique du post rock (ou post hardcore ?) sans oublier d’y inclure quelques arpéges aux sonorités presque médiévales… la grande classe ! Et ça dure comme ça 8 minutes avant que le naturel black metal ne revienne au galop… Une pièce d’anthologie en 20 minutes rien que ça, et qui au même titre que la piste 1 justifie à elle seule l’acquisition de cette galette. Tendez bien l’oreille et vous percevrez en fond de superbes chants pagan qui viennent habiller ces compositions. Ce qui me permet au passage de souligner l’une des autres particularités de cette formation, c’est que chez Angmar tout le monde chante ! En effet même s’ils ne sont que trois, les instrumentistes n’hésitent pas à superposer leur voix et à offrir des chœurs plus que convaincants.

Si une ressemblance avec une autre formation Française majeure était à signaler, ce serait sans doute à Belenos qu’on ferait référence. Et ce n’est pas la deuxième moitié de cet album quoiqu’un petit peu plus conventionnelle dans son expression ou la durée des compos qui me contredira. Attention toutefois, n’allez pas croire à un plagiat, l’univers d’Angmar est suffisamment riche et personnel pour éviter cet écueil, non c’est plutôt dans le propos et la manière de s’exprimer qu’on pourrait relever des similitudes… Entendez par là qu’au-delà d’un héritage pagan évident, les deux formations pratiquent un black metal épique, froid et majoritairement rapide aux lignes mélodiques très marquées et dont semble émaner un profond sentiment de nostalgie non dénué d’une certaine grandiloquence, sentiment renforcé par la présence des chœurs dont j’ai précédemment parlé. Je finirai en soulignant que la pluralité linguistique est de mise, puisqu’en plus du Français, le groupe s’exprime tantôt en allemand, tantôt en Anglais.

Ajoutez à cela un artwork classe et assez dépouillé, rendant hommage à Mère Nature (et que l’on doit au batteur lui-même), une production excellente confiée aux mains expertes de Neb Xort (Anorexia Nervosa) et son désormais célèbre  DrudenHaus Studio  et vous comprendrez si je ne vous ai pas encore convaincus qu’on tient ici la confirmation d’une formation Française méritante qui aura su au milieu d’une scène pourtant surchargée imposer son style personnel avec talent, respect leur en soit rendu. On peut le dire haut et fort, Angmar vient de « commettre » un disque aux allures de "sale petit chef d’œuvre"… Je me répète mais tout est réuni : des compos inspirées, un son propice, une exécution sans faille particulière, rien à ajouter… On tient ici l’un, sinon le dernier grand album de black de cette fin d’année 2009, une album excellent que je ne peux que vous recommander sous peine de passer à côté de quelque chose, je vous aurai prévenus… PS : Aux dernières nouvelles il est en vente 10€ sur le site de Season Of Mist, ce serait dommage de se priver !


Ihsahn62
Janvier 2010


Conclusion
Note : 19/20

A écouter : Zurück In Die Unterwelt

Le site officiel : www.angmar-fr.com